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Les Seigneurs du Nord

Les Seigneurs du Nord

Titel: Les Seigneurs du Nord Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Bernard Cornwell
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disgrâces, car il était après
tout un clerc de haut rang fort apprécié du roi, mais Beocca attendait que l’amour
le frappe comme la foudre. Il était voué à lorgner les belles femmes, à rêver
et à prier. Peut-être que son paradis le récompenserait d’une magnifique épouse,
mais d’après ce que je savais du paradis des chrétiens cette sorte de plaisirs
n’y était point offerte.
    Beocca vint nous chercher aux Deux Grues dans
l’après-midi. Je remarquai son coup d’œil aux poutres et son air choqué en
voyant les nombreuses encoches, mais il resta coi et nous emmena au palais, où
nous laissâmes nos épées à l’entrée. Ragnar reçut ordre d’attendre dans la cour
pendant que Beocca me menait dans l’étude d’Alfred : la petite pièce, qui
faisait partie du bâtiment romain, était le cœur du palais de Wintanceaster. Y
étant déjà venu, je ne m’étonnai point du mobilier chiche et des piles de
parchemins qui s’y entassaient. Les murs étant de pierre chaulée, elle était
lumineuse, mais Alfred y faisait brûler une vingtaine de cierges dans un coin. Chacun
était marqué de profondes encoches séparées d’un pouce. Ils n’étaient pas là
pour éclairer, car le soleil d’automne se déversait par la grande fenêtre, et
je m’abstins de poser la question. Sans doute y avait-il un cierge pour chaque
saint qu’il avait prié ces derniers jours, et chacune des encoches
correspondait à un péché qui devait disparaître dans les flammes. Alfred avait
une conscience fort aiguë des péchés, surtout des miens.
    Il était revêtu d’une robe brune qui lui
donnait l’air d’un moine. Ses mains étaient aussi tachées d’encre que celles de
Beocca. Il était pâle, l’air souffreteux. J’avais ouï dire que ses maux de
ventre l’avaient repris, et de temps à autre il frémissait sous la douleur. Mais
il m’accueillit avec une certaine chaleur.
    — Seigneur Uhtred. Je t’espère en bonne
santé ?
    — Je le suis, seigneur, dis-je en m’agenouillant.
Et j’espère qu’il en est de même pour vous.
    — Dieu m’afflige. Il y a raison à cela, je
dois donc m’en réjouir. Relève-toi, je te prie. Le comte Ragnar est-il avec toi ?
    — Il attend dehors, seigneur.
    — Très bien.
    J’occupais le seul espace libre de la petite
pièce. Les mystérieux cierges prenaient beaucoup de place, et Beocca se tenait
contre le mur, à côté de Steapa, qui en prenait encore plus. Je fus surpris de
le voir là. Alfred favorisait les hommes intelligents, et Steapa ne l’était
guère. Né esclave, il était devenu guerrier, mais en vérité il n’était bon à
guère plus qu’à engloutir de l’ale et massacrer les ennemis du roi, tâches qu’il
accomplissait avec une brutale efficacité. Il attendait, à côté de l’écritoire
du roi, sans trop savoir pourquoi on l’avait mandé.
    Je pensais qu’Alfred m’interrogerait sur mes
épreuves, car il aimait qu’on lui parle de lieux lointains et de peuples
étranges. Mais il n’en dit pas un mot et me questionna sur Guthred. Je lui
répondis que je l’aimais bien, ce qui le surprit.
    — Tu l’aimes bien, malgré ce qu’il t’a
infligé ?
    — Il n’avait guère le choix, seigneur. Je
lui avais dit qu’un roi devait être sans scrupules pour défendre son royaume.
    — Quand bien même… répondit Alfred, dubitatif.
    — Si nous, hommes du commun, espérions la
gratitude des rois, seigneur, dis-je gravement, nous serions toujours déçus.
    Il me regarda avec sévérité, puis il éclata d’un
rire rare chez lui.
    — Tu m’as manqué, Uhtred. Tu es le seul à
te montrer impertinent avec moi.
    — Il ne l’a point fait exprès, seigneur, s’inquiéta
Beocca.
    — Bien sûr que si, dit Alfred en
repoussant des parchemins pour s’asseoir sur le rebord de la fenêtre. Que
penses-tu de mes cierges ? me demanda-t-il.
    — J’en pense, seigneur, qu’ils seraient
plus efficaces la nuit.
    — J’essaie de fabriquer une horloge, dit-il.
    — Une horloge ?
    — Afin de marquer le passage des heures.
    — Regardez le soleil, seigneur. Et la
nuit, les étoiles.
    — Nous ne savons pas tous voir au travers
des nuages, plaisanta-t-il. Chaque marque représente une heure. Je m’efforce
actuellement de trouver quelles marques sont les plus justes. Si je trouve un
cierge qui brûle les vingt-quatre divisions entre midi et midi, je saurai
toujours l’heure, n’est-ce pas ?
    — Si fait,

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