Les reliques sacrées d'Hitler
lâadministration de Nuremberg et au rétablissement de la paix. Sans résultat car, dâaprès Thompson, tous les habitants étaient des nazis. La police de la ville dans sa totalité sâétait engagée dans la bataille pour défendre Nuremberg contre lâarmée alliée. Les quelques policiers encore vivants après lâinvasion avaient été envoyés dans des centres de détention ou conduits vers des camps de travail, ce qui obligeait les conducteurs de bus à faire le travail de la police. Mais comme les règles dâoccupation interdisaient le port dâarmes aux civils allemands, ils devaient se contenter de régler la circulation.
Le manque de police nâaurait pas été un problème sérieux si plusieurs milliers dâouvriers du Reich, libérés des camps, nâavaient pas cherché à se venger de leurs anciens bourreaux, ce qui était compréhensible. Compte tenu de lâénorme arsenal dâarmes abandonnées dans les rues, la situation était explosive. On trouvait de tout en ville, depuis des pistolets jusquâà des lance-roquettes, et il nây avait plus personne pour récupérer ces armes dans les ruines puisque la police était partie, ainsi que lâarmée américaine, à part deux compagnies de soldats fatigués par la guerre, pour conquérir le reste de lâAllemagne.
Thompson continua à peindre un tableau parfaitement sombre. Le commandement allié nâétait pas en mesure de nourrir et de loger toute la population dâune ville qui avait vécu en autarcie jusquâà un passé récent. Des cartons dâaide arrivaient, mais, au lieu de contenir de la nourriture et des fournitures médicales, les premières provisions à atteindre Nuremberg étaient des raquettes de ping-pong, des balles de baseball et des manuels scolaires â avec lesquels le commandement allié, dans sa grande sagesse, pensait pouvoir restaurer la démocratie, la liberté de parole et la tolérance raciale. Même les cartes distribuées aux officiers dâoccupation étaient inutiles, ayant été imprimées lors de la Première Guerre mondiale, avant même que nâexiste le champ de parade des nazis.
Et ce nâétait pas tout. Les centres de distribution de nourriture et les cliniques tardaient à ouvrir, et lorsque lâaide alimentaire arrivait enfin, les camions ne pouvaient pas manÅuvrer dans les gravats. Ce qui avait engendré un marché noir florissant, lequel, admit Thompson, était dâailleurs le seul marché qui fonctionnait dans la ville. Lâinflation constante conjuguée aux besoins désespérés de la population faisait quâune boîte de lait en poudre, une boîte de conserve de viande ou un savon coûtaient lâéquivalent dâun salaire quotidien. Une fiole de pénicilline pour combattre le typhus venu des camps valait celui dâune semaine. Mais comme les dollars dâoccupation nâavaient pas encore été distribués et quâil nây avait aucune devise légale disponible, la nourriture et les fournitures médicales étaient échangées contre des armes et tout ce que les résidents possédaient encore ou pouvaient voler. Pour rendre les choses encore plus difficiles, après trois semaines dâoccupation, les fonctionnaires, protestant contre les règlements stricts édictés par lâoccupant interdisant toute embauche de personnel ayant une affiliation nazie, sâétaient mis en grève dans toute la ville. Et cela avant même que la situation ne devienne totalement incontrôlable.
Face à un désastre humanitaire imminent, le gouverneur Fuller avait décidé de passer outre la directive du commandement allié de ne pas engager des anciens membres du parti nazi dans lâeffort de reconstruction. Thompson dit que Fuller ne savait pas quoi faire dâautre. Dans des villes moins endommagées ou avec une présence nazie moins prononcée, il aurait pu facilement renvoyer ou exclure dâanciens nazis. àNuremberg, par contre, tout fonctionnaire de haut rang était membre du parti, et les fonctionnaires les plus spécialisés ou les plus expérimentés, ceux dont Fuller et ses collègues dépendaient pour remettre en
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