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Les héritiers

Les héritiers

Titel: Les héritiers Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Charland
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gants, cela ne dérange personne.
    Mathieu offrit son bras à sa compagne en ajoutant, un sourire sur les lèvres, comme amusé par l’image dans son esprit :
    — Bien sûr, si elle avait crié « Kill ail the papists» au moment de l’élévation, cela aurait troublé la jolie cérémonie.
    A cette époque, des vétérans du Royaume-Uni réprimaient le mouvement nationaliste irlandais avec une extrême violence.
    Tous les jours, les journaux évoquaient un nouvel outrage. Des cris de ce genre devaient résonner dans bien des campagnes du petit pays.
    Au moment de s’engager sur le trottoir, la jeune fille murmura :

    — Je suis si mal { l’aise de te voir quitter la maison. .
    — Je t’en prie, ne répète plus cela. Ta présence ne joue aucun rôle dans ma décision. Je ne suis plus en âge de vivre sous la tutelle de ma maman.
    Elle voulait bien le croire, tellement sa propre vie depuis presque deux ans se révélait agréable, loin de son père. Son seul autre choix aurait été de regagner Rivière-du-Loup et d’y passer des hivers interminables.
    — Si Gertrude se montrait juste un peu moins rébarbative !
    L’hostilité muette de la domestique lui pesait beaucoup.
    La dernière incursion de Gérard au magasin, innocemment évoquée à table par Thalie, lui avait valu des regards furibonds pendant des jours.
    — Je lui ai parlé ce matin. Je recommencerai si nécessaire, mais les choses devraient s’améliorer un peu.
    — ... Oh ! C’est donc cela. Elle m’a presque souri tout { l’heure.
    Mathieu déverrouilla la porte du commerce, laissa passer sa compagne devant lui. Ce petit changement de climat dans le domicile familial lui permettrait de partir le cœur un peu plus léger.

    *****
A des dizaines de milles de l{, Marie revenait de l’église dans une voiture tirée par un beau cheval noir. Son amant évoquait parfois l’achat d’une automobile, mais le coût le rebutait encore. En attendant, un neveu le conduisait à la messe tous les dimanches de l’été.
    Devant la grande maison blanche de la rue de l’Hôtel-de-Ville, l’homme tendit la main { Amélie afin de l’aider {
    descendre du véhicule. Son visage buté témoignait d’une humeur maussade. Il y alla de la même attention pour son amante.

    — Merci, murmura-t-elle en touchant le sol. Tu es gentil.
    La tante Louise avait préparé un repas léger. Comme à son habitude, elle prit place à table avec la famille. Au second service, Marie se leva en disant :
    — Laissez, je vais m’en occuper.
    L’initiative venait de son désir de se rendre utile. La parente trouva l’intruse bien audacieuse de se comporter comme la maîtresse de maison.
    — Cet après-midi, précisa Paul, je devrai m’absenter une petite heure. L’un de mes électeurs fête ses quatre-vingt-dix ans. Comme cinquante autres électeurs comptent parmi sa descendance et les parents de ses enfants, je ne peux pas lui faire faux bond.
    — Si nous avions le droit de vote, tu pourrais séduire aussi cinquante électrices.
    Après avoir enregistré son premier suffrage lors du scrutin fédéral de 1917, la marchande demeurait frustrée d’être restée chez elle le 23 juin précédent. La province ne semblait guère disposée { suivre l’exemple du gouvernement central.
    — Si cela dépendait de moi. . commença le politicien.
    — Mais tu peux toujours déposer un projet de loi privé.
    — Et indisposer ainsi les trois quarts de mes collègues !
    Ce sujet demeurait bien le seul sur lequel ils divergeaient totalement d’opinion. L’homme évoqua un moment le beau temps, puis il revint sur son absence prochaine.
    — Viens avec moi. Je me sens toujours un peu seul dans ce genre de réunion.
    — Déjà, ma présence dans cette maison sans chaperon fait certainement jaser. Comment me présenterais-tu à tes électeurs ?
    Ils devaient avoir eu cette conversation dix fois au moins.
    Paul lui servit la réponse usuelle :
    — Tu es la patronne de ma fille.

    — La belle affaire ! Le patron de l’usine de pâte { papier se rend-il à tous les anniversaires célébrés dans cette ville en compagnie du père de l’un de ses employés ?
    La dérobade ne satisfaisait pas totalement son compagnon.
    — Tu devrais amener Amélie avec toi, renchérit Marie.
    Parmi la parenté de ce patriarche, il doit bien y avoir une douzaine de jeunes gens.
    — Je ne peux pas, grommela la jeune fille. Il reste encore deux jours de ma sentence à purger.
    — . . S’il te

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