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Les valets du roi

Les valets du roi

Titel: Les valets du roi Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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M. Hardouin-Mansart avaient entassé les livres de comptes et les rouleaux qui les gênaient.
     
    Tobias arpenta les couloirs et les soubassements du château. Ceux, du moins, qui lui furent accessibles. Mary passa sa journée à le suivre, perplexe devant ses manières et les questions qu’il posait. Trop absorbé par sa tâche, Tobias ne la remarqua pas. Lorsque la bienséance les obligea l’un et l’autre à prendre congé, leurs constats étaient identiques.
    Ils n’avaient rien trouvé.
     
    Mary regagna son hôtel particulier à l’heure du souper. L’air distant de Corneille la renvoya à leur différend du matin. Pour tromper sa colère, celui-ci avait fureté toute la journée aux cuisines du château vieux. C’était là que les ragots circulaient le mieux. Il s’attendait à ce que Mary, ayant obtenu la charge qu’elle escomptait, le renvoie auprès de Forbin. Or, si la mer commençait à lui manquer douloureusement, comme un pays qui vous tient à la peau, il n’était pas pressé de quitter Mary Read. Il lui déplaisait profondément de la voir s’abîmer sous des fards ridicules, prendre des airs pincés et hautains comme ces gens de noblesse, quand il se souvenait de sa spontanéité, de sa vaillance et de sa témérité. Mary, quoi qu’elle en veuille prétendre, était plus faite pour l’action et la croisière. Là était la véritable raison de son ressentiment et de sa tristesse, et il aurait donné cher pour avancer un argument qui la ferait renoncer à son projet et la ramènerait à Brest. S’il devait choisir alors entre elle et Forbin, c’est à ses côtés à elle qu’il s’embarquerait. Il ne manquait pas de navires sur lesquels de bons marins pouvaient s’engager.
    Lorsque, à la veillée, ils se retrouvèrent seuls dans le salon de musique où un clavecin s’ennuyait, Mary lui fit le récit de sa journée, comme si elle avait oublié leur querelle du matin. Lui ne pensait qu’à cela, d’autant que l’étrange attitude de Tobias le renvoyait à cette rumeur qui circulait.
    — A deux reprises, j’ai saisi à la volée des bribes d’histoire parlant de trésor et de clé, déclara Corneille après un court moment de réflexion. Tobias Read a peut-être décidé, comme d’autres, de le chercher, lâcha-t-il.
    — C’est ridicule, objecta Mary. Tobias et Emma sont bien assez riches pour ne pas s’inquiéter d’une rumeur qui pourrait les distraire de leurs affaires. Chacune d’elles perdue vaut plus que l’ombre d’un trésor. Il y a forcément autre chose.
    — Cela ne t’ennuie pas si, de mon côté, je me renseigne ?
    — Tu prêtes foi aux ragots de cour ? s’étonna Mary.
    A peine entrée dans la pièce, elle avait ôté ses souliers pour délasser ses pieds dans l’épaisseur du tapis qui couvrait le plancher. En deux enjambées, Corneille la rejoignit. Rompant le vœu qu’il s’était fait de ne plus l’importuner à ce sujet, il l’enlaça tendrement. Elle ne chercha pas à s’échapper, ravie de leur réconciliation.
    — Si je gagnais un nom et une fortune, aurais-tu encore besoin de ces maudits Anglais pour te les donner ? demanda-t-il pourtant le cœur serré.
    Celui de Mary se mit à battre la chamade.
    La bouche de Corneille caressa son cou de petits baisers, la faisant frémir jusqu’au creux des reins.
    — Tu es un corsaire de Sa Majesté, objecta-t-elle cependant. Lié comme Forbin à ces règles absurdes.
    — Tu te trompes, Mary. À l’inverse de lui, je n’ai pas épousé la marine. Il me coûterait bien moins d’en partir que de te perdre.
    — Tu étais donc sérieux à propos de mariage ?
    — Tu n’as pas répondu à ma question, relança Corneille.
    L’une et l’autre se rejoignaient toutefois. Mary ne s’interrogea pas longtemps. Depuis qu’elle les côtoyait, elle avait de moins en moins de goût pour ces lords serviles. Tandis qu’une seule des caresses de Corneille, un seul de ses regards, la comblait.
    — Renseigne-toi sur ce trésor, décida-t-elle le cœur soudain léger. S’il existe vraiment, nous partirons le chercher.
    Corneille réprima un soupir de contentement et l’embrassa à l’étouffer.
    Mary Read était bien celle qu’il croyait !
     

19
     
     
    L a semaine durant, Tobias Read poursuivit son incessant ballet, se heurtant aux mêmes résultats. Emma avait annoncé son arrivée, agacée de se morfondre à Londres où elle avait emménagé chez son époux. Bien qu’elle ait

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