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Les porteuses d'espoir

Les porteuses d'espoir

Titel: Les porteuses d'espoir Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Anne Tremblay
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s’attirer la sympathie de tous. Il n’avait qu’à sourire et
     montrer ses doux yeux bruns, et tout le monde l’aimait. Quand Pierre alla au
     village rencontrer le curé Duchaine, il trouva que Saint-Ambroise était loin
     d’égaler Normandin. Il avait demandé à Chapeau de rester à la ferme. Il voulait
     être seul. Sa démarche était importante. Il avait quelque chose de très grave à
     discuter avec le curé. Au début, ils parlèrent de tout et de rien. Quand Pierre
     lui fit part de sa vocation, il ne put se résoudre à vraiment aborder le sujet
     qui le taraudait : les femmes. Comment dompter ces élans de désir qui le
     prenaient à la vue de la jolie serveuse du café où il s’était arrêté manger un
     morceau, ou de celle qui avait si joliment croisé les jambes en s’asseyant sur
     un banc du parc où il avait pris un instant de repos ? Il avait tant espéré
     qu’avec le curé, il retrouverait la complicité d’avant, mais il devait se
     l’avouer, il n’était plus un jeune servant de messe buvant les paroles du
     prêtre ; il était un homme, un homme de dix-neuf ans qui devait penser à son
     avenir et trouver lui-même des réponses à ses questions. Il avait décidé de
     revenir à travers les champs, reprenant sa vieille habitude. Au bord du
     ruisseau, il s’arrêta un moment. Prenant une branche morte, il s’amusa
     distraitement à fouiller dans les nouvelles pousses d’herbe du printemps. La
     solution à son problème lui vint comme un éclair. Pourquoi n’y avait-il pas
     pensé avant ! C’était si simple ! Il rejeta son bâton et s’enhardit vers sa
     maison. Il allait devenir moine, comme son cousin. À ce qu’il sache, les femmes
     étaient bannies de la trappe. Au monastère, il ne serait plus tourmenté par la
     tentation des joies de la chair. Loin des yeux, loin du cœur. Et voilà, quand on
     cherche, on trouve ! Il ne lui restait qu’à l’annoncer à ses parents.

    — Tu vas pas t’en retourner, y en n’est pas question, Pierre
     Rousseau. Tu viens de revenir.
    — Je vous l’ai déjà expliqué, maman, j’ai promis à un ami d’aller voir sa
     famille à Tadoussac.
    — Laisse-le faire, Julianna, c’est un homme astheure, notre fils, il a sa
     vie.
    — Une vie de vagabond, de va-nu-pieds ! C’était pas supposé ressembler à ça
     pantoute, sa vie ! Il a pas de bon travail pis il s’en va traîner sur les routes
     sitôt sorti du bois ! Si t’avais eu quelque chose à lui offrir, aussi.
    — Maman ! la supplia Pierre, voyant à quel point ces paroles blessaient son
     père.
    François-Xavier serra les poings. Sans plus un mot, il les quitta pour se
     diriger vers le hangar. Son père vieillissait, se dit Pierre, il ne se tenait
     plus aussi droit que dans ses souvenirs.
    — Maman..., reprit-il. Je serai pas parti pour toujours.
    Il retint ses paroles. Il avait voulu lui faire part de sa décision de rentrer
     au monastère, mais comment aborder le sujet quand sa mère n’acceptait même pas
     l’idée d’un aller-retour à Tadoussac ? Ce n’était pas le moment d’en rajouter.
     Il la rassura :
    — La semaine prochaine, je vas réapparaître sur votre galerie comme l’autre
     matin. Vous vous en faites trop, maman. La vie est belle. Il fait beau, j’suis
     plus obligé de me cacher, pis ça sent bon... le brûlé !
    — Mon souper ! s’exclama Julianna. Ah non ! ça sera pas mangeable
     encore !
    Sa mère s’engouffra dans la maison.
    Pierre en profita et alla rejoindre son père. Celui-ci travaillait sur un
     mystérieux projet de menuiserie. Chapeau se joignit à eux.
    Avec un regard intrigué, le jeune muet se mit à détailler les divers outils
     accrochés au mur.
    — Passe-moi le rabot, il faut que je ponce les coins.
    — Que c’est que vous construisez, son père ?
    — C’est un cadeau pour Léo. Ton frère va avoir dix ans en juillet
     prochain.
    — J’arrive pas à comprendre c’est quoi !
    — C’est quelque chose que j’ai patenté. Comme ton frère est sourd, ta mère est
     ben inquiète qu’il lui arrive quelque chose. Ça fait qu’elle le garde dans ses
     jupes. Avec ma patente, il va pouvoir aller faire des commissions au village pis
     nous rendre des petits services.
    Pierre ne voyait pas plus à quoi servait le bric-à-brac des pièces étalées sur
     l’établi. Il y avait un gros miroir, une boîte de bois, un klaxon de voiture et
     une ardoise. Avec un air

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