L'Orient à feu et à sang
cheveux longs et noirs tombèrent en cascade sur ses épaules. « Père-de-Tout, son corps est fait pour être pressé contre celui d’un homme. »
Ballista connaissait suffisamment les Orientaux pour s’abstenir d’adresser la parole à la jeune femme en premier. Il les connaissait suffisamment pour ne pas demander de but en blanc à son père la raison de sa visite.
— Vos hommes ont fait du bon travail, Iarhai, du très bon travail.
— Merci. C’est en partie pour cela que je voulais vous parler.
Ballista acquiesça de la tête et le synodiarque continua.
— Ils ont subi de lourdes pertes. Il ne reste que cent cinquante des trois cents mercenaires et cent hommes parmi les conscrits sont morts. J’aimerais votre autorisation pour recruter cent autres civils. Ils pourraient être postés sur la muraille sud, qui est en général plus calme, le temps de recevoir leur entraînement.
— Oui, j’ai pensé que quelque chose de similaire allait bientôt s’avérer nécessaire. Je pense que vous devriez en recruter plus, disons deux cents. Si les hommes libres se font trop rares, nous pourrions offrir leur liberté à des esclaves en état de combattre.
— Les autres protecteurs de caravanes, Anamu et Ogelos, n’aimeront pas cela.
— Certes, mais comme leurs troupes ne défendaient pas la muraille ouest, elles n’ont pas subi de pertes comparables.
— Je leur soumettrai cette idée ; je n’ai aucun désir de les offusquer.
Calgacus apporta la nourriture et le vin. Ballista but une gorgée de sa coupe, pensant aux dernières paroles d’Iarhai. Ce n’était pas seulement son apparence qui avait changé.
Iarhai, toujours debout, leva sa coupe dans sa direction.
— Mes félicitations pour la destruction de la rampe de siège perse. C’était un coup de maître.
Ballista hocha la tête en remerciement et Iarhai continua.
— Les défenses tiennent. L’écroulement de la rampe a été un tournant. Désormais, le danger est moindre.
Ballista soupira intérieurement. Iarhai, pas plus que lui-même, ne pouvait croire que le danger était passé. Le synodiarque était tout à fait conscient de l’existence de la mine perse sur le flanc du ravin, de la possibilité d’un autre assaut général, de la menace toujours présente d’une trahison.
— Je pense que la route est encore longue avant que nous soyons en sécurité.
Ballista sourit, tentant d’atténuer ce qu’il pouvait y avoir de blessant pour son hôte à être contredit.
Il y eut courte pause tandis que tous buvaient.
— Les choses se passent bien à l’est. Vous avez pris de bonnes dispositions en ce qui concerne la pêche.
Comme les Perses ne s’étaient plus risqués à attaquer par le fleuve depuis leur échec cinglant, Ballista avait autorisé quelques bateaux de pêche à sortir, sous strict contrôle militaire. Au moins un légionnaire basé à la Porta Aquaria les accompagnait. Les dix légionnaires qui avaient convoyé le grain depuis Circesium s’étaient avérés utiles, après tout.
— Oui, le mulet et l’anguille changent de l’ordinaire, dit Ballista.
Il se demandait où tout cela menait. Iarhai avait montré sa loyauté en parlant de ses soldats, puis il avait prétendu que le danger était passé et maintenant il parlait du fleuve. Ballista but une autre gorgée. Lorsqu’il avait connu Iarhai, il l’avait trouvé étonnamment direct pour un Oriental. Bien des choses avaient changé depuis.
Un muscle se contracta sous la pommette cassée d’Iarhai.
— Je possède quelques-uns des bateaux.
Son regard s’attarda de l’autre côté du fleuve, vers la nuit qui tombait sur la Mésopotamie.
— L’un deux s’appelle l’ Isis.
Il prononça le nom de la déesse avec une certaine répugnance.
— Il est assez gros pour un bateau de pêche, avec des bancs de nage pour dix rameurs. Avant les événements, je m’en servais pour des promenades d’agrément en amont du fleuve : pêche, chasse ; nous poussions parfois jusqu’à Circesium.
— Tout le monde à l’ouest pense qu’il est impossible de remonter l’Euphrate en bateau à cause de la force du courant, dit Ballista.
Il regarda Bathshiba. Elle se tenait immobile, son visage ne trahissait rien.
— Le courant est fort, c’est vrai. En général, on rame sur de courtes distances, puis on accoste. Remonter la mère de toutes les rivières est difficile, mais faisable. Cela ne serait pas dans l’intérêt du commerce
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