L'or de Poséidon
d’amandes traditionnels.
— Salut, Falco ! dit-il en me voyant appuyé au mur comme un balai abandonné.
Puis il eut l’air mal à l’aise. Personne, parmi les membres du personnel, ne savait exactement comment me traiter. Lors de mes premières visites, je m’étais bien gardé de mentionner mes liens de parenté avec Geminus. Maintenant ils étaient au courant, mais il leur était facile de constater que je n’entretenais pas avec lui le genre de relation que Festus. Personne ne pouvait leur en vouloir de ne pas y comprendre grand-chose – moi-même j’étais loin de savoir où j’en étais.
Puisque je n’étais pas un client, le garçon parut éprouver des doutes au sujet du vin. Mon père mit un terme à son dilemme en se saisissant du flacon. Il ne lui restait plus qu’à poser son plateau.
— Un capitaine de la garde que tu connais est venu te demander, Falco. Il y a un juge qui veut te parler.
Surpris, j’avalai trop vite les amandes que je venais de me fourrer dans la bouche et faillis m’étrangler. Geminus adopta cet air du père que rien ne peut plus surprendre, mais attendit le départ du garçon avant de s’exprimer :
— Est-ce que ça aurait quelque chose à voir avec le petit incident chez Flora ?
— Dois-je en conclure que tu connais cette gargote ?
Il me parut soudain un peu narquois. Cette caupona était trop près de chez ma mère pour qu’il la fréquente.
— Il m’est arrivé d’y aller.
Puisque Flora n’existait que depuis onze ou douze ans, il y était donc venu après son retour de Capoue. Il est vrai que c’était quasiment devenu le quartier général de Festus.
— Helena m’a prévenu que tu étais en mauvaise posture. J’ai l’impression que Petronius ne va pas tarder à t’arrêter.
— Il m’a donné un peu de temps, déclarai-je, sur le ton d’un homme du monde poursuivi par son tailleur qui lui a fait une nouvelle cape et a l’audace de vouloir se faire payer.
— Vraiment ? Je dispose d’une certaine influence, tu sais.
— Ne te mêle pas de ça.
— D’après ce que j’ai cru comprendre, tu ne vas pas tarder à avoir besoin d’une caution.
— On ne va pas en arriver là.
— Espérons-le.
Tout se passait comme à l’accoutumée. Il se mettait à me détester et j’en étais ravi.
— N’oublie pas de me faire savoir quand nous allons devoir venir au tribunal pour applaudir, pendant que ces salauds vont te condamner !
Je restai silencieux tandis qu’il versait du vin dans nos coupes. Il posa la mienne près de moi sur une étagère, et je fis mine de ne pas vouloir y toucher.
— Oh, assieds-toi un peu sur ta fierté et bois ! C’est pas la première fois qu’on se trouve dans ce genre de situation : tu es dans la merde et tu ne veux pas d’aide, surtout pas de moi…
— Eh bien, tu te trompes ! hurlai-je. Je veux ton aide, mais je sais que tu vas me la refuser. Au nom d’Hadès, je tiens à savoir le fin mot de cette histoire avec Festus !
— Assieds-toi et calme-toi. Tu n’es pas dans l’un de tes bouges habituels.
Je refusai de m’asseoir, mais me forçai à contrôler ma voix.
— Il me paraît évident que notre fameux héros a monté une opération commerciale d’envergure avant de tomber au champ d’honneur à Béthel. Et je parierais n’importe quoi que tu étais dans le coup avec lui. Mais jusqu’à présent, tu as cru que les répercussions de cette affaire foireuse ne se feraient pas ressentir à Rome.
— Ça n’avait rien à voir avec moi.
— Alors, je ne vois pas ce qui peut t’empêcher de m’en parler ! Nous devons tous faire face à la vérité, affirmai-je, grandiloquent. La Quinzième a été retirée du théâtre des opérations, et tous ceux à qui nous devons de l’argent se débrouillent à obtenir des permissions pour venir nous le réclamer. En outre, pour arranger les choses, il y en a un qui vient de se faire trucider. Un autre ne va pas tarder à venir aux nouvelles, c’est certain.
Affichant une expression maussade, mon père n’en inclina pas moins la tête. Sur ce point-là du moins, il était apparemment d’accord avec moi.
— Celui qui a poignardé Censorinus l’a peut-être rencontré par hasard, mais il peut tout aussi bien être dans le coup. Si c’est le cas, je n’ai pas envie de le rencontrer dans un coin sombre. Surtout s’il fait partie d’une bande. Quelqu’un a dû marcher dans une grosse bouse, il y a un certain
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