Les Mystères de Jérusalem
anciens disposés sur la table entre nous. je les devais moins, me semblait-il, à Rab HaÔm qu'à la soudaine bonté de Doron. Alors qu'il achevait, autour d'une carte d'état-major, de mettre au point son " petit stratagème
" avec Calimani, j'avais décidé de partir. N'ayant pour ma part aucune vocation à jouer les " chèvres ", je considérais que j'en avais déjà bien assez entendu pour la matinée.
¿ dire vr4 trop de pensées contradictoires me passaient par la tête.
J'avais besoin de prendre l'air, de retrouver mon calme... Doron, très enjoué depuis l'appel de Tom, m'avait retenu : " Attendez, Marek! J'ai une surprise pour vous!... " Une minute plus tard, Yossi-Staline entrait dans le bureau, portant une mallette d'un cuir rouge criard qu'il me remit. J'y trouvai livres et manuscrits.
" C'est pour vous, m'avait dit Doron. Hopkins réclame son lingot, vous, vous méritez au moins ça. je suis certain que Rab HaÔm l'aurait voulu.
D'ailleurs, tout ce qui est dans cette valise était réuni par une grosse ficelle marquée à votre nom. "
Le geste m'avait ému, autant de la part de Rab HaÔm que de Doron. Sur une impulsion, j'avais eu le désir de partager ce présent posthume avec la personne la plus sage et la plus susceptible d'en apprécier la valeur. je m'étais précipité chez le rabbin
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Steinsaltz, surpris par ma visite, mais toujours accueillant. Nous avions fait l'inventaire de ce don inattendu.
L'un des in-folio contenait des récits de voyageurs arabes, dont un, particulièrement détaillé et daté de l'an 1287, signé Bourha ad-Din ibn ai-Fikah ai-Farazi, et écrit à Damas. Il commençait par : Il est dit au nom dAbou Oumama : Penvoyé d'Allah dit : le Coran m'a éa remis en trois lieux : à La Mecque, à Médine et en Syri*, c'est-à-dire à Yérusaieln... Encore un signe de Rab HaÔm; aurait-il lui aussi songé à l'…crit de Damas?
C'était un peu excessif de voir, à la manière de Cahmani, les hasards se muer en une constante providence. quoi qu'il en soit, je préférai ne pas m'aventurer sur le terrain de nos " hypothèses " avec le rabbin Steinsaltz.
quand je levai les yeux vers lui, il continuait de se passer les doigts dans la barbe. je me rendis compte que j'en faisais autant.
- Vous me paraissez bien songeur, aujourd'hui, dit-il avec un petit hochement de tête amical. je dirais même soucieux... Ces livres sont-ils toute la raison de votre visite ou y aurait-il autre chose ?
J'esquissai un geste d'excuse.
- Pardonnez-moi! C'est vrai, mes journées sont assez... inattendues.
L'impression me vient parfois de voguer sur un fleuve des plus incertains à
bord d'une trop frêle pirogue. Et, vous le savez, l'intensité des heures saoule mieux que le vin! Mais, non, je ne veux pas vous ennuyer avec cela.
Ou peut-être n'ai-je pas le courage d'affronter sous votre regard les contradictions qui m'occupent en ce moment.
je ris pour me détendre et ajoutai
- Il est un précepte que j'aime beaucoup, je l'ai souvent en tête ces temps-ci sans parvenir à en retrouver l'origine : " Ne demande jamais ton chemin à quelqu'un qui le connaît car tu ne pourra.s plus t'égarer! "
Le rabbin rit à son tour, se grattant la tête sous la kippa.
- Cette excellente sentence est du rabbin Nahman de Bratslav.
- En fait, repris-je après un instant, je suis un peu tourmenté par la question du rêve. Ce que l'on fait de ses rêves, leur influence sur nous, ou plus largement encore... D'ailleurs, à la fin 327
de la nuit dernière, il m'est venu un rêve dont je ne suis pas encore parvenu à effacer les images.
Racontez-moi.
je marchais le long d'un tunnel au fond duquel des faisceaux lumineux balayaient les contours nocturnes des coupoles et de la muraille de Jérusalem. Derrière moi, des pas se rapprochaient. La ville ployait peu à
peu sous la lumière montante et, je le sentais, la volonté des hommes ainsi que la vallée de la Géhenne, que je pouvais deviner au pied des remparts, reprenaient leur place au service de la mort. Devant cette vision de déchéance, je me sentais furieusement vivant. Mais, derrière moi, les pas se rapprochaient, indifférents à la clarté qui envahissait peu à peu le couloir. " Il y a quelqu'un, il y a quelqu'un! " me suis-je mis à hurler en direction de cette lumière qui s'intensifiait sans cesse. " Il y a quelqu'un! " Mes propres cris m'ont réveillé.
- Mmm, grommela le rabbin, fourrageant à nouveau dans sa barbe et par
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