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Les Roses De La Vie

Les Roses De La Vie

Titel: Les Roses De La Vie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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père
Joseph, le duc de Nevers est assurément mon ami, mais le but premier et
primordial que je me proposais n’était point de le mettre sur le trône de
Byzance, mais de purger la terre d’un peuple hérétique ! De la même façon,
je dirais que j’aime et j’admire l’évêque de Luçon plus qu’aucun homme au
monde, mais c’est le roi et le royaume que j’entends servir en le servant.
    — Vous pensez donc que Richelieu serait beaucoup plus
utile au roi en éclairant la reine-mère au cours de la présente négociation
qu’en demeurant en exil en Avignon ?
    — Assurément, reprit le père Joseph. La cour de la
reine-mère à Angoulême, c’est tout justement la cour du roi Pétaud. Ce ne sont
que pauvres cervelles et petites ambitions au service d’une femme qui se
disperse et se perd en extravagances. Pour faire sa paix, Louis lui a dépêché
deux négociateurs, Monsieur de Béthune qui est un fin diplomate, et le père de
Bérulle qui est un saint. Mais ils se heurtent à des demandes follement
inconsidérées. Savez-vous ce que la reine-mère a exigé d’eux comme préalable à
toute négociation ? Que Louis congédie les troupes qu’il a levées pour la
réduire ! Pouvez-vous imaginer pire absurdité ? Et pourquoi ne
demanderait-elle pas, pendant qu’elle y est, qu’on rétablisse en sa faveur une
nouvelle régence ?
    Je souris à cette interrogation ironique, parce qu’elle me
ramentut ce qu’avait dit mon père le matin même sur ce que la reine-mère
désirait « au fond d’elle-même ».
    — Pis même ! ajouta le père Joseph, ayant écrit
des lettres pleurardes, piquantes et revendiquantes au roi et à ses ministres,
elle a eu le front de les publier, prenant à témoin les propres sujets du roi
de ses querelles avec son fils. Bien entendu, ni le roi ni les ministres n’ont
répondu et quant à la reine-mère, elle n’a même pas eu conscience de jeter de l’huile
sur le feu et que cette huile ne pouvait que rendre plus difficile la
négociation, laquelle elle laissait, de reste, traîner en longueur, n’entendant
pas que plus l’armée royale se rapprochait d’Angoulême, plus elle allait être à
désavantage pour traiter.
    — Elle compte, se peut, sur le duc d’Épernon, puisqu’il
a des troupes dans la ville.
    — Mais il ne les a que pour ne les employer point et
surtout pas contre l’armée royale ! Dès que celle-ci serrera Angoulême
d’un peu près, vous pouvez être sûr que d’Épernon retirera la sienne, comme il
l’a fait du camp de Saint-Cloud quand Henri III mourut. Après quoi, il
courra, la queue entre les jambes, se mettre à l’abri dans sa bonne ville de
Metz.
    Pour le coup, le père Joseph m’étonna. Le mystique, le
visionnaire, le croisé d’une croisade utopique laissait tout soudain la place à
un homme qui avait les deux pieds sur terre, qui était parfaitement renseigné
sur les uns et sur les autres et portait sur les événements et sur les hommes
un regard pénétrant. Dès lors, je ne jugeai pas utile de questionner le père
Joseph plus avant, bien assuré que j’étais que son intervention auprès de Sa
Majesté ne pouvait que servir les intérêts du royaume. Et après quelques
compliments que l’usage m’imposait, mais où je laissai percer une sincère
estime, je le renvoyai chez Déagéant, lui disant que, dès le lendemain matin,
je demanderais au roi de le recevoir.
    Ce qui sortit de cet entretien entre le religieux et le roi,
le lecteur le sait. C’est tout juste si Louis ne considéra pas le père Joseph
comme un ange envoyé du ciel pour éclairer sa route. Sans du tout consulter
ministres ou Conseil, il prit sa décision en un battement de cil. Son premier
mouvement fut d’envoyer le père Joseph lui-même à Richelieu pour lui faire
connaître sa volonté. Mais le capucin lui ramentut que selon la règle de son
ordre, il ne pouvait cheminer ni à mulet ni à cheval et moins encore en
carrosse, mais à pied. Et le chemin étant si long de Paris en Avignon, Sa
Majesté perdrait là un temps infini. Louis résolut alors de dépêcher le frère
aîné du père Joseph, Monsieur du Tremblay, qui vivait dans le siècle et
d’ailleurs y vivait bien, mais consentit toutefois à faire la plus extrême
diligence pour porter à l’évêque de Luçon cet ordre royal qui allait combler
les vœux de son destinataire, soulevant de sa poitrine la dalle qui
l’étouffait.
    C’en était à la parfin fini de son

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