Les templiers
Le Templier devra persévérer dans son ordre : « Et aucun de nos frères ne pourra entrer dans l’Ordre de saint Benoît ou de saint Augustin et il ne doit entrer en aucun autre ordre. » Et plus loin, la Règle précise : « Et nul frère ne doit laisser la maison pour entrer dans un autre ordre sans permission. »
Toute sa vie, gardé par son Ordre et préservé par son habit, le Templier s’adonnera à ses œuvres. Il ne changera d’Ordre que s’il devient lépreux. Le jour de sa réception, il consignera cela par écrit, s’attachant ainsi à une famille religieuse déterminée, à son Ordre. Par lui, chaque commanderie, forteresse, chaque maison, sera liée aux autres, car tous les membres d’une maison sont du Temple et de lui seul. Les Templiers, au contraire des autres législateurs, ne reconnaissent pas la pleine puissance aux supérieurs. La latitude laissée au Maître est faible. Il doit seulement commenter la Règle, l’interpréter, et non la contredire, ni, encore moins, la violer. Il en est le gardien. D’ailleurs, dans les réformes qui furent opérées, le texte en lui-même n’a jamais changé. Quelques détails seulement furent ajoutés. Tous les conseils de la législation sont une mise en garde contre l’imprévoyance, le caprice, la jalousie, les soupçons excessifs, les passions et surtout contre la folle autorité du Maître. Enfin, contre tout ce qui est susceptible de troubler la paix des frères. Elle redresse les défaillances et les consciences s’éclairent. Le Templier doit honorer tous les hommes et le Maître n’avoir aucune préférence.
Si la papauté exempta très tôt l’Ordre du Temple de la juridiction épiscopale, elle s’attacha surtout à établir et à confirmer les pouvoirs hiérarchiques. Pour certains de ceux-ci, les papes les étendirent si loin que les Templiers eurent rapidement une indépendance d’action très importante. Aussi, avant d’aller plus avant, devons-nous connaître la hiérarchie de l’Ordre.
L’autorité suprême de l’Ordre était le Chapitre. Les Chapitres étaient de trois sortes. Les Chapitres ordinaires se réunissaient toutes les semaines, « partout où il y aurait quatre frères ou plus ensemble », afin de juger des défauts commis contre la Règle et décider des gestions de la maison. Le Chapitre provincial, que certains textes appellent la Chambre prieurale, se réunissait toutes les fois que des litiges importants, concernant la vie de l’Ordre dans la Province ou la Langue, étaient signalés par les visiteurs ou les commandeurs. Le plus important des Chapitres était le Chapitre général. Il se composait du couvent, c’est-à-dire du conseil du Maître, des baillis ou chefs de Langue, des sous-baillis, des commandeurs de toute sorte et d’un certain nombre de chevaliers élus par les autres. Le principe de gouvernement synarchique se retrouve dans ce système. Ainsi, on discutait de l’administration interne de l’Ordre. C’est encore là que l’on ajoutait des articles ou des codes à la Règle sans strictement rien changer à son esprit. Et, fait plus important, c’est le Chapitre général qui procédait à la nomination des visiteurs, des officiers de l’Ordre. Ainsi, au début du mois de juin 1293, Jacques de Molay écrivit au roi Édouard d’Angleterre qu’il nommait Guy de Foresta visiteur d’Angleterre en attendant que le Chapitre général se réunisse pour le confirmer ou le changer. Il le nomme provisoirement à cause de sa prudence, de sa justice et par nécessité en accord avec les frères de sa maison – donc de son conseil – mais il devra recevoir cette provision par le Chapitre général « que nous allons célébrer ». Le Chapitre se réunira en effet à Montpellier le 10 août 1297.
D’autres tâches attendaient le Chapitre général. Il servait de cour d’appel pour les cas litigieux, tant temporels que spirituels. Nous avons l’exemple de la commanderie de Peirasson, où un litige de propriété sera réglé. Pour ce qui touchait le spirituel, souvent le Chapitre renvoyait l’affaire directement au pape, afin de donner plus de poids aux décisions. Ainsi, en 1242, des contestations s’élevèrent entre les Templiers et les évêques d’Espagne au sujet des aumônes et de certaines fonctions ecclésiastiques des chapelains de l’Ordre. Le Chapitre provincial de Belchite renvoya cette affaire devant le Chapitre général qui se réunit à
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