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Les Roses De La Vie

Les Roses De La Vie

Titel: Les Roses De La Vie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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d’Épernon qui, d’une voix haute et ferme, prit position en
faveur de la Compagnie dont on murmurait qu’à titre laïque, il faisait lui-même
partie.
    Louis fit alors voter, non à main levée, mais par bulletin
écrit, et le dépouillement des bulletins que l’on fit séance tenante donna une
assez forte majorité en faveur des Jésuites. Louis allait donc proclamer la
motion votée quand le président Du Vair, lui demandant la parole, fit valoir
que le quorum n’était pas atteint, plus du tiers des membres du Conseil étant
absent, et qu’il convenait, par conséquent, de renvoyer la décision à une autre
séance.
    Un grand silence suivit cette déclaration et tous les yeux
se tournèrent vers Louis dans l’attente de ce qu’il allait dire, certains
redoutant, d’autres espérant qu’il donnerait raison à son ministre comme il
avait toujours fait jusque-là.
    Louis se taisait, les yeux baissés, la face imperscrutable,
et il m’était assurément difficile de savoir comment il allait décider. Car il
déférait si souvent à l’expérience de ses ministres et il était si respectueux
de la procédure qu’on pouvait s’attendre à ce que l’objection présentée par le
président Du Vair lui en imposât. D’un autre côté, à observer la façon
également attentive et courtoise avec laquelle il avait écouté les uns et les
autres, il était impossible de présumer de sa position personnelle. Raison pour
laquelle ce qu’il allait dire prit pour le Conseil beaucoup d’importance car,
ayant à trancher pour ou contre la procédure (et trancher contre était
assurément une audace), on saurait par là même ce qu’il pensait du problème.
    — Messieurs les conseillers, dit-il d’une voix assurée,
le Conseil a voté. Il n’y a pas à revenir sur ce vote. La Compagnie de Jésus
est autorisée à rouvrir son école de Paris.
     
    *
    * *
     
    Dans l’après-dînée de ce même jour, j’allai voir Madame de
Lichtenberg en son hôtel de la rue des Bourbons. J’v fus accueilli par de sombres
regards et des propos amers. Elle ne me voyait plus ! J’étais toujours sur
les chemins avec le roi ou prisonnier de son Conseil pendant des heures !
De reste, l’aimais-je encore ? Et s’il en allait autrement, comment s’en
étonner ? Elle vivait retirée, quasi recluse, et moi je muguetais à la
Cour, au milieu d’un essaim de filles, lesquelles ne pensaient qu’à leur
cas !
    — Leur cas, Madame ! Parle-t-on si crûment dans
votre Palatinat ? C’est pour le coup que Madame de Rambouillet pousserait
des cris d’orfraie !
    — De grâce ! Ne nommez pas devant moi cette
funeste bégueule ! Je parle moi à l’allemande, droit et clair ! Et
quant à ces filles que je dis, à défaut de charmes durables, leur jeunesse leur
donne peut-être cet éclat passager qui peut bien piper un homme de votre
complexion !
    — Un homme de ma complexion ! Mais je vous aime,
Madame !
    — J’en doute ! J’ai ouï dire que Madame de Luynes
avait eu l’excessive – impudence, le jour de son mariage, de vous donner
le bel œil ! Vous me l’aviez caché ! Et comme si toutes ces
pointillés ne suffisaient pas encore, le roi a fait de vous un seigneur de
conséquence ! Vous voilà comte, maître d’un grand domaine, lequel va vous
prendre encore beaucoup du temps que votre service auprès du roi vous eût sans
cela laissé libre ! Et c’est pour le coup que je ne vous verrai
plus ! Où donc s’en est allé le petit chevalier de Siorac, si empressé à
prendre avec moi des leçons d’allemand et à me jurer à mes pieds d’un air
timide un éternel amour ?
    L’évocation de ce passé l’émut, une larme apparut en son bel
œil et roula lentement sur sa joue où de mes lèvres je la voulus cueillir. Mais
elle me repoussa avec vigueur et j’entendis bien qu’il me faudrait plaider. Je
répondis alors à tous les points qu’elle avait soulevés en prenant soin de
faire durer ma plaidoirie le plus longtemps que je pus, ayant observé à maintes
reprises que la longueur d’une explication, même si elle est répétitive,
possède, par sa longueur même, une force persuasive.
    À la parfin, voyant qu’elle se l’adoucissait, je me plaignis
du froid glacial qu’il faisait en son petit salon et je lui suggérai de
poursuivre notre bec à bec dans sa chambre : suggestion qu’elle accepta,
mais d’un air hautain comme pour décourager les arrière-pensées que j’eusse pu
par

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