Les panzers de la mort
conserver bon moral lorsqu’ils étaient en première ligne.
Les Russes nous pilonnèrent tout le jour, mais le soir, le tas de ruines qu’était le village restait encore entre nos mains. Le ciel hurlait, Crépitait, bourdonnait, éclatait, à faire céder les nerfs les plus solides. La nuit suivante, le vieux bombardier russe monomoteur qu’on appelait « le canard boiteux » déversa ses bombes sur nous : 800 bombes pour un carré de terrain d’à peu près 500 mètres de côté. Le seul endroit où nous pûmes Creuser une tranchée fut l’emplacement d’une » maison dont l’incendie avait ramolli la terre gelée, et nous nous y accrochâmes sous le feu croissant de l’artillerie, des lanceurs de grenades et des orgues de Staline. Cela dura des jours entiers, le temps de permettre aux renforts russes d’arriver. On aurait pu croire qu’ils avaient devant eux un corps d’armée entier et non un misérable groupe d’infanterie, composé de quelques compagnies décimées et, au fond, terrorisées, par la violence du combat.
Nous avions couché nos blessés dans un abri Creusé sous une hutte ; leurs pansements ensanglantés et raidis par le gel, couvraient leurs membres en bouillie, et dans leurs yeux agrandis, se lisait la peur sans nom de nous voir fuir en les abandonnant. Entrer dans un de ces trous, sous la terre, est quelque chose d’indescriptible et je Conseille à tous ceux que tente l’héroïsme de voir ces antichambres de l’enfer pour savoir s’ils peuvent y résister ! Tout autour, dans de mauvais abris, les blessés légers aidaient les servants des mitrailleuses. Une faim dévorante nous tenaillait, que nous essayions de tromper en mâchant des pommes de terre gelées. Nos chemises de neige sales recouvraient nos minces capotes et si quelques-uns avaient eu la chance de ramasser des bottes et des bonnets russes, les autres, avec ces cornets imbéciles en guise de bottes et un mouchoir roulé sous le casque, grelottaient dans le froid glacial plus meurtrier que les grenades.
Le 26 janvier, les moyens de communication furent coupés avec l’arrière ; nous étions abandonnés à nous-mêmes. Le lieutenant Köhler eut un geste indifférent :
– Tant pis ! Maintenant nous savons ce qu’il nous reste à faire, c’est aller de l’avant.
Porta, le légionnaire et Pluto s’étaient emparés d’une caisse russe de grenades à main. Ils étaient, en outre, des tireurs émérites et des bribes de conversations coupées d’éclats de rire parvenaient jusqu’à nos oreilles.
– Alors, vieux Porta, encore un d’embarqué chez Satan !
– Moi c’est Allah qui conduit mon œil, dit sérieusement le petit légionnaire en visant un Russe qui se met tout à coup à tournoyer comme une toupie.
– Dommage qu’on n’en, ait pas quelques-uns du Parti à viser, s’écria Pluto, qui épaule à la vitesse de l’éclair et tire en staccato. Hein ! Suppôt de Staline, t’en as pris pour ton grade ! Car si on n’envoie que des rouges à griller, ça ne fera pas l’affaire du diable.
– Combien tu en as ? dit Porta, moi 37. Pluto regarda le bout de papier placé sous une grenade à main, où une série de Croix et de traits indiquaient les buts certains ou douteux.
– 27 en enfer, 9 à l’hostau.
– Tu fais partie d’une société de charité ? dit le légionnaire. Tous les miens sont garantis pour le four. J’en ai 42 dont au moins 7 officiers. L’étoile en émail rouge qu’ils ont à leur bonnet est une cible épatante. Quand ils arrivent là-bas, près du grand type, on a exactement 25 centimètres de vue pour les cueillir au vol.
– Je bats mon record, les gars ! Cria Porta. Tiens, l’acrobate à bottes, tu en veux aussi ? Vous avez vu si le Crâne lui a sauté ! On ne l’a jamais si bien rasé !
~ Le légionnaire mit ses mains en cornet et hurla aux Russes :
– Monte là-dessus et tu verras Montmartre ! Une rafale lui répondit, ce qui les fit disparaître tous les trois dans leur trou en se tenant les côtes !
– On va leur chanter quelque chose, proposa Porta.
Un tir violent répondit encore à leurs hurlements, appuyé d’une engueulade du lieutenant Halter et d’Alte. Ils trouvaient parfaitement inutiles ces provocations sans objet, dont le résultat ne pouvait être que pousser les Russes à dès réactions désespérées.
Porta, pour qui le lieutenant était un benjamin et Alte un égal, répondit presque méprisant, sans
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