Les refuges de pierre
Têtes
Plates ? demanda Zelandoni.
La déclaration de Willamar constituait un élément nouveau. Il
faudrait qu’elle considère sérieusement cette idée ahurissante qu’avançaient
Jondalar et l’étrangère.
— La première fois que j’ai douté de leur nature animale, c’était
il y a de nombreuses années. Je voyageais seul au sud et à l’ouest d’ici. Le
temps avait brusquement changé... un coup de froid... et j’étais pressé de
rentrer. J’ai marché jusqu’à la tombée de la nuit et j’ai campé près d’un
torrent. Je prévoyais de le traverser le lendemain matin. En me réveillant, je
me suis aperçu que j’avais fait halte juste en face d’un groupe de Têtes
Plates. Comme j’avais peur – vous savez ce qu’on raconte sur eux –,
je les surveillais de près, au cas où ils décideraient de s’en prendre à moi.
— Qu’est-ce qu’ils ont fait ? demanda Joharran.
— Rien, à part lever le camp comme n’importe qui d’autre.
Ils avaient remarqué ma présence, bien sûr, mais j’étais seul, je ne pouvais
pas leur causer beaucoup d’ennuis, et ils ne semblaient pas pressés. Ils ont
fait bouillir de l’eau pour avoir quelque chose de chaud à boire, puis ils ont
roulé leurs tentes – différentes des nôtres, plus basses et plus
difficiles à repérer –, ils les ont attachées sur leur dos et ils sont
partis au petit trot.
— Il y avait des femmes ? s’enquit Ayla.
— Il faisait froid, ils étaient chaudement habillés... Oui,
ils portent des vêtements. On ne le remarque pas en été parce qu’ils sont peu
couverts, et l’hiver on les voit rarement. Nous ne voyageons pas beaucoup ni
très loin, en cette saison, et eux non plus, sans doute.
— Tu as raison, confirma Ayla, ils n’aiment pas s’aventurer
trop loin de leur abri par temps froid.
— La plupart avaient une barbe, ajouta Willamar.
— Les jeunes du Clan n’ont pas de barbe. As-tu remarqué si
certains portaient un panier sur le dos ?
— Je ne crois pas.
— Les femmes du Clan ne chassent pas, mais quand les hommes
partent pour une longue expédition, elles les accompagnent pour sécher la viande
et la rapporter. Il s’agissait probablement d’un groupe chassant à proximité de
la caverne, rien que des hommes, déduisit Ayla.
— Et toi ? lui demanda Folara. Tu accompagnais les
hommes dans les longues expéditions ?
— Oui, je suis même allée avec eux la fois où ils ont tué
un mammouth. Mais pas pour chasser.
Jondalar remarqua que tous semblaient plus curieux que
scandalisés. S’il craignait que d’autres se montrent plus intolérants, sa
famille au moins souhaitait en savoir davantage sur les Têtes Plates... sur le
Clan.
— Joharran, dit Jondalar, je suis heureux que nous
abordions cette question, car j’avais l’intention de t’en parler. Il y a une
chose qu’il faut que tu saches. En venant ici, nous avons rencontré un couple
du Clan, juste avant de traverser le glacier du haut plateau, à l’est. Ils nous
ont révélé que plusieurs clans ont l’intention de se réunir pour discuter de
nous et des soucis que nous leur causons. Ils nous appellent les Autres.
— J’ai du mal à croire qu’ils puissent nous donner quelque
nom que ce soit et plus encore qu’ils se réunissent pour parler de nous,
persifla le chef de la Neuvième Caverne.
— Il vaudrait mieux le croire si tu ne veux pas avoir d’ennuis.
Plusieurs voix s’élevèrent en même temps :
— Comment ça ?
— Quel genre d’ennuis ?
— Je suis au courant d’une situation embarrassante dans la
région des Losadunaï... Des jeunes appartenant à différentes Cavernes
brutalisent des Têtes Plates, des hommes du Clan. Je crois savoir qu’ils ont
commencé il y a quelques années en s’en prenant à des individus isolés, comme
lorsqu’on chasse le rhinocéros. Mais il ne fait pas bon se frotter aux hommes
du Clan. Ils sont intelligents, ils sont forts. Deux de ces jeunes l’ont appris
à leurs dépens, et les autres se sont rabattus sur les femmes. Comme elles n’ont
pas l’habitude de se battre, ce n’était pas aussi drôle. Pour rendre la chose
plus intéressante, ils les ont forcées à... je n’appellerais pas cela les
Plaisirs.
— Quoi ? s’étrangla Joharran.
— Tu m’as entendu, confirma Jondalar.
— Grande Mère ! lâcha Zelandoni.
— C’est horrible ! s’écria Marthona. Folara plissa le
nez de dégoût.
— Méprisable !
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