L’Inconnue de Birobidjan
des comies , des espions communistes masqués, capables de livrer le pays à Staline.
Il y eut alors un premier miracle. Chambers déposa devant lâHUAC une épaisse liste de documents confidentiels provenant du bureau de Hiss. Il affirma que Hiss lui-même les lui avait fournis. Hiss protesta. Chambers à nouveau nâavait aucune preuve.
Alors il y eut un second miracle. Quatre mois plus tard, Chambers conduisit le FBI dans une ferme que possédait Hiss dans le Maryland. Ils « trouvèrent » là cinq rouleauxde pellicules dissimulés dans une citrouille. Le FBI et la Commission affirmèrent que ces photos étaient celles de documents classifiés du Département dâÃtat. à ce jour, personne nâa pu le vérifier. à lâexception dâune page aussi anodine que le bottin du téléphone, les photos ne furent jamais produites. Le jour même où Nixon exhiba ces rouleaux de pellicule devant la presse, ils disparurent dans les coffres du FBI.
Un ultime miracle acheva le tour de passe-passe. Le FBI « découvrit » soudain une vieille machine appartenant à Hiss. Un coup de chance : câétait celle avec laquelle il était censé avoir copié les documents sensiblesâ¦
Truman en personne dénonça la farce . Depuis janvier dernier Hiss était derrière les barreaux. Nixon et McCarthy se sentaient pousser des ailes. Des ailes de vautours affamés. Il leur fallait une victime pour un nouveau numéro de magie ! Marina était parfaite pour le rôle. Sans le savoir, elle comblait leurs rêves les plus fous.
T. C. but une nouvelle gorgée de bourbon.
â Je vous écoute, Al. Racontez-moi lâaudience dâaujour-dâhui. En détail.
Jâessayai de ne rien oublier. Jâinsistai sur le comportement de McCarthy et jâajoutai ce que Shirley mâavait confié un peu plus tôt, cette réunion dans le bureau de Wood avant lâaudience et les coups de téléphone passés au FBI et au CID.
Quand jâen eus fini, le crépuscule approchait doucement. On était dans les longs jours du solstice. La nuit allait prendre son temps, mais les reflets du Potomac étaient déjà aussi opaques que mon humeur. T. C. leva un sourcil étonné.
â Jamais entendu parler de ce Birobidjan.
Je lui répétai ce que Sam Vasberg mâen avait appris la veille au téléphone.
â Jâen saurai plus demain, après lâintervention de lâanalyste de la CIA.
â Sâils vous laissent lâentendreâ¦
â Pour lâinstant, je fais encore partie de la fête.
T. C. opina. Il se désintéressait déjà de la question. Autre chose le tracassait. Je craignais de comprendre quoi.
â Al, je vais être sincère avec vous. Que Nixon, McCarthy et la clique de lâHUAC soient des salopards, nous sommes dâaccord. On sait de quoi ils sont capables. Ãa ne signifie pas que les Soviétiques soient des anges ou que Staline nâait pas semé quelques grandes oreilles dans le pays. Votre Russe pourrait très bien en être une. Noyer le poisson dans des discours fleuves est un truc assez courant chez les espions. Les vrais. Ceux qui sont formés en pro.
â Une drôle de formation. Je ne vois pas comment elle sâen sortira avec çaâ¦
â Précisément, Al. Câest lâastuce. On ne voit pas, et quand on voit, il est trop tard.
Je ne répondis pas. T. C. pouvait avoir raison ou se tromper. Il nâavait pas vu Marina raconter. Ãa faisait une différence de taille entre nous, mais ne résolvait pas la question.
Comme le silence se prolongeait, jâallumai une nouvelle cigarette. T. C. me gratifia de son bizarre sourire. Je devais avoir lâair dâun type ayant besoin dâencouragements.
â Je vous écoute, dis-je en soufflant la fumée.
â Pour ce dossier qui vous turlupine, jâai peut-être une idée. La rumeur court ces jours-ci que le FBI est sur une piste sérieuse concernant lâaffaire de Los Alamosâ¦
Lâaffaire de Los Alamos , ce nâétait rien moins que le vol des secrets de fabrication de la bombe atomique par Staline. Lâété précédent, les Soviétiques avaient fait sauter leur première bombe, Joe 1 . On ne savait rien de sa véritable
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