Lettres - Tome II
votre règne. Joie et santé pour vous, excellent prince, voilà mes vœux d’homme privé et de magistrat.
II – C. PLINE À L’EMPEREUR TRAJAN.
Il le remercie de lui avoir accordé un privilège.
Je ne puis exprimer, seigneur, de quelle joie vous m’avez comblé en me jugeant digne du privilège réservé aux pères de trois enfants. Je sais que vous avez accordé cette grâce aux prières de Julius Servianus {91} , homme d’une rare probité et qui vous aime tendrement ; mais, je le devine aux termes du rescrit, vous avez cédé d’autant plus volontiers à sa demande, que j’en étais le bénéficiaire. Tous mes vœux sont donc exaucés, puisque dès le début de votre heureux principat vous me donnez la preuve d’une bienveillance particulière. Cette faveur redoublera mon désir d’avoir des enfants ; j’en ai souhaité sous le plus malheureux des règnes, ainsi que mes deux mariages peuvent vous en convaincre ; mais les dieux en ont mieux ordonné en réservant le champ libre à votre bonté. Ils ont préféré que je devinsse père dans un temps où je pourrais me promettre la sécurité et le bonheur.
III. – C. PLINE À L’EMPEREUR TRAJAN.
Il lui explique les motifs de sa conduite.
Du jour, seigneur, où votre bonté m’a promu à la préfecture du trésor de Saturne {92} , j’ai entièrement renoncé aux fonctions d’avocat, que d’ailleurs je n’ai jamais remplies qu’avec circonspection, pour me consacrer de toute mon âme à la charge qui m’était confiée. Aussi, des provinciaux m’ayant demandé au sénat pour avocat contre Marius Priscus, je sollicitai la permission de récuser cet office et je l’obtins. Mais ensuite le consul désigné ayant émis l’avis qu’il fallait demander à tous ceux, dont la récusation avait été acceptée, de se mettre à la disposition du sénat, et de souffrir que leurs noms fussent jetés dans l’urne avec les autres, j’ai cru que je devais, par égards pour la quiétude de votre règne, ne pas résister à la volonté, d’ailleurs si modérée, de cet ordre illustre. Puisse ma déférence vous paraître justifiée, car mon plus vif désir est que toutes mes actions et toutes mes paroles méritent l’approbation de votre parfaite sagesse.
III. b. – TRAJAN À PLINE.
Réponse approbative.
Vous avez accompli le devoir d’un bon citoyen et d’un bon sénateur, en accordant à l’ordre le plus élevé de l’état, la déférence, qu’il exigeait très justement. Quant à ce ministère, je suis certain que vous le remplirez avec toute la loyauté, à laquelle vous vous êtes engagé.
IV. – C. PLINE À L’EMPEREUR TRAJAN.
Il le prie d’admettre Voconius au nombre des sénateurs.
Votre bienveillance, excellent empereur, que vous m’accordez si entière, m’enhardit à vous demander des faveurs même pour mes amis, parmi lesquels Voconius Romanus {93} tient la première place. Dès notre âge le plus tendre nous avons été élevés ensemble et nous avons vécu dans une étroite intimité. Ces motifs m’avaient engagé à prier déjà votre auguste père de l’élever au rang de sénateur. Mais l’accomplissement de ce vœu a été réservé à votre bonté, parce que sa mère, qui avait déclaré par des codicilles, écrits à votre père, vouloir attribuer à son fils un don de quarante millions de sesterces, n’avait pas encore rempli toutes les prescriptions légales pour le lui assurer ; elle l’a fait depuis, sur mes conseils. En effet elle lui a fait une vente fictive {94} de biens fonds, et a accompli toutes les formalités exigées pour rendre la cession valable. Aujourd’hui qu’est levé l’obstacle qui tenait nos espérances en suspens, c’est avec une grande confiance que je me porte garant devant vous de l’honorabilité de mon cher Romanus. Elle est rehaussée encore par son goût des nobles études, par sa tendresse filiale si délicate, qui lui a valu la largesse de sa mère, dont je viens de parler, l’avantage de recueillir sur-le-champ la succession de son père, et la faveur d’être adopté par son beau-père. Ajoutez à ces mérites l’éclat de sa famille et des talents de son père. J’espère assez en votre bienveillance pour penser que mes prières donneront beaucoup de poids à ces raisons. Je vous prie donc, seigneur, de me mettre à même de lui adresser les félicitations qui sont le plus cher de mes désirs ; et, par votre condescendance
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