Les pièges du désir

demander de me présenter à votre ravissante amie ? 
    Ariana fit la moue. Lord Ullman prenait sans doute Nancy pour une actrice, un joli fruit vert que sa concupiscence brûlait de cueillir. Elle lorgna vers Edwin. Le jeune homme les observait, sans faire mine d’approcher. Jack n’apprécierait pas que sa sœur se trouve à proximité de ce personnage. 
    Elle procéda hâtivement aux présentations demandées par Ullman. 
    – Miss Vernon, voici lord Ullman, que j’ai déjà rencontré au théâtre. 
    – Charmé, dit Ullman en plongeant dans une courbette. 
    Nancy le gratifia en retour d’une courtoise révérence. 
    – Nancy n’a rien à voir avec le théâtre, milord. Elle accompagne son frère, qui peint actuellement mon portrait. Il se trouve dans la pièce voisine. 
    Ullman se désintéresserait probablement de Nancy, dès qu’il saurait qu’elle n’était pas à vendre. 
    – J’ai demandé à M. Vernon de nous amener ici afin que nous puissions voir les antiquités égyptiennes. Je veux être sûre que mon portrait en Cléopâtre sera conforme à la vérité historique. 
    Le regard de lord Ullman restait fixé sur Nancy. 
    – Je vois. 
    – Nous étions sur le point de partir, précisa Ariana en hâte. 
    Ullman parut ne pas entendre, subjugué qu’il était par la vue de la délicieuse Nancy. 
    – Etes-vous l’assistante de votre frère, miss Vernon ? 
    La jeune fille rougit de confusion et jeta un regard méfiant du côté d’Edwin. 
    – Il m’arrive de l’aider quand il me le demande, dit-elle en reculant vers la porte. 
    Ullman la gratifia d’un sourire charmeur. 
    – Je suis enchanté que vous l’ayez accompagné, puisque cela m’a donné l’occasion de vous rencontrer. 
    Edwin s’avança vers eux sur ces entrefaites, épargnant à Nancy de répondre à cette flatterie. 
    – Décidément, je me cogne dans les Vernon partout où je vais, observa-t–il d’un ton aigre. 
    – Je suis tout aussi heureuse de vous voir, rétorqua Nancy d’un ton acéré. 
    Lord Ullman fronça les sourcils. 
    – Eh bien, qu’est-ce là ? Voilà une entrée en matière fort peu aimable, jeune homme. J’espère que vous allez présenter des excuses à cette demoiselle. 
    Ariana coupa court à la scène. 
    – Désolée, mais nous devons y aller, dit-elle en esquissant une révérence. Au revoir, messieurs. 
    Elles se mirent aussitôt à la recherche de Jack, qu’elles retrouvèrent dans la salle adjacente. Nancy se précipita vers son frère et le tira par la manche. 
    – Jack, Edwin est là ! Il ne nous manquait plus que lui… 
    Elle se tourna vers Ariana pour expliquer : 
    – C’est le fils de lord Tranville et nous le connaissons depuis l’enfance. C’était un garçon odieux, qui passait son temps à me houspiller et à se bagarrer avec Jack. Avez-vous vu la tête qu’il a à présent ? Il est horrible avec cette balafre ! 
    Jack coula un œil vers le vestibule et aperçut Edwin sur le seuil de la pièce voisine. Ils échangèrent des regards assassins. 
    – Reste à l’écart de lui, conseilla-t–il à Nancy. 
    – Tu n’as pas besoin de me le dire. Allons-nous-en, Jack ! Je ne veux pas rester dans le même endroit que lui. 
    Jack interrogea Ariana du regard. 
    – Pour ma part, j’en ai assez vu, déclara-t–elle, bien qu’ils n’aient pas encore eu le loisir d’admirer une seule antiquité. 
    Ils se frayèrent un chemin vers la sortie. 
    – Il n’est pas bon qu’Edwin nous ait vus deux fois ensemble, dit Jack à Ariana, comme ils sortaient du bâtiment. 
    Elle tâcha de le rassurer. 
    – J’ai dit à son ami que nous faisions des recherches pour le portrait. Qui ira soupçonner autre chose ? 
    Elle brûlait de connaître les raisons d’une aversion aussi marquée à l’égard d’Edwin Tranville. Jack se confierait-il jamais à elle ? 
    – Quel soulagement d’être loin de lui ! s’exclama Nancy. Jack, puis-je entrer un instant chez le parfumeur ? Sa boutique est à quelques mètres. 
    Jack se retourna vers l’Egyptian Hall, pour s’assurer qu’Edwin ne les avait pas suivis. 
    – En ce cas, je vais faire un saut chez M. Hewlett, dit-il en désignant le magasin d’un marchand de couleurs. Je vous retrouverai devant la parfumerie. 
    Ariana accompagna Nancy dans la boutique, bien qu’elle n’eût pas l’esprit à choisir des parfums. C’était à Jack qu’elle pensait. Son passé,