Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
L'Insoumise du Roi-Soleil

L'Insoumise du Roi-Soleil

Titel: L'Insoumise du Roi-Soleil Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Michel Riou
Vom Netzwerk:
Ne m’apprenez rien, monsieur le comte, reprit Mortureaux les dents serrées. Je sais ce qu’il en est de la fidélité au roi. Je n’en dirais pas autant de vous.
    D’un coup, le visage de mon père devint blanc :
    — Précisez votre pensée, Mortureaux. Soyez vif, précis et clair. Et je le dis dans votre intérêt.
    — Je ne crains rien de vous. Je dis ce qui est : vous défendez ces schismatiques, vous faites le lit des protestants. Et vous devez même coucher dedans, puisque vous aimez tant les femmes, donc les leurs... Moi, je suis fidèle à Dieu !
    — Tout doux, Mortureaux. Un mot de plus et je vous envoie devant Lui.
    — Je ne crains pas son jugement !
    — En êtes-vous certain ?
    — Ah ! ça, monsieur ! À votre tour, expliquez-vous !
    — Êtes-vous fidèle à Ses commandements ?
    — Voilà que vous continuez à me déshonorer !
    — Tu aimeras ton prochain comme toi-même. Le faites-vous ? Répondez !
    — Vous n’êtes pas directeur de conscience, Montbellay. Je n’ai rien à vous dire.
    — Moi, je respecte Dieu en aimant mon prochain. En défendant la tolérance, je Lui suis fidèle. En respectant l’édit de Nantes, je respecte Sa loi. En cherchant à vivre en harmonie avec mon prochain, même avec vous – et que c’est dur ! – je suis fidèle à Dieu...
    — Taisez-vous, mécréant ! Vous assassinez notre foi.
    — Nous croyons tous dans le même Dieu, intervint Pelletier, pour essayer de calmer les esprits. Nous sommes tous Ses enfants...
    — Non ! hurla Mortureaux. Vous voulez tuer Dieu et Dieu vous a déjà punis. Vous êtes excommuniés. Bientôt, vous serez punis et chassés pour vos fautes !
    — Comment osez-vous parler de bannissement sur mes propres terres ? s’enflamma mon père.
    — Je sais ce qui se prépare, ricana Mortureaux. Et vous aussi, Montbellay, vous tomberez pour votre esprit trop large et libertaire. Vos propos en disent assez sur vos opinions. Bientôt, vous forniquerez avec les idées de nos ennemis !
    Fort de sa diatribe, le comte de Mortureaux lui tourna brutalement le dos et leva un poing vers le ciel. À ce signal, il y eut aussitôt un mouvement parmi l’assemblée. Et les catholiques le suivirent comme un seul homme. J’aperçus mon cousin, Antoine de Beaupont, jeter un regard triste vers ma fenêtre. Son père le rappela prestement à l’ordre. Il lui obéit sur-le-champ. En quelques minutes, et dans un terrible silence, la cour d’honneur se vida d’une bonne moitié de ses occupants.
    Jacques Pelletier s’avança vers mon père :
    — Tout est de notre faute. Nous n’aurions pas dû venir...
    Mon père le prit chaleureusement aux épaules et, levant le nez, aspira l’air de la façon la plus sérieuse :
    — Mortureaux se trompe, vous ne puez pas... vous. Faudrait-il en conclure que tout ce qu’il affirme est faux...
    Pelletier sourit ; pourtant ses yeux étaient tristes.
    — Vous êtes bon et généreux, monsieur le comte. Et par notre faute, vous voilà fâché avec ce puissant seigneur.
    — Il y a longtemps que sa vue me fatiguait autant que ses idées. Bon débarras !
    — Vos paroles sont justes, mais un conseil : vous les prononcez trop haut. Un jour, vous risquez, je le crains, d’en payer le prix fort...
    — Croyez-vous pouvoir mettre fin à l’injustice qui vous touche en vous taisant ?
    — Nous agissons déjà. Nous faisons tout pour nous défendre. Nous irons voir le roi pour plaider notre cause, si besoin. Nous utiliserons tous les recours pour faire entendre la voix de notre église.
    — Votre quête est difficile, mon ami. J’entends partout que les protestants sont en danger.
    — Eh bien, murmura Pelletier, il nous faudra peut-être quitter la France...
    — Je me battrai à vos côtés...
    — Vous épuiseriez votre vie pour une cause qui n’est pas la vôtre ?
    — La tolérance et la liberté n’ont pas de camp. C’est une règle universelle.
    — Un jour, si vous souffrez trop pour avoir défendu ces nobles idées, vous trouverez un asile auprès de nous.
    — Je n’en aurai pas besoin. Mais je vous en remercie.
    Jacques Pelletier souffla lourdement. Il semblait d’un coup épuisé.
    — Je crois qu’il nous faut vous quitter. Oui, je crois que c’est mieux pour vous et pour nous.
    — Si vous partez, vous donnerez raison aux partisans de Mortureaux.
    — Et si nous restons, vous deviendrez leur ennemi. C’est un tort que je ne peux vous faire subir.
    — Choisissez vous-même. La liberté de

Weitere Kostenlose Bücher