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Les guerriers fauves

Les guerriers fauves

Titel: Les guerriers fauves Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Viviane Moore
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arrive, méfiez-vous toujours de Bartolomeo, c’est un serpent. Il en a le charme et le venin. Un jour, il vous baise la main, le suivant, il vous la tranche !

27
    À peine à bord, la jeune fille avait été abordée par le chevalier qui se présenta en s’inclinant très bas devant elle.
    — Bartolomeo d’Avellino, damoiselle. Puis-je vous parler ?
    Eleonor se dit qu’elle allait enfin en savoir plus sur ce singulier personnage. Il semblait si différent des autres qu’elle avait pris tout son temps pour l’examiner la veille au soir aux Ecrehou. Il ne buvait pas, mangeait frugalement et se tenait à l’écart, ne parlant à personne. Mince et brun, il portait sous son ample cape une cotte de mailles ainsi qu’une épée et un long poignard. Les traits creusés par la fatigue, les yeux noirs enfoncés dans leurs orbites, il semblait en proie à quelque tourment que rien ne pouvait apaiser. Un homme à mi-chemin entre le guerrier et le moine, s’était-elle dit alors.
    — Pardonnez-moi, damoiselle, ajouta-t-il avant qu’elle ne puisse lui répondre. Je voulais réparer une injure que je vous ai faite.
    — Une injure ! Le mot est fort. Que voulez-vous dire ? fit-elle en caressant l’encolure du grand chien qui, après sa fugue à Saint-Hélier, semblait si heureux de la retrouver qu’il manifestait son contentement en se frottant contre elle.
    — L’autre jour, alors que nous quittions Barfleur, maître Giovanni m’a présenté à la cantonade. Je venais d’arriver à bord et j’avoue que je n’avais guère envie de saluer qui que ce soit.
    — Oh, ce n’est que cela !
    — Non, c’est davantage. Je suis, damoiselle, bien plus coupable que vous ne le pensez.
    L’homme se tut. Le pèlerin rôdait autour d’eux, la regardant à la dérobée, et son manège énerva Eleonor qui proposa au chevalier de la suivre sur le château avant. Ils se retrouvèrent bientôt debout près de la vigie qui suivait les mouvements de l’esnèque et guidait la marche du navire vers la haute mer.
    La jeune fille se tourna vers le chevalier.
    — Je vous écoute, fit-elle.
    — Cet homme vous importune ? fit-il en désignant le pèlerin qui avait regagné le dortoir.
    — Oh, pas vraiment ! Il a de singulières manières, voilà tout, et sa compagnie, je l’avoue, me déplaît.
    — Je vois que vous avez un solide gardien, mais n’hésitez pas, damoiselle, à avoir recours à mon bras.
    — Merci, chevalier.
    — Giovanni m’a appris qui vous étiez.
    — Oui, je n’en ai pas fait mystère. Vous êtes beaucoup plus secret que moi.
    — C’est vrai. Le reproche est mérité. Laissez-moi me présenter et vous comprendrez mieux pourquoi je me suis permis de vous aborder.
    — Allez-y, répondit Eleonor que le personnage intriguait de plus en plus.
    — Mon nom est Bartolomeo d’Avellino. Je suis né dans l’ancienne principauté du Bénévent. Je vis en Sicile après avoir longtemps été le confident d’un ermite, Guillaume de Verceil.
    — Je crois que j’ai entendu parler de lui : il a fondé plusieurs monastères, n’est-ce pas ?
    — Oui. Il préférait vivre en ermite, mais son succès le rattrapait toujours. Un homme partagé entre l’ascétisme et la guerre. Il ne se séparait jamais de son casque ni de sa cuirasse.
    — Comme vous, messire d’Avellino.
    — C’est vrai, damoiselle. En dehors de l’amour, bien sûr, la religion et la guerre sont les deux seules choses qui valent la peine d’être vécues.
    — Mais vous disiez que maintenant vous habitiez la Sicile.
    — Oui, damoiselle, j’ai le grand privilège d’être un proche de Guillaume I er et aussi d’être depuis de nombreuses années l’ami de Sylvestre de Marsico.
    — Oh ! Mon Dieu ! s’exclama Eleonor que cette révélation troubla plus qu’elle ne s’y attendait. Vous connaissez mon promis, messire ?
    — Oui, damoiselle. C’est pour cela que j’ai beaucoup à me faire pardonner. Quand j’ai appris que vous étiez la future dame de Marsico...
    — Ce n’est pas grave, fit-elle avec un grand sourire.
    Eleonor sentit le poids qui pesait sur sa poitrine s’envoler. Enfin quelqu’un allait lui parler de son futur mari. Elle saurait s’il était jeune ou vieux, vaillant ou lâche, beau ou laid... Toutes ces questions qu’elle se posait sans y trouver réponse. Et puis, peut-être oserait-elle lui demander quelle était la couleur de ses yeux et celle de ses cheveux... Non, elle

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