Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
L’Inconnue de Birobidjan

L’Inconnue de Birobidjan

Titel: L’Inconnue de Birobidjan Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: MAREK HALTER
Vom Netzwerk:
dos, la porte d’entrée des visiteurs s’était ouverte sans que je m’en rende compte. Une autre surveillante s’y tenait.
    â€” Qu’est-ce qu’elle raconte ?
    â€” C’est une expression yiddish, dis-je en récupérant mon chapeau. Ça signifie que la chance va peut-être tourner.
    â€” Yiddish ? Le charabia des Juifs ?
    â€” Je crois bien, oui.
    Ã‡a n’a pas eu l’air de lui plaire.
    Â 
    L’homme de la CIA convoqué par Cohn était irlandais. Petit et grassouillet, la quarantaine, un visage de rouquin. Pas du tout le genre d’espion à l’œuvre dans les films d’Hollywood. Une serviette de cuir sous le bras, il pénétra dans la salle d’audience et fixa Marina avec l’excitation d’un gosse devant la cage d’un singe. Elle ne lui accorda pas un regard. Pas plus qu’elle ne m’en avait accordé un lorsque les flics l’avaient conduite jusqu’à son siège. Nul n’aurait pu deviner notre rencontre dans le parloir de l’Old County Jail trois heures plus tôt.
    J’avais à peine eu le temps de passer une heure chez moi afin de noter ce qu’elle m’avait raconté avant de rejoindre le Sénat. La femme qui était maintenant devant nous n’avait rien à voir avec la prisonnière épuisée que j’avais tirée de sa cellule. J’avais envie de croire que ma visite à la prison l’avait requinquée. Elle avait fait son apparition en robe d’été verte, le buste recouvert d’un caraco blanc. Une fois débarrassée de ses menottes, elle avait ôté le caraco, dévoilant ses bras nus et le col de sa robe, si droit qu’il offrait à peine une échancrure sur la poitrine. Une robe parfaite pour la circonstance. Sage mais enserrant suffisamment sa taille et sa poitrine pour que ces messieurs de la Commission ne perdent rien de sa sensualité. On aurait cru qu’elle l’avait déjà portée cent fois. Elle s’était aussi maquillée discrètement. L’ombre du mascara soulignait le bleu de ses iris. Ses lèvresavaient perdu cette pâleur crayeuse que je leur avais vue un peu plus tôt.
    Shirley s’était retournée pour m’adresser un clin d’œil. Elle pouvait être fière de son choix. J’espérais cependant que Cohn, Wood et la clique de la Commission ne possédaient pas assez de jugeote pour se demander à qui leur témoin devait cette nouvelle apparence.
    De toute évidence, c’était le cas. L’Irlandais de la CIA les intéressait davantage que les nouvelles robes de Marina Andreïeva Gousseïev. Dès qu’elle fut assise, Wood joua de son marteau. L’audition reprit. Plus play-boy que jamais, mèche gominée et costume de chintz gris souris, Cohn salua amicalement son témoin :
    â€” Pouvez-vous donner votre nom et profession à la Commission ?
    â€” Roy Markus O’Neal. Analyste stratégique à la CIA.
    â€” Vous avez conscience que vous déposez sous serment ?
    â€” Oui, monsieur. Dans la limite de ce qui m’est autorisé.
    â€” Cela va de soi. Avez-vous connaissance, de par vos fonctions, d’une région ou d’un État de l’Union soviétique dénommé le Birobidjan ?
    L’Irlandais tira quelques fiches de sa serviette. Il les consulta en opinant.
    â€” Oui, monsieur, cette région existe. L’oblast autonome juif de Birobidjan, comme l’appellent les Soviétiques. La capitale s’appelle aussi Birobidjan. Une région à peine plus grande que le Massachusetts. Elle borde le fleuve Amour qui trace la frontière entre l’URSS et la Mandchourie. Non loin de Harbin, la capitale mandchoue. À peu près à trois ou quatre cents kilomètres, selon les routes.
    O’Neal adressa un sourire narquois aux membres de la Commission.
    â€” Je suppose que vous n’êtes pas familiarisés avec la géographie de ce coin du globe. On est à moins de cinq cents kilomètres à vol d’oiseau des côtes du Pacifique, huit cents de l’île japonaise d’Hokkaidō. Donc très loin de Moscou.Huit ou neuf mille kilomètres. Et ce n’est pas un paradis. Il faut vraiment avoir envie d’aller là. Faut imaginer la taïga sibérienne, les

Weitere Kostenlose Bücher