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L'Etoffe du Juste

L'Etoffe du Juste

Titel: L'Etoffe du Juste Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Hervé Gagnon
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dire que ?...
    —    Que personne ne connaît précisément l’emplacement exact des deux parts, compléta-t-elle pour moi. La seule mission du Cancellarius Maximus est de mettre le Lucifer sur la piste de la part qu’il ne détient pas déjà. Rien de plus.
    —    Par de maudites paraboles... grommelai-je, contrarié.
    —    En lui transmettant des paroles que lui seul peut comprendre, corrigea-t-elle avec patience. Maintenant, agis, mon garçon. Le temps presse.
    Une voix puissante et ténébreuse retentit. Je tournai la tête et aperçus, un peu en retrait derrière la mendiante, Métatron, enveloppé dans une glorieuse lumière, qui m’adressait un regard noir de colère. Ni homme ni femme, il se tenait à quelques pas, un vent faisait virevolter ses longs cheveux lisses et sans couleur, et battre contre ses jambes sa robe immaculée cintrée d’or. L’archange s’avança vers moi et brandit la crosse dorée avec laquelle il m’avait marqué comme une vulgaire bête de somme.
    —    La vieille a raison, fulmina-t-il de cette voix que j’avais appris à craindre plus que tout.
    Malgré moi, je me mis à trembler comme une feuille au vent d’automne.
    —    Qu’attends-tu pour te lever et te remettre en marche, damné ? En ce moment même, continua-t-il, la seconde part de la Vérité est en danger, au milieu de ses ennemis ! Crois-tu qu’ils ne la cherchent pas ? C’est à Gisors qu’elle se trouve, et toi, tu restes là, à te complaire dans tes malheurs. Tu mériterais que je te ramène dès maintenant en enfer !
    Je me recroquevillai et ramenai mes genoux sous mon menton, tel un enfant apeuré.
    —    Non... gémis-je. Pas l’enfer...
    La vieille secoua la tête avec désapprobation et soupira d’impatience. Elle se retourna et lui adressa un regard de feu.
    —    Laisse-le donc tranquille, vilain ! gronda-t-elle. Il n’arrivera à rien s’il crève de peur ! Retourne d’où tu viens et fiche-lui la paix, oiseau de malheur !
    —Je suis Métatron ! tonna l’archange avec colère. Je porte la voix de Dieu et j’annonce sa volonté aux hommes ! Je gouverne la mort et le pardon ! Traite-moi avec le respect qui m’est dû ou encours ma colère !
    —    Tu ne peux rien contre moi, riposta la mendiante sur le même ton. Mon jugement a déjà été prononcé par Dieu. Va-t’en !

    Sans paraître craindre l’archange de quelque façon, auquel elle n’accorda plus d’attention, elle sourit et me caressa les cheveux avec une affection qui me rendit un peu de paix.
    —    Ne fais pas attention à lui, Gondemar, dit-elle. Il n’est qu’un paon gonflé de son propre orgueil. Il aime exhiber ses couleurs et se donner des airs, mais il n’est qu’un simple messager. Il ne peut rien sans l’autorisation de Dieu. Cesse d’avoir peur.
    Elle prit ma main blessée dans les siennes et la serra affectueusement en m’adressant un sourire compatissant.
    —    Pauvre enfant... soupira-t-elle. Personne ne mérite de souffrir autant.
    À son toucher, je sentis une fraîcheur bienfaisante pénétrer ma chair meurtrie. La douleur s’atténua, puis disparut tout à fait.
    —    Voilà, murmura-t-elle. Ça va mieux !
    —    Oui. Merci, grand-mère.
    Elle vrilla dans les miens des yeux d’un bleu de ciel qui voyaient à nouveau.
    —    Tu sais, Gondemar, Dieu châtie ceux qu’il aime.
    —    Ou ceux qu’il hait, rétorquai-je avec amertume.
    —    Y a-t-il vraiment une différence ? Dans un cas comme dans l’autre, il les éprouve. Ton âme a sans doute grand besoin de purification et il te donne l’occasion de te rapprocher de Sa Lumière. À toi de la saisir, même si la tâche est lourde.
    —    Je... je ne sais pas si j’en aurai la force, dis-je, des larmes s’échappant de mes yeux jusqu’à mouiller mes joues. J’ai fait tant de mal et je devrai en faire encore. Je suis si las.
    —    Un jour, tu auras l’étoffe du Juste, je te le promets.
    —    J’en doute, grand-mère...
    —    La Vérité est tissée de manière beaucoup plus subtile que tu ne l’imagines, Magister.
    —    À cause d’elle, Bertrand de Montbard est mort. Pernelle a souffert des martyres. J’ai perdu Cécile. J’en ai assez. L’enfer serait mieux que ma vie. Qu’on me permette enfin de mourir.
    Elle me prit la tête et la blottit contre sa poitrine pour me bercer comme un enfant. Je pleurai toutes les larmes de mon corps.
    —

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