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Les grandes dames de la Renaissance

Les grandes dames de la Renaissance

Titel: Les grandes dames de la Renaissance Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Guy Breton
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Valenciennes. Comme son char traversait Arras, les bourgeois de cette ville crièrent :
    — Noël ! Noël !
    Elle les interrompit :
    — Ne criez pas « Noël », mais bien : « Vive la Bourgogne ! [34]  »
    Le lendemain, elle était chez son père.
    Mais elle ne devait jamais oublier l’affront que Charles VIII lui avait fait subir et ce fut par elle, dit le président Henault, que commença la haine qui s’est perpétuée entre la maison de France et la maison d’Autriche [35] …
    Elle composa d’ailleurs une complainte amère sur son départ de France.
     
    Moy Marguerite, de toute fleur le choix,
    Ay esté mise au grand vergié franchois
    Pour demourer et croistre,
    Que je fus grande auprès la fleur de lis,
    Là ay reçu tous bien que peut connoîstre,
    Là ay vu joustes, danses et tournois.
    Que ces grands biens me sont pris et faillis,
    Pas n’en doivent les miens estre jolis.
     
    Je y ai esté noblement aousée (mûrie)
    Plus de dix ans de noble rouée (tournure)
    Cuydant estre royne et espousée,
    Au roy Charles, et couronne porter :
    Mais bien parchois que je suis abusée.
    Par quoy dois estre en mon cœur doloriée,
    Car de par luy ay esté refusée,
    Et si m’a fait hors du vergier bouter.
     
    Après le départ de Marguerite, Charles, qui était tombé follement amoureux d’Anne de Bretagne, put se consacrer sans remords à son épouse.
    Celle-ci en fut heureuse, car, de son côté, elle avait un vif penchant pour le roi depuis la nuit de Langeais. Ce n’était pas encore de l’amour ; mais, au lit, cela pouvait en tenir lieu.
    Partenaire ardente, elle se révéla vite exigeante et contraignit son mari à des prouesses qui le laissaient haletant.
    Cette véritable fringale d’amour fut d’ailleurs remarquée par l’ambassadeur vénitien Zaccari Contarini, qui nota dans une de ses dépêches : « La reine est jalouse et désireuse de sa Majesté outre mesure, si bien que, depuis qu’elle est sa femme, il s’est passé peu de nuits qu’elle n’ait dormi avec le roi. »
    Charles VIII, qui aimait plus que de raison les jeux amoureux, voulut prouver sa reconnaissance à cette petite reine qui savait si bien aller au-devant de ses désirs.
    Tout d’abord, il fit embellir pour elle le château d’Amboise. On construisit des tours, on éleva des bâtiments, on traça des jardins, on posa des tapisseries magnifiques et l’on aménagea même une salle de bains…
    Un sourire et une nuit chaude récompensèrent Charles VIII de ces travaux gigantesques.
    Mais il désirait plus encore de son épouse, et, nous dit un historien : « Pour mériter l’amour de la plus belle reine qui fût au monde, le roi résolut de se signaler par quelque grande entreprise, et il se prépara à la conquête de Naples [36] . »
    Pourquoi Naples ?
    Parce que Charles VIII était héritier de la Maison d’Anjou et que la couronne de Naples avait appartenu jadis à des princes angevins [37] .
    À la fin de l’été 1494, les troupes royales furent prêtes. Il ne manquait pas une plume aux panaches des casques, pas un rivet aux armures… Et, un matin de septembre, Charles, en tête de son armée, quitta Amboise et se dirigea vers Lyon, où il devait laisser Anne avant de s’élancer vers l’Italie… L’Italie où il espérait se couvrir de gloire pour les beaux yeux de la reine…

6
    Les bijoux d’une femme sauvent l’armée du roi
    Sans la marquise de Montferrat,
qui paya le roi de France pour son ardeur au lit,
la première expédition d’Italie eût échoué…
     
    C. Lénient
     
    Charles VIII était un très curieux personnage. Il organisait toute une expédition militaire pour conquérir le cœur de son épouse, mais il emmenait dans un chariot confortable le groupe de jeunes et jolies dames peu farouches qui constituaient depuis quelque temps son petit harem.
    Car, si « son cœur ne battait que pour la reine Anne », son pauvre corps était en proie à une véritable folie génésique qui le forçait à avoir simultanément plusieurs maîtresses douées de bons tempéraments et riches d’expérience… Celles qu’il emmenait étaient ses préférées.
    Elles étaient « longues de jambes, fines de taille, portant le tétin haut et bien ferme » et montraient aux jeux de l’amour cette ardeur qu’il aimait et que possèdent toujours – paraît-il – les demoiselles tourangelles…
    Tout au long du voyage, à cheval sur sa blanche haquenée, il fit la navette

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