Les Frères Sisters
sans que personne ne sache où. Il ne peut pas sâattendre à ce quâon les trouve sans aucun indice pour nous guider.
â Le Commodore sâattendrait au moins à ce quâon aille vérifier le placer de Warm.
â Oui, et nous pourrions lui dire que nous lâavons fait, sans rien trouver. Ou, si tu préfères, nous pourrions effectivement passer là -bas sur le chemin du retour. De toute façon, nous savons que Warm nây sera pas. Ce que je veux dire, câest que si câest seulement le contenu du journal qui nous incite à continuer, autant le brûler et poursuivre comme si nous ne lâavions jamais eu sous les yeux.
â Et si le journal nâétait pas lâunique chose qui nous pousse à continuer  ?
â Pour moi, câest lâunique raison.
â Où veux-tu en venir, mon frère  ?  »
Je répondis, «  Entre le magot de Mayfield et nos économies à la maison, nous avons assez pour quitter le Commodore une fois pour toutes.
â Et pourquoi ferions-nous une telle chose  ?
â Jâavais lâimpression que cela te tentait. Tu nâas jamais songé à arrêter  ?
â Tous ceux qui occupent un poste ont déjà pensé à le quitter.
â On a assez pour sâarrêter, Charlie.
â Sâarrêter et faire quoi  ?  » Il retira un morceau de gras entre ses dents, et le jeta dans son assiette. «  Essaies-tu de gâcher mon dîner  ?
â On pourrait ouvrir un magasin ensemble.
â De quoi  ? Quel magasin  ?
â Ãa fait longtemps quâon est aux affaires. Profitons de la santé et de la jeunesse quâil nous reste pour faire autre chose.  »
à mesure que je parlais, il manifestait une contrariété croissante et nâallait pas tarder à taper du poing sur la table et à mâinvectiver. Mais au moment où il allait vraiment se mettre en colère, quelque pensée apaisante dut le traverser, en sorte quâil se remit à couper sa viande. Il mangea de bon appétit tandis que mon plat refroidissait, et lorsquâil eut fini il demanda lâaddition et, en dépit de son montant élevé, paya pour nous deux. Je mâattendais à ce quâil me dise quelque chose de blessant à la fin du repas, et cela ne manqua pas. Il vida son verre de vin et lança, «  Bien. Il est évident que tu souhaites arrêter. Alors, arrête.
â Est-ce que tu veux dire que jâarrêterais et que tu continuerais  ?  »
Il opina du chef. «  Naturellement, jâaurais besoin dâun nouveau partenaire. Rex mâa demandé du travail par le passé, il pourrait peut-être mâaccompagner.
â Rex  ? mâexclamai-je. Rex nâest quâun chien doté de la parole.
â Il est obéissant comme un chien.
â Et il a la cervelle dâun chien.
â Je pourrais prendre Sanchez avec moi.  »
à ces mots, je fus pris de toux, et un filet de vin coula de ma narine. «  Sanchez  ! crachai-je. Sanchez  ?
â Sanchez est bon tireur.  »
Je me tenais les côtes de rire. «  Sanchez  !
â Je ne fais que réfléchir à voix haute, dit Charlie, en rougissant. Je risque de ne pas trouver quelquâun tout de suite. Mais tu as pris ta décision, et ça me va. Et le Commodore nây trouvera rien à redire, non plus.  » Il alluma un cigare et se laissa aller dans sa chaise. «  Nous poursuivrons cette affaire ensemble et nous nous séparerons quand tout sera fini.
â Pourquoi présentes-tu les choses comme ça  ? Se séparer  ?
â Je continuerai à travailler pour le Commodore et tu deviendras vendeur.
â Est-ce que ça veut dire que lâon ne se verra plus  ?
â Je te verrai quand je passerai par Oregon City. Quand jâaurai besoin dâune chemise ou de sous-vêtements, je viendrai.  » Il se leva et quitta la table et je pensai, Veut-il vraiment que jâarrête, ou est-il simplement en train de prêcher le faux pour savoir le vrai et mâinciter à continuer  ? Je lâobservai afin de déceler une réponse à cette question  ; et je commençais à me faire une petite idée
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