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Les larmes du diable

Les larmes du diable

Titel: Les larmes du diable Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Christopher John Sansom
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sortes. Pourtant, je ne doutais pas un instant de la bonne foi de Barak. Ni Cromwell ni lui n’étaient hommes à se laisser abuser facilement. Chaque jour apparaissaient de nouvelles merveilles et de nouvelles terreurs dans ce monde qui, à en croireles prophètes, touchait à sa fin. Pourtant, j’avais peine à ajouter vraiment foi à des histoires aussi extravagantes.
    Et si elles étaient vraies malgré tout ? Les Byzantins avaient pu si bien garder le secret qu’ils avaient fini par le perdre, mais dans notre Europe d’espions et de querelles religieuses, l’Angleterre ne pouvait espérer le conserver longtemps. Il serait dérobé tôt ou tard. Avec quelles conséquences ? Les mers désertées par les navires, des flottes entières dévorées par le feu ? Je secouai la tête, perplexe et troublé. Songer à de pareils sujets tout en remontant la rue poussiéreuse et familière où j’habitais me paraissait incongru. Il me fallait bannir ces idées et me concentrer sur la tâche qui m’attendait. Sachant que j’avais été suivi la veille, je devais rester sur mes gardes. Je jetai un rapide coup d’œil, mais les seuls autres cavaliers dans la rue étaient des avocats en robe qui se hâtaient vers Lincoln’s Inn. Quand je franchis le porche, le garde me salua de sa guérite.
    Je me rendis d’abord à mon cabinet pour laisser un message à Godfrey. Contre toute attente, j’y trouvai Skelly en train de recopier un document, si penché sur sa plume que son nez touchait presque la feuille. Il leva les yeux vers moi.
    « Que faites-vous là un dimanche, John ? Vous ne devriez pas approcher la tête si près de votre feuille : les humeurs vont envahir votre cerveau.
    — Cela m’a pris si longtemps de réécrire l’acte de cession Beckman, monsieur, que j’ai du retard. Je suis revenu pour recopier l’accord d’arbitrage pour la guilde des sauniers.
    — Belle preuve d’application », dis-je en me penchant pour regarder. Je restai suffoqué : son encre avait été mal préparée, et les mots étaient tout pâles. « Peste ! » m’exclamai-je.
    Il leva vers moi le regard tremblant de ses yeux rougis. « Qu’est-ce que j’ai fait, monsieur ?
    — L’encre est trop diluée. » Son regard de chien battu m’irrita soudain. « Mais vous ne le voyez donc pas ? Dans un an, tout sera effacé. Un document légal ne vaut rien s’il n’est pas écrit à l’encre noire bien épaisse, d’une écriture lisible, de façon à se conserver.
    — Je vous demande pardon, monsieur. »
    Je ne pus contenir mon exaspération : « Tout est à recommencer. Vous m’avez encore une fois gâché du bon papier. J’en retiendrai le coût sur vos gages. » En voyant sa mine inquiète, je sourcillai. « Allez ! au travail. »
    Godfrey ouvrit la porte. « Que se passe-t-il ? J’ai entendu des éclats de voix.
    — John Skelly réussirait à mettre un ange en colère. Je ne pensais pas te trouver là, Godfrey. Tu ne vas pas au déjeuner en l’honneur de Norfolk, j’imagine ? »
    Il grogna : « Je me suis dit qu’il fallait que je voie de mes yeux à quoi ressemble ce coquin papiste.
    — Eh bien, puisque tu es là, puis-je te demander une faveur ? Viens dans mon cabinet. »
    Je refermai la porte sur Skelly et dis à mon ami de s’asseoir. « Godfrey, j’ai une… une nouvelle affaire. Très urgente. Entre le procès Wentworth et cela, je n’aurai guère de temps la semaine prochaine. Pourrais-tu assurer une partie de mon travail ? Bien entendu, je te reverserai les honoraires.
    — Volontiers. Y compris l’audience avec Bealknap ?
    — Non, cette affaire-là, mieux vaut que je la conserve. Mais si tu pouvais t’occuper de tout le reste, je t’en saurais gré. Tu me rendrais un fier service. »
    Il me regarda avec attention. « Tu as l’air soucieux, Matthew.
    — Je déteste perdre mon calme. Mais entre Skelly et cette nouvelle affaire…
    — Quelque chose d’intéressant ?
    — Je ne peux pas t’en parler. Et maintenant, dis-je en soulevant une pile de papiers de la table, je vais te montrer les procès en cours. » Pendant la demi-heure qui suivit, je passai mes affaires en revue avec lui, soulagé à l’idée qu’en dehors de l’audience avec Bealknap je n’aurais pas à me rendre au tribunal lors des quinze prochains jours.
    « Je suis ton obligé, une fois de plus, dis-je quand nous eûmes terminé. Tu as des nouvelles de ton ami Robert Barnes ? »
    Il poussa un profond soupir. « Il est toujours à

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