Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen

Les Nus et les Morts

Titel: Les Nus et les Morts Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Norman Mailer
Vom Netzwerk:
maniéré indéfinissable d’ailleurs ; chaleureuse, compatissante, sa voix trahissait une touche de condescendance. Il était le gradé qui s’adresse au simple troufion. Il avait oublié que, deux minutes plus tôt, il avait attendu anxieusement que Goldstein lui exprimât son estime.
    Le contentement de Goldstein s’obscurcit. « Voilà comment sont les choses dans l’armée, se dit-il. L’opinion d’un blanc-bec y est de toute importance. »
    Wilson geignait de nouveau. Ils se turent et, s’étant retournés dans leurs couvertures, ils se soulevèrent à demi. S’aidant d’un soupir, Brown s’assit et s’efforça de le calmer. « Qu’est-ce qu’y a, vieux, qu’est-ce qu’y a ? demandait-il doucement, comme pour réconforter un chiot.
    – Ohh ! y a mon ventre qui me tue, ce fils de pute. >
    Brown lui essuyait le visage. « Qui c’est qui te parle,
    Wilson ?
    – C’est toi Brown, pas ?
    – Oui. » Il se sentit soulagé. Wilson allait mieux. C’était la première fois qu’il l’avait reconnu. « Comment que tu te sens, Wilson ?
    – Ça va, mais j’y vois pas clair.
    – Il fait noir. »
    Wilson se mit à pouffer faiblement. « J’ai cru que c’est ce trou dans mon ventre qui m’a fait aveugle. » Il remua ses lèvres gercées, faisant un son qui, dans cette obscurité, rappelait l’intense ahan d’une femme en labeur. « Quel fils de pute. » Il parut rouler sur le brancard. « Ou foutre est-ce que je suis ?
    – On te ramène sur la plage, Stanley, Goldstein, Ridges et moi. »
    Wilson digéra lentement la nouvelle. « Je suis plus dans la patrouille, hein ?
    – Oui. Nous tous, mon vieux. »
    Wilson pouffa de nouveau. « Je parie que Croft a râlé comme un frelon. Fils de pute, ils vont m’op-pér-rer et m’enlever tout ce pus, pas, Brown ?
    – Oui, ils vont te rafistoler.
    – Quand ça sera fait j’aurai deux nombrils, un tout juste au-dessous de l’autre. Nom de Dieu, j’y serai une sacrée attraction pour les gonzesses. » Il essaya de rire, se mit à tousser doucement. « Ce coup-ci pour faire mieux que moi faudra un gars avec deux bites.
    – Sacré vieux bâtard. »
    Wilson frissonna. « J’ai le goût du sang dans la bouche. C’est-il bon, ça ?
    – T Ça peut pas te faire de mal, mentit Brown. Ça vient par les deux côtés.
    – Dis si c’est pas dégueulasse, un gars qu’a été aussi longtemps que moi dans la section pour attraper une balle dans une petite bagarre de merde de rien du tout. » Il se tut, pour réfléchir. « Je voudrais que ce foutu trou dans mon bide il s’arrête de me faire mal.
    – Tout ira, bien, tu verras.
     –  Dis, y avait des Japonais après moi dans ce champ, à deux mètres d’où j’étais. Ils causaient, ils baragouinaient doky cola ou quelque chose comme ça. Mais l’étaient après moi. » Il se mit à trembler.
    « Le voilà qui déménage un coup de plus », pensa Brown. « T’as froid, vieux ? »
    Comme en réponse à la question de Brown, un tressaillement entama le corps de Wilson. Tout en parlant il avait peu à peu perdu sa fièvre, et maintenant, frileux et moite, il frissonnait de froid.
    « Tu veux une autre couverture ? demanda Brown.
    – Oui, tu peux me donner ça ? »
    Brown fit un pas en direction de ses hommes. « Y a quelqu’un qu’a deux couvertures ? » demanda-t-il.
    Personne ne répondit immédiatement. « Je n’en ai qu’une seule, mais je peux me couvrir avec ma toile », dit Goldstein. Bidges dormait paisiblement. « Moi aussi je m’arrangerai avec ma toile », dit Stanley.
    « Mettez-vous ensemble sous une couverture et une toile, et donnez moi les autres. » Il revint à Wilson, le couvrit de sa propre couverture, de celle qu’il venait d’obtenir, et d’une toile imperméable. « Ça va mieux mon gars ? » demanda-t-il.
    Wilson frissonnait moins fort. « J’y suis bien, mur-mura-t-il.
    – Sûr. »
    Ils gardèrent le silence pendant un court moment, puis Wilson se remit à parler. « Vous savez, j’apprécie rudement ce que vous faites pour moi, vous autres. » Un spasme de gratitude le saisit, et des larmes lui montèrent aux yeux. « Z’êtes de sacrés bons gars, y a pas à dire. C’est sûr, y a que ça de bon que si un gars a de vrais copains, et vous autres vous m’avez pas laissé tomber. Je te jure, Brown, on s’a peut-être engueulés de temps à autre, mais y a rien que je ferai pas pour toi quand

Weitere Kostenlose Bücher