Les huguenots - Cent ans de persécutions 1685-1789
la
viande les jours défendus. En 1723, un gentilhomme est dénoncé pour
avoir, dans une partie de campagne, contrevenu aux prescriptions de
l’Église sur le même point, et le secrétaire d’État, La Vrillière,
lui écrit, à propos de cette
grave
affaire :
« J’ai reçu, Monsieur, le mémoire qui contient vos raisons sur
des plaintes que l’on m’avait portées contre vous, vous ne pouvez
disconvenir qu’elles avaient quelque fondement, puisqu’il est
certain
que vous avez fait
,
un jour maigre
,
un repas en maigre et en gras publiquement dans un pré
, ce
qui a causé du scandale. Soyez donc plus circonspect à l’avenir,
sans quoi l’on ne pourrait s’empêcher de
sévir contre
vous
. »
Le 14 juillet 1785, le curé de Mézières en
Drouais dénonce encore un nouveau converti, lequel, dit-il, n’a
abjuré que pour se marier, et ne fait pas son devoir, ayant passé
vingt-quatre jours de dimanches et fêtes obligatoires sans assister
à la messe ni à aucun des offices de l’Église.
Pour ceux des nouveaux convertis auxquels on a
accordé une pension, ou que l’on a mis en possession des biens de
leurs parents, réfugiés à l’étranger, ils sont menacés, si eux et
les leurs ne font pas leur devoir, de se voir retirer ces pensions
et ces biens.
En 1699, Pontchartrain écrit qu’il a appris
que des officiers de marine, auxquels on a accordé des pensions en
considération de leur conversion, souffrent que leurs femmes et
leurs enfants ne fassent aucun exercice de la religion catholique,
et il ajoute : « Sa Majesté veut que ces officiers
envoient des certificats des intendants et des évêques des lieux où
leurs femmes et leurs enfants demeurent,
comme ils y vivent en
catholiques
, et elle ne fera expédier les ordonnances de leurs
pensions
que sur ces certificats
. »
De même ; une circulaire aux intendants
prescrit de surveiller la conduite de ceux qui ont été mis en
possession des biens de leurs parents fugitifs. « S’ils
trouvent, dit cette circulaire, que ceux qui jouissent de ces biens
ne s’acquittent pas des devoirs de la religion, après en avoir été
avertis, ils donneront les ordres, nécessaires
pour en faire
saisir et séquestrer les fruits
. »
Saint-Florentin donne même l’ordre aux
fermiers de la régie de saisir les biens des nouveaux convertis qui
se sont montrés
indignes
de la grâce que leur a faite le
roi, en discontinuant tout exercice de la religion catholique.
Quant aux évêques, les moyens
pratiques
qu’ils trouvent, d’obliger les nouveaux
convertis à pratiquer, c’est de leur imposer des épreuves de
catholicité, quand ils veulent se marier, et de leur faire enlever
leurs enfants s’ils ne pratiquent pas.
Dès 1692, l’évêque de Grenoble disait :
« les religionnaires sont dans un état pitoyable, puisqu’ils
sont presque sans religion ; ils ne tiennent à la nôtre que
par grimace
et ne tiennent plus à la leur que par cabale
et par hypocrisie. »
Et, quatre ans plus tard, constatant
« que les nouveaux convertis ne vont ni à la messe ni au
sermon, ne fréquentent point les sacrements, et,
à la
mort
, les refusent, disant qu’ils sont calvinistes » il
ordonne à ses curés de les regarder comme hérétiques et de ne leur
point administrer le sacrement du mariage
qui est le seul
endroit qui les oblige à revenir à l’Église
. »
En 1754, de Blossac écrit à
M. de Clervault, qui veut épouser une aussi mauvaise
convertie que lui : « Vous sentez qu’étant
suspects
l’un et l’autre, il ne faut que le rapport de
quelque malintentionné pour vous attirer de fâcheuses affaires, et
qu’ainsi vous devez être plus exacts, même qu’un ancien catholique,
soit à assister à l’église et aux instructions et à y envoyer vos
domestiques ; je ne vous donne ces avis que parce que la
moindre fausse démarche de votre part tirerait à
conséquence. »
Pour ce qui est des enfants, il ne suffisait
pas que les nouveaux convertis eussent fait baptiser leurs enfants
à l’église, on exerçait sur eux une surveillance jalouse et
incessante pour arriver à ce que ces enfants fussent élevés et
instruits dans la religion catholique.
Une circulaire aux intendants portait cette
disposition : « Les parents doivent envoyer leurs
enfants, savoir : les garçons chez les maîtres, les filles
chez les maîtresses d’école, aux heures réglées ; les tuteurs
doivent faire la même chose pour les enfants dont ils
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