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L'Impératrice indomptée

L'Impératrice indomptée

Titel: L'Impératrice indomptée Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Bertrand Meyer-Stabley
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réconciliation.
    Tout cela augure mal de l’avenir de l’héritier, broyant du noir, malheureux dans un mariage imposé, impuissant politiquement et étroitement surveillé par la police de son père. Élisabeth compatit. Pour elle, Rudi reste l’enfant sensible qui s’asseyait contre elle quand elle jouait au piano et chantait les lieder doux et pénétrants de Schubert. Plus il avance dans sa solitude morale, dans sa détresse presque physique, plus elle se sent maternelle, aimante. Même au loin, Sissi sait être une mère tendre quand il le faut. Elle retrouve ses angoisses inapaisées dans ce fils de son sang. Elle redoute de lui avoir transmis la rêverie douloureuse des Wittelsbach. Ainsi, elle n’est pas inattentive au cours tragique que la vie de son fils menace de prendre. Rodolphe ressemble à sa mère. Il est beau d’une façon irrésistible, intelligent et instruit. C’est un lettré, un linguiste. Mais ses préférences personnelles se portent sur des expéditions de chasse solitaires sans autre compagnon qu’un forestier taciturne. Il aime traquer les grands ours de Transylvanie. Il méprise les méthodes de son père, qui ne consent à tirer le gibier qu’après l’avoir fait rabattre. Du moment que l’animal n’a aucune chance de l’attaquer ni de se sauver, il n’a pas le goût de tirer. Dès l’enfance, il se plaît à rechercher la mort. Le pire est à venir.
    Une crainte d’autant plus fondée que la maladie mentale et la déchéance règnent chez leur cousin Louis II de Bavière. Avec une coupable imprévoyance, le roi a fini par s’endetter gravement. Ses goûts de luxe, la construction de ses châteaux, ses représentations privées absorbent chaque année beaucoup plus que les revenus de la Couronne. Loin de se borner, le roi, au contraire, a des désirs toujours plus coûteux. Un jour vient pourtant, où des créanciers inquiets se font exigeants. Ne recevant pas satisfaction, ils recourent au scandale. Grande humiliation pour le roi. Le 5 mai 1886, le Conseil des ministres rédige une adresse au roi. Il y supplie Sa Majesté d’arrêter le flot de ses dépenses, de penser au royaume et à la dynastie. Louis II entre dans une violente colère en recevant ces reproches. Et, en réponse à ses ministres, il leur fait savoir qu’il formera un cabinet à son goût, dont le président sera son coiffeur Hope, et les membres l’intendant Hesselschwerdt, des cuisiniers et des piqueurs.
    Sa perte est décidée. Ce n’est pourtant pas une opération facile à exécuter que la déposition d’un souverain. Il s’agit de prononcer une double incapacité, celle du roi, de son frère le prince Othon, et de transmettre la régence à leur oncle le prince Luitpold. Le premier soin du ministère est de déclarer que Louis II est atteint de folie, et, par conséquent, incapable d’exercer la souveraineté. À Munich, on est résolu à agir et à l’interner au plus vite. Un médecin escorté d’infirmiers s’empare de la personne du roi par force et le conduit sous bonne escorte au château de Berg. La résidence a été choisie parce qu’elle est beaucoup plus près de la capitale et donc plus facile à surveiller. Et aussi, assez bizarrement, dans l’espoir que la simplicité de ce pavillon exercera sur Louis II une bienfaisante influence.
    Mais on n’a pas pensé à tout. À Berg, il y a un lac. Et ce lac va apporter au royal prisonnier sa délivrance par la fuite ou par la mort. Il s’y noie un dimanche de Pentecôte, le 13 juin 1886, sans doute dans une tentative de fuite désespérée. C’est un choc pour Élisabeth : cette mort dramatique, le suicide de son grand ami. Le roi Louis II de Bavière, trouvé noyé dans le lac d’un de ses châteaux voisin de l’endroit où elle a vu le jour, où s’est écoulée son enfance. Ce drame horrible la plonge dans l’abattement, la consternation.
    Élisabeth est en Bavière au moment du drame. C’est voilée qu’elle vient au château de Berg rendre un dernier hommage à la dépouille de son cousin. Elle est malade lorsqu’elle arrive vêtue de deuil à Gastein. « Nous fûmes effrayés de sa pâleur, écrit un témoin, et de la souffrance que trahissait son visage. » Rien ne peut la distraire. François-Joseph vient la rejoindre. Élisabeth ne soutient qu’avec peine son rôle d’impératrice. Partout la poursuit l’image du mort, « l’expression de douleur et d’ironie » que le « vainqueur de la

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