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Les Nus et les Morts

Titel: Les Nus et les Morts Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Norman Mailer
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deux.
    Red . – Là, un homme par compagnie. Y a au moins cent gars chez nous qu’on leurs dix-huit mois de campagne. Ecoute Brown, calme-toi, tout ce qu’il te faut c’est attendre une centaine de mois.
    Minetta . -– Aaah ! tu parles d’une poisse.
    Brown . – < Qu’est-ce que ça peut te foutre, Minetta ?
    T’as même pas assez de présence au corps pour avoir attrapé un coup de soleil.
    Minetta . – Si vous les vieux vous bougez pas d’ici, je serai fait comme un rat quand mes dix-huit mois arrivent. C’est tout pareil qu’une prison, Jésus.
    Brown (pensivement). – Vous savez, c’est toujours quand c’est ton tour de perme que tu prends la buche. Vous vous rappelez Shaughnessy, des Pionniers ? C’était son tour, il avait sa feuille de route et tout, puis ils l’ont envoyé dans une patrouille tout ce qu’il y a de pépère et il s’est fait bousiller.
    Red .  – Sûr, c’est pour ça qu’ils l’ont envoyé en patrouille. Ecoute mon vieux, y pense plus, te sortiras pas de l’armée, toi ni aucun de nous.
    Polack . – -Vous voulez savoir quelque chose ? Si j’avais mes dix-huit mois j’aurais pu me débrouiller pour décrocher ma perme. Y a qu’à faire la lèche à Mantelli ou à un gros enculé de sergent là-bas, puis quand tu gagnes un peu de pognon au poker tu leur refiles vingt-trente livres, l’air de dire « voilà pour un cigare, un cigare de perme, compris ? » Y a toujours moyen de moyenner.
    Brown . – Nom de Dieu, Red, Polack a peut-être raison, tu te rappelles quand Sanders a eu sa perme, et qui qu’il était, un bon à pas grand-chose sauf à baiser le cul au Mantelli pendant tout un an.
    Red . – Crois-moi Brown, essaie pas le truc, si tu te mets à faire la lèche au Mantelli ça lui plaira tellement qu’il te laissera jamais partir.
    Minetta . – Qu’est-ce que c’est que tout ce trafic, je me demande ? Cette nom de Dieu d’armée qui reprend d’une main ce qu’elle donne de l’autre ? Ça vous crève le cœur.
    Polack . – Tu commences d’y voir clair.
    Brown (soupirant). – Aaah ! ça vous rend malade. (Se retournant dans ses couvertures.) Bonne nuit.
    Red (couché sur le dos, regardant les étoiles paisibles). – Ces permes c’est pas pour envoyer les gars chez eux, c’est pour comment pas les envoyer chez eux.
    Minetta . – Voui, bonne nuit.
    (Voix collective.) Bonne nuit… bonne nuit.
    (Les hommes dorment entourés par les collines et par le chuchotement silencieux de la nuit.)
    Les hommes passèrent une nuit inquiète. Frissonnant sous leurs couvertures, trop fatigués, ils dormirent mal. Celui dont c’était le tour de monter la garde gagnait en titubant la crête de la colline et, les yeux écarquillés, il fouillait du regard l’herbe dans la vallée dessous. Tout était lugubre dans les collines, tout était froideur et ar gent sous la lumière de la lune. Les dormeurs recroquevillés dans le contrebas devenaient lointains et irréels. L ’homme de garde se sentait terriblement seul, comme s’il s’était égaré parmi les vallées et les cratères de la lune. Rien ne bougeait, et rien cependant n’était au repos. Une brise soufflait, triste et pensive ; l’herbe bruissait, allant et venant par vagues chatoyantes. La nuit était intensément silencieuse.
    L’aube venue ils plièrent leurs couvertures, refirent leurs sacs et cassèrent la croûte, mâchant avec lenteur et sans appétit des œufs au jambon de conserve et des biscuits carrés. Leurs muscles étaient engourdis, et la transpiration de la veille ramollissait leurs vêtements. Les plus âgés appelaient de leurs souhaits la sortie du soleil ; toute chaleur semblait absente de leurs corps. Red souffrait des reins, Roth avait des douleurs rhumatismales dans son épaule droite, Wilson eut une attaque de diarrhée après manger. Tous se sentaient mornes, sans volonté, ne pensant guère à la marche qui les attendait.
    Debout sur la crête, Croft et Hearn discutaient l’étape à venir. A cette heure matinale une brume planait encore sur la vallée, estompant la montagne et le col. Les deux hommes regardaient vers le nord, détaillant la chaîne de Watamaï. Pareille à un banc de nuages pris dans la brume elle s’étendait à perte de vue, s’élevait précipitamment jusqu’au pic du mont Anaka, puis chutait de même pour faire place au col sur sa gauche, et remontait de nouveau.
    « Semble sûr et certain que les Japonais surveillent le col »,

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