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L’ESPION DU PAPE

L’ESPION DU PAPE

Titel: L’ESPION DU PAPE Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Philippe Madral , François Migeat
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l’un de ses hommes d’armes, il ajoute :
    — Un croisé ami des cathares, qui se prétend le père d’une infidèle, et un faux moine à la peau couleur de soufre qui se livre à des pratiques magiques et criminelles, quel beau procès cela fera !
    À peine monté l’escalier de meunier et passé la trappe, Guillaume de Gasquet, sa bombe sous le bras, fait signe à son homme d’armes.
    — Suis-nous vers la coursive. Tu protégeras nos arrières.
    Après avoir traversé le magasin aux réserves et le cellier, il ne leur faut guère de temps pour gravir l’escalier de la coursive. De là, surplombant l’allée qui mène de la salle des convers à la grande cour, les trois hommes peuvent apercevoir la porte par où vont bientôt sortir l’évêque d’Osma, frère Dominique et Pierre de Castelnau, suivis de Philippe de Paunac et de ses Parfaits.
    — Tu barreras le passage ! commande Gasquet à son homme. Personne ne doit accéder ici, sauf mort. Toi, va chercher une lampe à huile, et apporte-la-moi, ordonne-t-il à Guiraud.
     
    Touvenel erre de nouveau dans l’espace sombre et sans repère qui semble lui être prédestiné, quand un brusque éclat de lumière vient frapper ses yeux. Tout autour de lui, des glaives se lèvent pour s’abattre sur son cou. « Je vais payer mes tueries, expier et rejoindre le monde invisible dirigé par le Dieu benignus , là où m’attend Esclarmonde et où me rejoindront Yasmina et Constance. » Pourtant, entrouvrant les paupières, il constate qu’il est toujours dans la salle où l’a fait enfermer Gasquet, et que les reflets sur les tranchants des épées ne sont que ceux de flambeaux sur les armes de trois gardes assis non loin de lui. Une main est en train de lui palper le cou en cherchant le battement de son artère. C’est celle d’un homme accroupi auprès de lui. Il reconnaît cette voix qui chuchote à ses oreilles :
    — Bienvenue au royaume des vivants, chevalier ! C’est le moment ou jamais de montrer que tu mérites ta réputation de vaillance ! Sinon, tu n’en auras plus jamais l’occasion.
    La conscience lui revient. Il distingue maintenant le moine troubadour, qui lui sourit et s’écarte. Il sent ses forces lui revenir. Il peut bouger, d’abord les bras, puis les jambes. Une douleur lancinante frappe ses tempes. Il porte la main à sa tête et fait effort pour se redresser. En jetant un regard autour de lui, il voit que Stranieri, à l’insu des gardes, fait un signe au petit homme jaune. Frère Yong se lève soudain et entame à leur intention une série de gestes effrénés et de mimiques alarmantes. Celui qui semble leur chef demande au moine :
    — Ça veut dire quoi, ça ?
    Stranieri fait mine de regarder interrogativement Yong, qui recommence les mêmes gestes paniqués en lui montrant la marmite sur le feu. Stranieri bondit sur ses pieds, l’air affolé lui aussi.
    — Il dit qu’il faut éteindre le feu, sous la marmite, vite ! Le produit qui y chauffe va exploser !
    — Reste à ta place ! tonne l’un des gardes. Je me méfie d’un mauvais tour, c’est moi qui vais le faire.
    À peine l’homme s’est-il approché du récipient, que Yong sort une pierre noire de sa poche et la lance dans la marmite. Une épaisse fumée s’en dégage et surprend le garde, aussitôt pris de suffocations. Yong s’empare de chiffons étalés sur une table à côté de ses instruments de travail, en applique un sur son visage et les autres sur ceux de Touvenel et de Stranieri. Les trois hommes se protégent comme ils peuvent des vapeurs intolérables, tandis que les trois gardes étouffent en se tordant par terre. En pleurs, les yeux irrités, Touvenel et Yong se ruent vers la trappe de sortie, suivis par Stranieri qui subtilise en passant une arme à l’un des gardes.
     
    — Nuages noirs au loin, promesse d’orage ! déclare Philippe de Paunac, en observant le ciel à sa sortie de la salle des convers.
    L’évêque d’Osma esquisse une moue désabusée.
    — Espérons que nous aurons terminé de débattre avant qu’il éclate.
     
    Du haut de la coursive, la bombe à la main, attendant que Guiraud revienne avec la lampe à huile qui lui permettra de l’allumer, le seigneur de Puech observe le cortège des cathares et des catholiques. Il le voit s’ébranler en silence et s’avancer lentement dans sa direction, en ordre impeccable.
     
    En tournant le coin du cloître, Stranieri, Yong et Touvenel, débarrassés des

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