Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
L’Inconnue de Birobidjan

L’Inconnue de Birobidjan

Titel: L’Inconnue de Birobidjan Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: MAREK HALTER
Vom Netzwerk:
enfantée. »
    Pas une jalousie sans raisons !
    Tu me tues, Iossif ! Tu es un boucher ! Tu me tortures, tu tortures le monde entier…
    Elle ferma les yeux. Rêva encore d’une magie qui l’extirperait du Kremlin pour la déposer dans sa chambre en un clin d’œil. Si seulement cela pouvait arriver !
    Elle ignorait l’heure. Elle n’avait pas de montre, et lui, s’il en avait une, elle n’était pas à son poignet. On ne devaitplus être loin de l’aube. Elle devait tenir jusqu’au matin. Tenir encore quelques heures et puis, qui sait, peut-être deviendrait-elle la reine du théâtre ?
    Â 
    Le bruit des voix dans le couloir les réveilla à la même seconde. Finalement, elle s’était endormie. Staline se dressa sur un coude. La surprise de la découvrir nue contre lui ne demeura sur ses traits qu’une ou deux secondes. Marina évita son regard, s’assit en refermant ses bras sur ses seins. L’air de la salle était lourd, désagréable à respirer.
    Les voix enflaient derrière la porte. Des voix d’hommes, des voix de femmes. Avec des pointes aiguës, impatientes, suivies de murmures. Impossible de comprendre ce qu’elles disaient.
    Staline se passa la main dans les cheveux et s’assit sur le divan à son tour. Elle s’écarta pour lui laisser plus de place. Il ne chercha pas à la toucher ni même à lui parler. Il ramassa ses vêtements sur le sol, son pantalon, sa tunique. Il se mit debout pour se rhabiller.
    Dehors, les voix continuaient à bourdonner. Marina trouva sa robe et sa culotte. Elle les enfila tandis que Staline tirait un peigne de sa vareuse et se recoiffait soigneusement. Du plat de la main, il s’assura qu’aucune mèche ne dépassait. Elle cherchait encore ses chaussures quand il marcha vers la sortie. Il ne se souciait pas d’elle. On aurait dit qu’elle était devenue transparente. Une ombre dans l’ombre.
    Quand Staline ouvrit la porte, les voix se turent aussitôt. La lumière du couloir éblouit l’écran. Une voix de femme s’écria : « Iossif ! Oh, Iossif Vissarionovitch ! »
    Marina l’entendit qui grognait, demandait ce qu’il se passait. Agenouillée sur le tapis, elle avait enfin trouvé ses chaussures sous un siège. Sa tête bourdonnait. Des petits coups frappaient ses tempes, lui rappelant la vodka bue durant la nuit.
    Dans le couloir, la voix de Staline domina celles des autres. Il posait des questions que Marina ne comprenait pas. Il semblait aussi que personne ne répondait.
    Elle se rendit compte que ses doigts tremblaient. Peut-être commençait-elle à avoir peur. Elle s’assit par terre pour enfiler ses souliers. Elle avait mal partout. Son dos, sa nuque, ses fesses, ses reins. Comme si elle était tombée de haut et avait roulé sur des cailloux.
    Dans le couloir, plus personne ne parlait ni ne criait. Seulement le bruit des pas qui résonnaient en s’éloignant. Ils levaient le camp sans se soucier d’elle ! Qu’est-ce qu’elle devait faire, à présent ? Et sa cape qui était restée dans l’appartement des Vorochilov !
    Elle se releva à l’instant où une silhouette pénétrait dans la salle. Elle la reconnut dès qu’elle se profila sur le reflet de l’écran.
    â€” Galia !
    â€” Chuuutt ! Tais-toi !
    Egorova se précipita vers elle, chuchotant :
    â€” Vite, Marinotchka ! Il ne faut pas traîner ici.
    â€” Qu’est-ce qu’il y a ? Que se passe-t-il ?
    â€” Plus tard, plus tard !
    Egorova était sans maquillage. Les traits tirés, un foulard lui couvrant les cheveux. Elle était enveloppée dans une grosse cape ordinaire. Elle l’écarta pour en sortir celle de Marina roulée en boule.
    â€” Enfile ça, dépêche-toi
    â€” Mais…
    â€” Tais-toi. Pas maintenant… Viens !
    Elle s’assura que le passage était vide avant de la pousser hors de la salle de cinéma. Comme la veille, à leur arrivée, elles s’enfoncèrent dans le labyrinthe des corridors. Cette fois, Egorova prit soin d’éviter les soldats de garde. Elles empruntèrent des couloirs de service sans lumière. Egorova avait attrapé la main de Marina et ne la

Weitere Kostenlose Bücher