Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Les hommes perdus

Les hommes perdus

Titel: Les hommes perdus Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Margerit
Vom Netzwerk:
volaient. On entendit désigner Moïse Bayle, Fouché, Levasseur et jusqu’au dantoniste Thuriot. « Il faut que cette journée soit complète ! » exultait André Dumont, jouissant comme un chat-tigre.
    Thibaudeau, soutenu par les sages de la Plaine, mit fin à ce délire. Il fit passer au vote sur une liste établie par les secrétaires. À une forte majorité, fournie par la plupart des Soixante-Treize et des Vingt-Deux associés aux Thermidoriens, Billaud-Varenne, Collot d’Herbois, Barère, Vadier furent voués à la déportation en Guyane ; Choudieu, Chasles, Foussedoire, Huguet, Bourdon le Léopard, Ruamps, Duhem, Amar, à la détention. On décréta que, pour éloigner ces huit-là de Paris, ils seraient enfermés dans la forteresse de Ham.
    Claude alors se leva, descendit des degrés, son chapeau à la main. Se voyant suivi par Gay-Vernon, Bordas, Levasseur, Romme, Soubrany, Lindet, Ruhl, Duquesnoy et tous les Montagnards modérés, il s’arrêta devant l’estrade. « La majorité a décidé, dit-il calmement. Nous nous inclinons devant sa décision, mais nous n’y pouvons souscrire. Je te demande, président, la permission de nous retirer. »
    Thibaudeau inclina la tête. « Le procès-verbal prendra acte de cette protestation », déclara-t-il.

IV
    L’Assemblée poursuivit sa séance jusqu’à trois heures du matin. Pour réduire plus aisément le restant de rébellion, mais surtout pour grossir aux yeux des « honnêtes gens » le péril dont on les sauvait et s’autoriser ainsi à de plus complètes rigueurs, la majorité proclama l’état de siège. Le général Pichegru, « glorieux vainqueur de la coalition » en Hollande, qui se trouvait à Paris par un hasard singulier, fut nommé commandant de la force armée, avec le vainqueur de Thermidor : Barras, et Merlin-Mayence pour seconds.
    Dès l’aube, les représentants arrêtés furent enfermés dans des voitures. Pichegru eut la maladresse de les laisser envelopper par une foule qui paralysa l’escorte. Les patriotes tentèrent de libérer les députés, mais Barras intervint avec le bataillon de la Butte-des-Moulins suivi par quatre ou cinq cents jeunes gens à cadenettes et à matraques. Après une assez vive échauffourée où Raffet, le commandant de la garde nationale, fut légèrement blessé d’une balle au ventre, les voitures quittèrent Paris.
    Pichegru investit militairement Notre-Dame. Les insurgés des Quinze-Vingts réunis à ceux de la Cité avaient constitué là une assemblée permanente. Sommés de se séparer, menacés d’un assaut, ils évacuèrent l’église. Pendant deux jours, on tirailla encore, çà et là, tandis que les agents de la Sûreté générale mettaient la main sur tous les meneurs connus. Le 16 enfin, Pichegru se présentait, dans la redingote bleue qui lui servait d’uniforme, à la barre de la Convention. « Citoyens, annonça-t-il, vos décrets sont exécutés et la tranquillité publique rétablie. » Le président Thibaudeau le remercia, ajoutant avec candeur : « Le vainqueur des tyrans conjurés ne pouvait manquer d’anéantir les factieux. » Acclamé par les muscadins qui remplissaient les tribunes, le général fut admis aux honneurs de la séance. En ces trois journées, il venait de fixer sur lui tous les espoirs des royalistes.
    Victorieuse, la réaction n’était point assouvie. Tallien, montant à la tribune pour lire un rapport des deux Comités sur le complot montagnard, réclama l’arrestation de dix autres députés. En tête, Cambon. Cambon, le grand argentier de la Convention, qui maintenait à flot par miracle la trésorerie naufrageante, Cambon qui s’était porté garant, devant le Tribunal révolutionnaire, de l’innocence de Danton, mais auquel les anciens dantonistes Fréron, Tallien, Barras et autres enrichis, ne pardonnaient pas d’avoir dénoncé leurs concussions. Cambon, l’ennemi de Robespierre, condamné comme terroriste ! Son vrai crime, c’était de gêner trop d’avidités. Après lui, Thuriot, Thuriot de la Hozière, fervent et courageux ami de Danton, mais irréconciliable avec les Soixante-Treize qui trouvaient là l’occasion de s’en débarrasser, ainsi que de Lecointre et de Lesage-Sénault, pour la même raison. La Gironde proscrivait à son tour ses proscripteurs. Venaient ensuite l’honnête Levasseur, Moïse Bayle, victimes des rancunes dantonistes ; puis Crassous, Maignet, Granet, Hentz, coupables de s’être montrés

Weitere Kostenlose Bücher