Les reliques sacrées d'Hitler
positionner la forteresse sur un promontoire rocheux surplombant la vallée facile à défendre. Horn aurait pu faire halte sur le pont cintré enjambant les douves pour faire admirer le travail minutieux des artisans sur les contreforts de pierre, la filigrane décorative sculptée sur lâancienne herse et les spectaculaires nervures sur les gargouilles ornementales sous ce qui avait été des corniches bombées de deux des trois tours. En dépit de lâincendie qui avait détruit les toits en pente et les fenêtres en verre cathédrale, le château dâHimmler était toujours un chef-dâÅuvre de lâart et de lâarchitecture de la fin de la Renaissance.
Mais Horn ne semblait pas disposé à faire le moindre discours. Sachant qui en avait ordonné la restauration et les malheureuses victimes qui avaient perdu la vie en travaillant pour transformer le rêve en réalité, Horn restait ostensiblement silencieux. La tête de mort en fer forgé mal accrochée sur un des murs roussis par le feu, les runes gravées au-dessus du poste de garde, ainsi que les symboles nazis sur les portes renforcées en acier suffisaient à leur rappeler quâils nâétaient pas en train de visiter un monument historique, mais quâils mettaient leurs pas dans ceux des meurtriers et de leurs victimes.
Des gravats provenant du violent incendie qui avait ravagé le château jonchaient le chemin menant à la cour pavée triangulaire après les portes principales. Le mur dâenceinte était encombré de mobilier calciné, de débris de verre provenant des fenêtres, de tas de céramiques brisées, de fragments de lambris brûlés, de moquette arrachée, de machines à écrire et de monceaux de livres et de paperasse souillés par lâeau. Les ouvriers sâétaient contentés de jeter les débris dans la cour par les fenêtres.
Markham les conduisit entre les montagnes de déchets jusquâà une porte en bois dans lâaile ouest pour commencer la visite. De là , il les guiderait à travers les salles du château, dans le sens inverse des aiguilles dâune montre, jusquâà leur destination finale, la tour nord.
Ils sâarrêtèrent pour commencer au pied dâune volée de marches en pierre dans une pièce caverneuse remplie de vitrines et de cabinets complètement démolis, décrite par Markham comme le musée privé dâHimmler. Câétait là quâavaient été exposés les fac-similés de la couronne, du globe et du sceptre du Saint Empire.
Tous les visiteurs étaient dâabord conduits dans cette pièce, expliqua Markham. Câétait le joyau dâHimmler. Une nouvelle exposition était prévue, paraît-il, chaque fois que le Reichsführer-SS ou ses chefs dâétat-major venaient au château. Elle comprenait invariablement de lâart germanique emprunté à des musées ou des objets extraits par lâéquipe dâarchéologues dâHimmler de tumulus funéraires antiques et dâhabitats dâavant lâère chrétienne. La plupart avaient été emportés dans des camions, y compris les reproductions des joyaux de la Couronne, mais des photos permettaient dâidentifier une grande partie des objets. Dans les vitrines en verre, on voyait des urnes, des couteaux en fer, des pièces romaines, des aiguilles de lââge du bronze et des moulages de runes en plâtre. Des fossiles, également. Une des pièces vedettes du musée, dit Markham, était un ichtyosaure de trois mètres de long, un reptile marin proche du dauphin de quelque quatre-vingt-dix millions dâannées.
Un tas dâautres détritus attendait Horn dans les pièces noircies par le feu. Selon le commandant, câétait là que les érudits dâHimmler avaient leurs salles de travail, avec un labo photo et une imprimerie, une machine à ronéotyper et une salle de dactylo, ainsi quâun studio de reliure. Mais on ne pouvait rien y récupérer, pas plus que dans la bibliothèque adjacente où Horn et Dollar furent ensuite conduits.
Un prisonnier du camp faisant office de bibliothécaire assistant avait dit à Markham quâil y avait eu là jusquâà douze mille
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