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Les noces de fer

Les noces de fer

Titel: Les noces de fer Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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était !
    « Cet inique procès m’empêche de dormir… Je lui demanderai de cesser ses agaçins si elle tient à ne pas aloer [170] notre entente ! »
    Il lui en voulait d’avoir précipité dans son crâne, avec un mal dont il se fût passé, un trouble sentiment de culpabilité contre lequel il devait se défendre. Tout ce qui avait eu lieu avant leur rencontre ne la concernait pas. Elle pouvait s’interroger comme il s’était interrogé, lui, sur l’affection que lui portait Rochechouart ; mais dès lors qu’ils avaient certifié leur amour devant Dieu, la quiétude devait régner dans leur esprit. Ah ! certes, il n’avait jamais bien compris les femmes : leurs élans, leurs reculs, leurs impudeurs et leur pudicité, leurs humeurs et leurs courroux injustes autant qu’inattendus. Il s’était fait une haute opinion de Blandine ; il fallait qu’elle ressemblât à l’épouse idéale ; elle n’aurait nul grand effort à accomplir en ce sens !
    Soudain, avec une promptitude ennuyeuse, il craignit avec plus d’acuité sinon d’angoisse qu’auparavant, que Tancrède et son épouse fussent mises un jour en présence, à Gratot ou ailleurs. Il se rassura en se disant qu’à vivre parmi les hommes-loups, sales d’esprit et de corps, inquiétants, maussades, et sur lesquels elle régnait peut-être, sa soi-disant cousine avait dû devenir différente de ce qu’elle était dans l’enceinte de Rechignac. On ne choit pas sans dommage dans la fange. Quelque inflexible qu’elle se crût, elle n’avait dû pouvoir se garantir de l’influence néfaste de ces malandrins : on ne subit pas sans détriment, pendant un an et même plus, la contagion de la malfaisance… Tant de mois à respirer la mauvaiseté de routiers alliés aux Goddons, à ouïr leurs parlures, à subir leurs hommages aussi gras que l’axonge, ne pouvaient qu’avilir un être bien né, quel que fut son sexe. Tancrède devait avoir pris des façons de rustique. De ribaude, même. Sa chair plus que son esprit devait révéler sa déchéance.
    « Allons, bon !… Il y a peu, tu pensais le contraire. »
    Et si, lors de cet improbable affrontement et contre cette espérance-là, Tancrède paraissait inchangée ? Si elle était comme naguère ? Plus délicieuse encore ? N’existait-il pas des fruitiers sauvages plus beaux que ceux auxquels on fournissait des soins, et dont les fruits se révélaient d’une succulence rare ?… Blandine serait alors humiliée. Comment soulagerait-elle son dépit dès le départ de Tancrède ? Quelle revanche prendrait-elle sur… lui  ? À moins que sa beauté ne subjuguât Tancrède et qu’elle tentât – malgré lui, infortuné mari – d’exercer sur sa « cousine » son pernicieux pouvoir de séduction !
    « Qu’est-ce qui me prend ? N’ai-je rien d’autre à penser ? »
    Il avait laissé galoper, cette nuit, une imagination aussi féconde que celle de son épouse ! Il en avait assez. Blandine, Tancrède, Anne, Adelis et les autres… À peu de choses près, le résultat de ces étreintes était le même : quelques soupirs, le corps qui se vide, s’allège en frissonnant d’une espèce de joie flamboyante où les viscères s’épanouissent toujours pareillement sans, parfois, convier le cœur et l’âme à leur liesse.
    « Tiens, si Anne avait eu de l’estoc [171] … »
    Il eût été fier qu’elle devînt sa femme.
    C’était la première fois qu’il y pensait ainsi. Il pouvait ajouter que cet estoc, elle en eût été investie en devenant son épouse. D’ailleurs, à dire vrai, sa nature était noble, généreuse, avenante et, surtout, sans une once de jalousie !… Elle se moquait secrètement de Tancrède qu’elle côtoyait chaque jour…
    Il était bien temps qu’il éprouvât ce remords ! Mais après tout, qu’avait-il à se tourmenter ? C’était elle qui l’avait quitté. Par fierté, pour échapper, certes, aux routiers de Robert Knolles, mais aussi pour mettre au monde, loin de lui, leur enfant…
    Le sommeil l’envahit sur cette pensée triste.
     
    *
     
    Un clapotement l’éveilla. « Il pleut », se dit-il les paupières closes, fuyant ce jour dont il espérait beaucoup.
    Ouvrant les yeux, il fut à peine surpris : dans la pénombre où l’aube ensoleillée délayait ses poudres de cinabre, Blandine, nue, procédait à ses ablutions et pour le moment se lavait la poitrine.
    Elle allait lentement, presque amoureusement, et ce

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