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Les héritiers

Les héritiers

Titel: Les héritiers Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Charland
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Cela me paraît pourtant simple. Le candidat voudra savoir à quel chef il devra porter allégeance. De son côté, le chef doit accepter ou non le candidat.
    — Le choix revient aux membres du parti dans le comté concerné. N’est-ce pas la règle en démocratie ?
    La question ne méritait pas de réponse. Wilfrid Laurier lui-même avait chassé Lavergne des rangs de son organisation politique.
    — Pourquoi le sujet de l’élection complémentaire te préoccupe-t-il ? demanda Edouard. Cherches-tu à connaître le nom de la personne à qui tu crieras des invectives ?
    Le visiteur se troubla un moment, une réaction bien rare de sa part, puis il murmura :
    — J’aimerais me porter candidat.
    — . . Tu perdrais ton temps et tes dollars. Le Parti libéral l’emportera nécessairement dans ce comté. Les gens idolâtraient la «langue d’argent».
    L’ancien premier ministre avait mérité ce surnom assez tôt dans sa carrière. Ses talents d’orateur faisaient toujours l’unanimité { la fin de sa vie.
    — Ils voteront pour l’un de ses fidèles, conclut Edouard.
    — Tu ne comprends pas. Je veux me porter candidat pour le Parti libéral.
    Le marchand demeura un moment interdit, tellement la proposition lui semblait audacieuse.

    — Tu me fais marcher, sûrement. Lors de l’élection de 1917, Laurier lui-même a suscité une candidature contre toi dans Montmagny, tellement il souhaitait te tenir loin des banquettes du Parlement d’Ottawa.
    — Mais sir Wilfrid est mort, et la question de la conscription est oubliée. Je veux reprendre ma place dans le grand parti.
    — Tu es connu dans Montmagny. .
    L’homme secoua la tête, puis il interrompit son hôte :
    — Je suis connu dans toute la province. J’ai droit { son siège. C’est mon héritage.
    Un long moment, Edouard ne sut quoi répondre. Une vague ressemblance entre Lavergne et Laurier, combinée à la longue et très tendre amitié entre le grand homme et la femme de son partenaire dans son cabinet d’avocat, alimentaient la rumeur d’une naissance adultère. Plutôt que de nier, le principal intéressé s’en amusait.
    — Tu ne comptes tout de même pas te réclamer de cette supposée paternité dans les débats contradictoires.
    — Je n’aurais pas { me sentir honteux d’une pareille origine.
    Sans doute pas, mais une allusion de ce genre ferait scandale. Dans la très catholique province de Québec, cela déclencherait une croisade de tous les prêtres et des grenouilles de bénitier toujours prêtes à combattre pour eux.
    — Pourquoi me dis-tu cela ? Tu devrais faire part de tes ambitions à Daniel Mackenzie, le chef par intérim du parti.
    — Je te le répète, le choix du candidat sera effectué par les membres influents dans le comté de Québec-Est, avec la participation des députés libéraux de la région.
    Tu fais partie de ces membres importants. Ton père a été le principal organisateur du parti dans la Basse-Ville, et tu parais déterminé à prendre sa relève dans tous les domaines.
    La remarque réjouit le jeune homme. Cela signifiait que même cet énerguinène reconnaissait son nouveau rôle dans le parti.
    — Ne crois-tu pas avoir suffisamment semé la tempête depuis le début du siècle pour susciter une méfiance solide de tous les militants libéraux? Du haut de toutes les estrades, tu as sans cesse nargué ces gens. Il y a des insultes qui ne s’oublient pas.
    — Les insultes, ils me les ont rendues au centuple.
    L’agitateur montrait un tel talent dans ce domaine, il avait semé plus de venin que tous ses adversaires réunis.
    — Ton opposition { l’enrôlement obligatoire. . rétorqua Edouard. Tu les as défiés plusieurs fois de te poursuivre pour haute trahison.
    — Mais tous nos compagnons reviennent dans les grâces du Parti libéral. Wilfrid Lacroix et Oscar Drouin, placés à la tête de la Ligue anticonscriptionniste, vont se présenter à la prochaine élection. Drouin m’a même confessé lorgner Québec-Est !
    Son hôte enregistra l’information. Ernest Lapointe serait content de l’apprendre.
    — Que veux-tu de moi, exactement ?
    — Ce sont tes amis. Je veux dire, tu connais tous les notables de la Basse-Ville qui indiqueront à leurs employés pour qui voter. Dis-leur que j’aimerais représenter le comté de mon. . du grand homme et revenir au sein du Parti libéral.
    — Je crois que ce sera inutile, mais je le ferai.
    — Tu peux même leur préciser que je me présenterai de

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