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Lionel Lincoln (Le Siège de Boston)

Titel: Lionel Lincoln (Le Siège de Boston) Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: James Fenimore Cooper
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la ville de Boston, Beacon-Hill s’élevait comme une pyramide imposante, sur laquelle on voyait des milliers de têtes tournées toutes vers l’endroit fatal, tandis qu’une foule d’autres spectateurs étaient suspendus aux cordages des vaisseaux, ou étaient montés sur des corniches, sur des coupoles ou des clochers, souvent même au péril de leur vie, tant l’intérêt qu’ils prenaient à ce spectacle absorbait tout autre sentiment ! Les vaisseaux de guerre étaient entrés fort avant dans ces bras de mer étroits qui formaient la péninsule, et envoyaient sans relâche leurs bordées meurtrières à travers le passage qui seul offrait des moyens de communication entre les braves Américains qui occupaient la colline, et leurs compatriotes éloignés. Tandis que les bataillons anglais débarquaient l’un après l’autre dans la plaine, des boulets lancés par les batteries de Copp’s-Hill et par les vaisseaux venaient frapper sur le glacis naturel qui entourait la redoute, ou, rasant le parapet, allaient s’ensevelir dans les flancs du rocher qui s’élevait à plus de cinquante toises par derrière, tandis que des bombes noires et fumantes semblaient rester quelque temps suspendues au-dessus de la colline comme si elles s’arrêtaient pour choisir l’endroit où elles devaient éclater.
    Malgré ces préparatifs terribles et ces premières attaques qui avaient duré pendant tout le cours de cette longue matinée, les intrépides paysans ne s’étaient pas ralentis un seul instant dans leurs efforts pour se maintenir jusqu’à la dernière extrémité dans le poste qu’ils avaient osé prendre avec tant d’audace. En vain les Anglais épuisèrent tous les moyens pour les forcer à lâcher prise et à se retirer : les braves colons entendaient sans sourciller leurs boulets qui sifflaient sur leurs têtes, et n’en poussaient pas moins vivement les travaux. La pioche et la bêche ne restaient pas oisives, et malgré la canonnade, les paysans montraient le même sang-froid que s’ils se livraient à leurs occupations ordinaires. Ce n’était pas ce sang-froid du soldat, fruit de l’habitude et que l’âme la plus commune peut acquérir. Ignorant l’éclat des uniformes militaires, couverts des vêtements simples et grossiers de leur profession, n’ayant d’autres armes que celles qu’ils avaient détachées du manteau de leurs cheminées où elles étaient suspendues, sans même une bannière qu’ils pussent planter sur leur redoute, et dont la vue servît à les animer, ils étaient inébranlables à leur poste, soutenus seulement par la justice de leur cause, et par ces principes profondément enracinés dans leurs cœurs, qu’ils avaient reçus de leurs pères, et qu’ils voulaient soutenir dans cette journée pour les transmettre intacts à leurs enfants. On sut ensuite que leurs peines et leurs fatigues avaient été bien plus grandes encore qu’on n’avait d’abord pu se l’imaginer, et qu’ils étaient privés de ces aliments nécessaires à l’homme pour soutenir son courage même dans les moments de calme et de tranquillité, tandis que leurs ennemis, en attendant l’arrivée de tous leurs renforts, faisaient tranquillement un repas qui, pour un grand nombre d’entre eux, devait être le dernier.
    Bientôt l’instant fatal parut approcher. Les barques en retard étaient arrivées amenant le reste des troupes. Des officiers couraient de régiment en régiment porter les derniers ordres de leur chef. Il s’opéra un mouvement général parmi les bataillons anglais, qui commencèrent à s’étendre le long de la côte, à couvert sous le penchant de la colline. Dans ce moment un corps d’Américains parut sur le sommet de Bunker-Hill, et descendant légèrement le long de la route, disparut dans les prairies à gauche de la redoute de leurs compatriotes. Ce détachement fut suivi de plusieurs autres qui traversèrent également le passage étroit, en bravant le feu de vaisseaux, et qui s’empressèrent aussi d’aller rejoindre leurs camarades au bas de la colline. Le général anglais se détermina aussitôt à prévenir l’arrivée de nouveaux renforts, et l’ordre impatiemment attendu de se préparer à l’attaque fut donné sur toute la ligne.

CHAPITRE XVI
    La superbe Bretagne ne trouva sur le champ de bataille, trop bien disputé, aucun motif de joie et de triomphe ; mais elle vit avec douleur la vanité de ses rêves de conquêtes, et sentit cruellement

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