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L’ESPION DU PAPE

L’ESPION DU PAPE

Titel: L’ESPION DU PAPE Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Philippe Madral , François Migeat
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t’en empêchera.
    — Je ne suis pas tendre.
    — Tu es bon.
    Touvenel la lâche et crie soudain :
    — Je ne suis pas bon ! Je suis méchant ! Méchant ! Comme tous ces chiens de croisés avec lesquels j’ai commis les pires forfaits ! Je suis mauvais ! Yasmina vient de me le dire.
    Tout à sa furie, il ne s’est pas aperçu que les gens de la fête, attirés par leurs cris, se sont rassemblés autour d’eux et rient de leur manège.
    — Et, quand je trouverai ton frère, je le traînerai par les pieds jusqu’à l’église. Et je lui couperai le nez et les oreilles, s’il refuse !
    — Holà, tout doux, seigneur Touvenel ! Calmez-vous ! lance une voix, derrière lui.
    Touvenel se retourne. Il se trouve face à Guillaume de Gasquet, à cheval, escorté de trois de ses hommes d’armes, qui le toise d’un air goguenard.
    — Vous n’êtes plus sur vos terres de Carrère, messire. Preixan dépend du domaine de Puech, le mien ! Ici, c’est moi qui dicte la loi.
    « Le voici enfin, celui contre qui je devrais diriger ma hargne ! songe Touvenel, oubliant tout le reste. L’homme à qui je devrais couper le nez et les oreilles, crever les yeux et trancher la gorge. » Mais il reste assez lucide pour comprendre qu’il ne peut pas bouger. Il sait qu’au moindre geste les hommes d’armes de Gasquet seront sur lui, et qu’il n’est pas de force, avec une simple dague à la ceinture, à se battre contre eux. Constance profite de son silence pour l’invectiver :
    — Tu n’es qu’une bête sauvage, une brute, un rustre !
    À Guillaume de Gasquet, elle adresse un regard plein de mépris.
    — Va donc rejoindre tes frères en religion, toi ! Ceux qui ne savent que piller, violer et tuer. Ceux qui se cachent derrière vos sacrements sacrilèges.
    À un frémissement de Gasquet, Touvenel s’attend qu’il sorte de ses gonds et se déchaîne, appuyé par ses hommes. Constance sent aussi qu’elle vient d’en dire trop. Les villageois autour d’eux font déjà demi-tour et s’éloignent. Pourtant, contrairement à ce que tous redoutent, le seigneur de Puech reste d’un calme absolu et se contente d’afficher un sourire ambigu.
    — Belle nature, votre hérétique, seigneur de Touvenel ! S’il me venait à l’idée de la prendre sous ma protection, je saurais sûrement m’occuper d’elle mieux que vous, pour la faire taire ! Ou crier plus fort, c’est selon !
    Touvenel pâlit sous la moquerie. Il fixe Gasquet, qui le nargue. Une terrible chaleur lui monte au visage, envahit ses membres, le pousse à se ruer sur le violeur. Constance, qui a compris le danger, le prend par le bras.
    — Partons d’ici.
    Touvenel, d’une voix blanche, lance à Gasquet :
    — Nous parlerons de cela plus tard, mais d’homme à homme !
    — Quand tu voudras, Bertrand. Je suis ton serviteur !
    Sans répondre, Touvenel entraîne Constance, et fend avec elle le cercle des derniers curieux.
     
    Yasmina a attendu que son père se soit suffisamment éloigné. Elle s’est habillée, puis est sortie de la maison par le jardin de derrière. Elle sait où retrouver son amoureux. Elle traverse les champs nouvellement labourés, prend à droite le chemin du Renard, entre garrigue et rochers, vers le petit bois de châtaigniers en bordure de la forêt dense de Saint-Loup. Elle est déjà venue se promener avec Amaury dans cet endroit qu’on nomme le « Bois d’Amour ». Il l’a fait monter en croupe sur son cheval. Elle a passé ses bras autour de sa taille et posé sa tête contre son épaule. C’est là qu’il lui a offert un bouquet de bleuets, genou à terre. Elle l’a relevé et, pour la première fois, ils ont osé s’effleurer du bout des lèvres. Il lui a promis que, s’ils se perdaient un jour, ils se retrouveraient ici.
    Mais, aujourd’hui, elle a fait plusieurs fois le tour du bois, et Amaury n’y est pas. Sur le sol, d’inhabituelles traces fraîches de sabots l’inquiètent. Son trouble grandit, lorsqu’elle découvre parmi les broussailles un crucifix en fer au bout d’une chaîne rompue. Malgré sa frayeur, elle suit les traces des chevaux et s’enfonce dans l’ombre des futaies de hêtres et de chênes à peine pénétrées de quelques rayons de soleil. Tapie derrière le tronc d’un arbre, elle aperçoit des hommes aux tuniques blanches, crucifix sur la poitrine, attendant à visage découvert que d’autres viennent les rejoindre. Leur groupe formé en cercle

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