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L'hérétique

L'hérétique

Titel: L'hérétique Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Bernard Cornwell
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il
s’imaginait que mon père possédait le Graal.
    — Ton père le possédait ?
    — Je n’en sais rien, répondit l’Anglais honnêtement. Je
me dis qu’il a pu croire qu’il le possédait vraiment. Mais il était fou…
parfois.
    — Fou ?
    La question avait été posée très doucement.
    — Il n’adorait pas Dieu, mais l’affrontait. Il
l’implorait, pleurait, criait, hurlait vers Dieu. Il voyait la plupart des
choses très clairement, mais Dieu le troublait.
    — Et toi ? demanda Planchard.
    — Je suis un archer, répondit Thomas. Je dois tout voir très clairement.
    — Ton père a ouvert la porte de la maison de Dieu et il
a été ébloui, alors que toi tu laisses la porte fermée ?
    — Peut-être, rétorqua Thomas, sur la défensive.
    — Mais que comptes-tu faire, Thomas, si tu trouves le
Graal ?
    — La paix. Et la justice.
    Il n’avait pas prémédité sa réponse, mais elle était presque
une façon d’éluder la question de Planchard.
    — Un soldat qui cherche la paix… s’amusa l’abbé. Tu es
plein de contradictions. Tu as brûlé, tué et volé… pour faire la paix ?
    Il leva la main pour empêcher son interlocuteur de protester
et poursuivit sans presque avoir marqué de pause :
    — Je dois te dire, Thomas, que je pense qu’il vaudrait
mieux que le Graal ne soit jamais trouvé. Si je devais moi le découvrir, je le
jetterais dans la mer la plus profonde pour qu’il s’enfonce loin au milieu des
monstres et je n’en parlerais à personne. Mais si quelqu’un d’autre devait le
trouver, je crois qu’il ne serait guère plus qu’un trophée que des hommes
ambitieux s’arracheraient au cours de guerres sanguinaires. Des rois
combattraient pour se l’approprier. Des hommes comme toi mourraient à cause de
lui. Des églises en profiteraient pour s’enrichir en l’exhibant… Et, crois-moi,
ce n’est pas la paix qui en sortirait. Mais, après tout, je n’en sais rien.
Peut-être que c’est toi qui as raison… Peut-être que le retour du Graal
marquera l’aube d’une nouvelle ère d’abondance et de paix. Je prie pour que ce
soit le cas. Mais la découverte de la couronne d’épines n’a pas apporté de
telles splendeurs. Pourquoi le Graal devrait-il être plus puissant que la
couronne d’épines de notre cher Sauveur ? Nous avons des ampoules de Son
sang en Flandres et en Angleterre, mais elles n’ont pas amené la paix. Le Graal
est-il plus précieux que Son sang ?
    — Certains le pensent, répondit Thomas, mal à l’aise.
    — Et ceux-là tueront comme des bêtes pour le posséder,
commenta l’abbé. Ils tueront avec toute la pitié d’un loup s’attaquant
sauvagement à un agneau. Et tu me dis que le Graal devrait engendrer la
paix ?
    Le vieux religieux soupira.
    — Encore une fois, tu as peut-être raison, finalement.
Peut-être que le temps de retrouver le Graal est venu. Nous avons besoin d’un
miracle.
    — Pour apporter la paix ?
    Pendant un moment, Planchard demeura muet, les yeux perdus
sur les deux balayeurs, la tête dodelinant imperceptiblement. Ses traits
semblaient soudain empreints d’une extrême gravité et d’une tristesse
insondable.
    Enfin, il rompit son long silence :
    — Je n’ai parlé de ceci à personne, Thomas. Tu serais
sage de ne pas en parler davantage. Un jour ou l’autre, tout le monde saura, de
toute façon. Mais alors, il sera trop tard. Il y a peu, j’ai reçu une lettre
d’une maison sœur de Lombardie… Notre monde est sur le point de connaître un
bouleversement considérable.
    — À cause du Graal ?
    — J’aimerais qu’il en soit ainsi. Mais non, à cause
d’une peste qui vient de l’est. Une terrible contagion, un fléau qui se répand
comme un feu de prairie, qui tue tout ce qu’il touche et n’épargne personne.
C’est une peste, Thomas, qui a été envoyée pour nous faucher.
    Planchard fixait un point devant lui. Il regardait la
poussière danser dans un rayon de lumière solaire qui tombait obliquement de
l’une des hautes fenêtres.
    — Une telle épidémie ne peut être que l’œuvre du
diable, poursuivit l’abbé en se signant. Et c’est une œuvre terrifiante. Dans
sa lettre, le frère abbé m’a rapporté que dans certaines villes d’Ombrie plus
de la moitié de la population est morte, et il me conseille de fermer ma porte
et de ne laisser aucun voyageur pénétrer dans mon abbaye. Mais comment
pourrais-je le faire ? Nous devons aider nos prochains,

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