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Les Nus et les Morts

Titel: Les Nus et les Morts Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Norman Mailer
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mentionné. C’était, au surplus, une petite section, qu’il pouvait faire partir en bloc. S’il devait couper en deux une section plus nombreuse, les hommes en partance râleraient contre leur malchance.
    Il ressentit une petite secousse en se rendant compte que Hearn allait être affecté à Reconnaissance dès le lendemain matin. L’idée de confier la mission à un officier nullement familiarisé avec sa section n’était pas particulièrement heureuse, mais l’on ne pouvait pas abandonner le destin d’une telle patrouille entre les mains d’un sergent. Et Hearn était intelligent, il était dans une condition physique requise pour une expédition de cette envergure. Dans ce moment Cummings considérait Hearn froidement, comme s’il faisait le bilan des qualités et des défauts d’un cheval. Hearn était homme à mener l’affaire ; il avait probablement la veine d’un chef.
    Un doute l’assaillit. Ce nouveau plan comportait un grand nombre de risques, presque un trop grand nombre pour s’y abandonner. Pendant quelques instants il considéra la possibilité d’y renoncer. Mais l’investissement initial était assez insignifiant. Une douzaine ou une quinzaine d’hommes. Hien n’était perdu si, pour eux, les choses tournaient mal. D’ailleurs, la question du support naval n’était pas irrémédiablement compromise. Peut-être pourrait-il faire un saut au G. Q. G. une fois l’attaque déclenchée, et voir s’il ne réussirait tout de même pas à décrocher ces destroyers.
    Il revint à son lit et se coucha. Allongé dans son pyjama, la tente lui parut soudain froide et il frissonna, en proie à une sourde exaltation. Il pourrait aussi bien tenter l’affaire. Avec Hearn.
    Si jamais ça réussissait. Pendant un instant il se laissa aller à rêvasser aux glorioles qu’une telle victoire lui vaudrait. Il éteignit, reposant immobile sur sa couche, les yeux ouverts sur l’obscurité. Quelque part l’artillerie tirait au loin.
    Il savait qu’il ne s’endormirait pas avant le matin. A un moment son tibia eut une pulsation, et il éclata de rire, sursautant presque au bruit de sa propre voix sous le vide noir de la tente. Rien n’était fortuit dans tout ceci. Ceci était un processus qui avait mûri en suivant les routes souterraines de son esprit, pour fructifier au moment nécessaire. Certaines de ses attitudes à l’égard d’Hearn prenaient maintenant tout leur sens. « On peut, trouver un sens à tout, il suffit de chercher, pensa-t-il. Et, pourtant, je suis sérieux quant à cette patrouille. »
    L’était-il vraiment ? Tout semblait, dans un même instant, à la fois brillant et impraticable, et la confusion, la complexité de sa propre attitude l’excitaient et le troublaient, le mettant de nouveau à la limite d’un accès de rire.
    Mais, au lieu de rire, il bâilla. Cette patrouille était de bon augure. Il était resté trop longtemps à court d’idées, et il avait présentement la certitude que bien d’autres idées suivraient dans la semaine à venir. Il se dépouillerait de la camisole de force qui avait gêné ses mouvements… tout comme il s’était débarrassé d’Hearn. En dernière analyse il n’y avait que la nécessité, et vos propres réactions pour y faire face.
     
    LA MACHINE A FAIRE LE TEMPS

GÉNÉRAL CUMMINGS, UN ÉNONCÉ SPÉCIFIQUEMENT AMÉRICAIN
    A première vue son aspect n’était guère différent de celui des autres officiers généraux. D’une taille légèrement au-dessus de la moyenne, bien en chair, le visage plutôt beau, la peau hâlée, les cheveux grisonnants ; mais il y avait des différences. Quand il souriait, il ressemblait beaucoup à nombre de sénateurs et d’hommes d’affaires américains, avec leur apparence dure, rougeaude, satisfaite d’elle-même. Mais, lui, il ne gardait pas toujours leur halo de braves types un peu costauds. Il y avait une certaine vacuité dans son visage… une apparence de vacuité peut-être. Hearn avait toujours le sentiment que son visage souriant était figé.
    Il  y a longtemps que la ville existe dans cette partie du Middlewest, plus de soixante-dix ans aux environs de 1910, mais elle n’est devenue une vraie cité que depuis peu. « Oui, il n’y a pas si longtemps, disent les gens. Je me rappelle quand y avait tout juste le bureau de poste dans cette ville et le bâtiment de l’école, la vieille église presbytérienne et le Main Hôtel. Vieux Ike Cummings tenait alors sa

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