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L'Héritage des Cathares

L'Héritage des Cathares

Titel: L'Héritage des Cathares Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Hervé Gagnon
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dépassaient de sa pèlerine. Je notai que sa pointe saillait au bas du vêtement. Il s’agissait d’une arme très longue et, de ce que je pouvais en voir, l’acier en était parfaitement poli. Je pris ensuite conscience de l’arbalète attachée aux sacoches derrière la selle, de l’écu suspendu de l’autre côté, et d’une enveloppe de cuir de forme allongée qui ne pouvait que contenir une autre épée. Dans l’échancrure de sa pèlerine, j’aperçus le haut d’une cotte de mailles qui enserrait son cou. Cet étranger n’était pas un simple paysan, mais un guerrier.
    —    Sieur de Montbard, poursuivit mon père, voici mon fils Gondemar, dont je vous ai parlé.
    Instinctivement, je me méfiai de cet étranger. Il parut le sentir et releva aussitôt le défi. Posant sur moi un regard clair d’une rare intensité, il me parcourut de la tête aux pieds, m’évaluant avec une moue arrogante, comme on le fait pour un soldat
    - ou un adversaire. Jamais il n’inclina la tête, ni ne montra le respect qui m’était dû. Une lueur inquiétante traversa son œil valide.
    —    Quel âge avez-vous, jeune sire ? finit-il par demander d’une voix rocailleuse, avec un accent chantant que je n’arrivai pas à situer.
    —    Quatorze années faites, messire, répondis-je en relevant orgueilleusement le menton.
    —    Et vous vous prenez déjà pour un homme, on dirait. Mais vous me semblez solide pour votre âge. Vous ferez sans doute une recrue acceptable.
    Sans rien ajouter, il fit claquer ses rênes et son cheval se remit en marche, me laissant là, médusé.
    Je retournai au manoir pendant que mon père et l’étranger allaient mettre leurs montures à l’écurie. Quand ils ressortirent, je les observai alors qu’ils arpentaient le village, Montbard s’arrêtant souvent pour examiner quelque chose ou poser une question. Ce manège dura jusqu’à la tombée de la nuit. Lorsqu’ils entrèrent enfin, un feu ronflait dans la cheminée et la pièce était agréable. L’odeur alléchante du ragoût y flottait. Les deux hommes s’en approchèrent et se frottèrent les mains avec vigueur. Une fois réchauffé, mon père fit les présentations d’usage.
    —    Mon épouse, Nycaise, seigneuresse de Rossal. Nycaise, voici sire Bertrand de Montbard.
    —    Madame, fit Montbard en inclinant la tête avec galanterie.
    —    Sieur de Montbard, rétorqua ma mère, visiblement méfiante.
    Mon père s’installa à l’extrémité de la table et me fit signe de prendre ma place habituelle, à sa droite. À son invitation, l’étranger retira sa pèlerine, dévoilant la cotte de mailles que j’avais entrevue plus tôt. L’homme était un véritable roc. L’éton-nante musculature de ses épaules et de son dos ne pouvait qu’être le fruit de longues années à manipuler la lourde épée qu’il portait. Sa taille était épaisse, mais tout à fait dénuée de graisse. Ses cuisses, serrées dans des braies de tissu grossier, étaient massives comme des troncs d’arbres. Ses bras se gonflaient dès qu’il les pliait. Il semblait avoir été ciselé tout entier dans la pierre et je plaignais celui qui aurait l’idée de lui faire un mauvais parti.
    Montbard me surprit en train de le détailler et m’adressa à nouveau ce regard dur et froid qui me fit aussitôt baisser les yeux, intimidé. Moi qui avais décidé d’être un homme et qui avais déjà tué sans remords, je rougissais comme un garçonnet devant cet étranger. Il déposa le vêtement sur un banc puis déboucla le large ceinturon de cuir auquel étaient suspendues l’épée et une dague que je n’avais pas aperçue auparavant. Avec ce que je ne pouvais interpréter que comme un grand respect, il mit ses armes sur sa capeline et s’attabla à la gauche de mon père, face à moi. Les yeux écarquillés, ma mère le toisa, une écuelle d’étain entre les mains. Elle se reprit et, en bonne hôtesse, posa devant lui le ragoût fumant et un morceau de pain dur, sans toutefois réussir à détendre ses lèvres pincées par la désapprobation. Puis elle remplit son gobelet de vin. Solennel, il la remercia du chef. Après nous avoir servis, mon père et moi, Nycaise prépara sa propre portion et prit place à l’autre bout de la table, face à son époux. Montbard joignit les mains, pencha la tête et se recueillit.
    —    Benedic, Domine, nos et haec tua domina, quae de tua lar-gitate sumus sumpturi. Per Christum

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