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Les porteuses d'espoir

Les porteuses d'espoir

Titel: Les porteuses d'espoir Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Anne Tremblay
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l’heure.
    — Il faut se rendre à la gare, vite ! s’écria Jeanne-Ida.
    — L’attelage de René est en avant ! dit Mélanie.
    Le docteur lui lança un regard perplexe.
    — La station est à l’autre bout du village, Mélanie !
    — Mais René...
    — Non, ça nous fait un trop gros détour.
    — Bon ben, je vas atteler le nôtre, annonça-t-elle d’une voix dure. Pis j’vas
     avec Pierre à l’hôpital, conclut-elle.
    Furieux, le docteur revint sur ses pas.
    — On est attendus, Mélanie… dit-il d’un ton menaçant.
    Mélanie chercha une façon de justifier son départ de façon logique. Les mots ne
     lui vinrent pas.
    — Tant pis, j’y vas c’est tout. Tasse-toi, René, j’ai pas de temps à
     perdre.
    — Ta place est à mes côtés, aux noces de ma sœur ! Je ne vois pas pourquoi tu
     irais à Roberval ! Tu ne pourrais rien faire de toute façon… puis il ne se
     rendra probablement pas vivant !
    — René !
    Un silence plein de reproches pour l’indélicatesse du docteur plana.
    Pierre le brisa.
    — Mélanie ? gémit-il d’une voix apeurée.
    Sans réfléchir, la jeune fille s’agenouilla près du divan.
    — Ben non, inquiète-toi pas. Jeanne-Ida, ton frère pis moi, on t’emmène à
     l’hôpital de Roberval. Il faut aller prendre le train, tout va ben aller, je te
     le promets. Je vais rester avec toi tout le long. À l’hôpital, ils vont te
     soigner.
    Mélanie se releva. Sans plus un regard envers le médecin, elle entraîna Mathieu
     avec elle.
    — On va prendre La Grise, c’est le plus rapide de nos chevaux. Jeanne-Ida,
     couvre bien Pierre en attendant. Maman, préparez-nous des serviettes, un bassin
     pis une cruche d’eau.
    Tout le monde obéit aux ordres. Le docteur, enragé, s’en alla en criant :
    — Tu vas le regretter, Mélanie Langevin. Tu me feras pas ce coup-là deux
     fois !
    Il claqua la porte derrière lui. En temps ordinaire, il aurait rendu ce
     service. Mais la jalousie l’avait frappé en pleine poitrine, faisant ressortir
     en lui un côté insoupçonné de sa personnalité. Il ne serait pas fier de lui
     durant les mois suivants et garderait toujours une certaine gêne envers les
     Langevin, témoins de cette bassesse…
    Quand le traîneau des Langevin fut attelé au cheval, Mathieu revint au salon et
     se pencha pour prendre son frère dans ses bras.
    — On est parés, faut y aller.
    — T’as encore des croûtes à manger avant de pouvoir me porter, dit Pierre en se
     redressant.
    La douleur le laissa un instant pantelant, assis sur le rebord du divan.
    — Aide-moi, Mathieu…, souffla-t-il.
    Le soutenant, Mathieu guida son frère jusqu’à la porte. Pierre s’appuya sur
     tout ce qu’il pouvait trouver — les dossiers de chaise, les murs — et réussit à
     mettre un pied devant l’autre. La distance entre le salon et la galerie avant
     lui parut interminable.
    — Vite…, supplia Mélanie en regardant l’horloge de la cuisine.
    Jeanne-Ida déposa une couverture sur les épaules de Pierre. Le dos courbé, il
     lui était impossible de se tenir droit. Pierre offrit un dernier sourire à
     l’adresse de madame Langevin qui, le visage angoissé, tenait la porte
     ouverte.
    — Moi qui voulais vous faire peur, madame Langevin, je pense que j’ai réussi
     mon coup.
    — Ah ! mon snoreau, répondit-elle avec tendresse. T’es mieux de revenir me voir
     sur tes deux pattes.
    — Il faut se dépêcher, répéta Mélanie.
    Ils montèrent dans le traîneau. Pierre grimaça de douleur en se hissant à bord.
     Mélanie prit place à ses côtés et s’empressa de le couvrir d’une peau de
     fourrure.
    — J’avais justement ben froid, la remercia Pierre.
    Mathieu grimpa sur la banquette avec Jeanne-Ida. Avant de donner le signal de
     départ au cheval, il jeta un coup d’œil à l’arrière.
    — On est parés ?
    Mélanie fit signe que oui. Elle entoura Pierre de son bras et le colla
     fermement contre elle, voulant lui éviter les soubresauts de l’attelage.
    — Vas-y, Mathieu, La Grise est capable d’en prendre, dit Jeanne-Ida. La station
     est par là, ajouta-t-elle en désignant la direction à prendre.
    Mathieu se mit debout. Les jambes écartées, solides, d’un air déterminé, il
     fouetta la jument.

    — Tu te rappelles la journée de la fête du cinquantième ? La
     parade était si belle.
    Assise sur un banc de la station, Mélanie parlait de tout et de rien, la tête
     de Pierre sur

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