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Les Lavandières de Brocéliande

Les Lavandières de Brocéliande

Titel: Les Lavandières de Brocéliande Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Edouard Brasey
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père spirituel attitré, père Jean ? Ou, à défaut, l’évêque, justement…
    – C’est que… Il ne s’agit pas d’une confession comme les autres. Le fait même de confier certains secrets que je porte est, pour moi, un cas de conscience. Et je ne suis pas sûr que l’évêque comprenne ma démarche. C’est pourquoi…
    – … vous vous êtes dit que ce pauvre abbé Guilloux, qui ose enterrer les suicidés et faire entrer les chevaliers du Graal dans son église en ruine, serait sans doute plus compréhensif que les sommités canoniques ! Eh bien, je vous écoute, père Jean… Quels péchés si graves avez-vous à déposer aux pieds du Seigneur ?
    Le recteur de Tréhorenteuc jeta des regards alarmés autour de lui, à l’affût d’un confessionnal providentiel où il aurait pu trouver refuge. Mais l’église en était dépourvue. Il n’insista pas, se souvenant que lui-même avait écouté Annaïg dans la simplicité de sa sacristie.
    – En réalité, il ne s’agit pas de mes propres péchés, père Guilloux, sinon je ne serais pas venu vous déranger.
    – Vous souhaitez confesser les péchés d’un autre ? s’étonna le recteur de Tréhorenteuc. Il s’agit là en effet d’une démarche peu courante, et je conçois que notre évêque, sivous l’aviez sollicité, s’en fût alarmé… Mais pour quelle raison la personne concernée ne s’adresse-t-elle pas à vous ?
    – La confession a bien eu lieu, et j’en ai été le dépositaire. C’est justement la raison de ma visite, et du cas de conscience qui me hante.
    – Pourriez-vous vous expliquer plus clairement, père Jean ? Tenez, prenons place sur ce banc qui tient encore à peu près debout. Nous serons plus à l’aise pour démêler ces énigmes théologiques.
    – Je vous remercie, murmura le recteur tout en s’asseyant sur la planche de bois montée sur pieds que Guilloux avait un peu rapidement qualifiée de « banc ». Le plus simple est sans doute que je reprenne les choses par le commencement. C’est au sujet de la mort de la jeune Annaïg Le Borgne.
    L’abbé Guilloux prit instantanément un air grave.
    – Un drame épouvantable. Un meurtre, m’a-t-on dit, dont le criminel n’a pas encore été découvert.
    – En effet, reprit le recteur de Concoret avec un regain d’assurance. Le crime a eu lieu voici plus d’un mois et l’assassin d’Annaïg n’a pas été arrêté. Il ne s’est pas dénoncé non plus, malgré mon incitation publique à le faire. Or, j’ai quelques soupçons au sujet de son identité, mais je ne peux les confier à personne, pas même aux gendarmes chargés de l’enquête… C’est cela qui me hante.
    – Mais pour quelle raison ? s’étonna encore l’abbé Guilloux. Je suppose que si vous détenez des éléments susceptibles d’aider les forces de l’ordre dans leur travail, vous ne pouvez vous taire…
    – Si, je le dois, justement ! s’emporta le père Jean. Car ces éléments, je les tiens de la victime elle-même, qui s’est confiée à moi juste avant le drame. Je suis tenu au secretde la confession… Une autre personne digne de foi est venue ce matin même me révéler d’autres détails venant accréditer ma thèse, mais toujours sous le sceau de la confession.
    L’abbé Guilloux se massa le front, absorbé par une intense réflexion.
    – Je comprends mieux votre dilemme, observa-t-il enfin. Si vous respectez le secret de la confession, vous vous faites indirectement le complice du meurtrier présumé. Mais si vous le rompez, afin que justice soit faite, vous parjurez votre serment de prêtre et risquez l’excommunication… Il s’agit d’un fameux cas de conscience, vous avez raison. Mais encore une fois, en quoi puis-je vous aider ?
    – En écoutant en confession ce que m’ont dit Annaïg et cette autre personne. De cette façon, je ne me parjure pas, tout en cessant de dissimuler la vérité.
    L’abbé Guilloux demeurait songeur.
    – En vous confiant à moi, vous vous défaites d’un fardeau qui vous empoisonne l’âme et le cœur sans trahir votre serment. Mais je ne pourrai pour autant en révéler le contenu à autrui, puisque je serai à mon tour tenu au secret de la confession que vous m’aurez faite…
    – C’est exact. Mais au moins je ne serai plus le seul à porter ce que vous avez fort justement qualifié de « fardeau »… Ce serait pour moi un énorme soulagement. Et puis, qui sait ? vous aurez peut-être une idée

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