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Les héritiers

Les héritiers

Titel: Les héritiers Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Charland
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lourdement. . sur l’épaule de Françoise.
    — Fausse balle, cria quelqu’un.
    — Aïe, répondit la jeune femme.
    Devant le joueur accouru pour récupérer le projectile, le député Dubuc protesta d’une voix outrée :
    — En plus de ne pas savoir jouer, vous estropiez les gens.
    — . . C’est un accident.
    — J’espère bien que c’est un accident. Autrement, ce serait une agression armée, un crime valant dix ans de prison.
    Le pauvre travailleur n’en revenait pas de sa malchance.
    Une fausse balle devenait un délit criminel, aux yeux de ce petit notable. Thalie fit preuve à la fois de plus de mesure et d’un meilleur {-propos :
    — As-tu mal ? demanda-t-elle à son amie.
    — Un peu. J’ai surtout été surprise.
    — Si nous sommes soumises à un bombardement, conclut Marie, autant boire une limonade près du kiosque.
    Qui vient avec moi ?
    Françoise fit tout de suite mine de la suivre, de même que l’étudiante.
    — Je vais regarder la prochaine course, indiqua Mathieu, et je vous retrouve tout de suite après. Vous aurez à peine le temps d’être servis, avec cette affluence, alors commandez pour moi.
    — Amélie, accompagne ta sœur et Marie, ordonna le politicien. Je vais aller dire un mot à ces idiots armés de balles, puis je vais vous rejoindre.
    La jeune fille en rupture de couvent voulut protester.
    Mathieu évita une scène en disant :
    — Monsieur Dubuc, pourriez-vous revenir ici d’abord ?
    J’aimerais vous dire un mot seul { seul. Cela ne prendra qu’une minute.
    L’adolescente prit cela comme un congédiement et emboîta le pas à son hôtesse.

    *****
Mathieu allait ouvrir la bouche quand les spectateurs de la course s’agitèrent encore. Une balle venait de nouveau d’atterrir au milieu de la foule.
    — Ce sont vraiment des imbéciles heureux, commenta le politicien. Je reviens tout de suite.
    Paul s’éloigna d’un pas rapide, marcha jusqu’{ l’arbitre et s’agita un moment devant lui. Mathieu s’amusa de la pantomime. À la fin, le joueur debout au sommet du losange jeta son bâton sur le sol, le receveur enleva son masque. Il fallut une minute aux joueurs de champ avant de comprendre la situation. Les journaux commenteraient abondamment la partie interrompue
    afin
    de
    protéger
    les
    badauds.
    Heureusement, personne ne donnerait le nom du député courroucé. Cela aurait pu réduire les appuis au Parti libéral, de la part des milieux sportifs.
    Quand Dubuc retrouva Mathieu, les notables de la ville de Québec lançaient une autre fois leurs chevaux nerveux sur le grand ovale en terre battue.

    — Depuis deux semaines, commença le jeune homme, j’essaie en vain de trouver un emploi dans une étude légale, sans aucun succès. Pourtant, je suis prêt à me passer de salaire.
    — Tu n’as fait qu’une année de droit, il y a deux ans déj{.
    Surtout, l’été tout le système judiciaire tourne au ralenti.
    — Cinq avocats m’ont expliqué cela, dans les mêmes mots.
    Le jeune homme marqua une pause, puis il conclut :
    — Dois-je renoncer à ce projet?
    — Peut-être. Mais je serai heureux de passer une douzaine d’appels téléphoniques, demain matin. Je ne peux rien promettre, cependant.
    — Je le comprends bien. Je vous remercie.
    Pendant un moment, les deux hommes regardèrent la demi-douzaine de chevaux passer devant eux. Puis Paul constata :
    — Tu n’as pas l’intention de continuer { travailler dans le commerce de ta mère.
    — Non. Je ne suis pas du tout disposé à vendre encore des chiffons. Puis ma face lugubre fait une bien mauvaise réclame.
    Il marqua une pause avant de continuer :
    —Je m’inquiète un peu de la reprise des cours, en septembre. Il me semble avoir oublié tout ce que j’ai appris en 1916-1917. Mais ce n’est pas seulement ça. Je ne me sens plus la force de sourire à toutes ces dames, de les entendre me demander de parler de la guerre. Elles sont bien gentilles, remplies de bonnes intentions, mais je veux oublier ces mois d’horreur, pas m’y replonger pour leur procurer quelques sensations fortes.
    Il interrompit la confidence, puis précisa :
    — Je désire aussi quitter la maison, afin de vivre seul.

    — Oh ! Cela fera des vagues.
    Le politicien lui adressa un sourire. Marie résisterait à l’idée de laisser son aîné quitter de nouveau le nid familial.
    Elle se réjouissait tant de l’avoir retrouvé { peu près indemne.
    — Je ne repars pas à la guerre. Je vivrai sans doute à moins

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