L'ultime prophétie
tenaient derrière
lui.
— Vous vous posez des questions sur les compagnons que
j'ai choisis. Vous vous demandez pourquoi j'ai rallié ceux qui ont attaqué ma
légion et tant de mes hommes il y a si peu de temps. La même question pourrait
être posée à ces Anari et à leurs camarades, au Seigneur Annuvil et à Dame
Tess, car nombre de leurs êtres chers sont morts des mains de mes hommes.
La satisfaction se lisait sur les visages de son auditoire.
Il avait montré sa légion sous un jour favorable tout en rappelant que les
pertes n'avaient pas été dans le seul camp bozandari.
Il recula et fit signe à Ratha d'avancer.
— Cet Anari m'a vu tuer son frère, comme j'ai vu son frère
tuer mon jeune cousin. Et pourtant, nous avons choisi d'enterrer nos épées
plutôt que courir après la vengeance et l'amertume. Car un ennemi bien plus
puissant nous menace tous... Mais avant de vous en parler, laissez-moi vous
rappeler des questions tout aussi essentielles. Vous vous inquiétez de la
rébellion des esclaves à Bozandar. Certains parmi vous ont peut-être perdu des
membres de leur famille dans cette révolte. Je n'ai aucun doute que, dans
l'armée des Loups des Neiges derrière moi, beaucoup aient perdu des êtres
chers, qu'ils soient anari ou bozandari. Alors, pourquoi cesser de nous
combattre ici et maintenant ? Pourquoi ne pas continuer et chercher une victoire
illusoire en répandant le sang de nos ennemis ?
Certains opinèrent du chef, d'autres murmurèrent leur approbation.
Alezzi lui-même semblait trouver la perspective séduisante.
— Je vais vous dire pourquoi, poursuivit Tuzza sur un ton
calme. Parce que si vous agissez ainsi, vous ne serez plus en mesure de lutter
contre un mal plus grand. Pour ce faire, vous aurez besoin de tous, des Anari
comme des Bozandari. Il nous faudra nous battre en frères car dans ce combat,
nous serons frères. Si nous ne nous allions pas maintenant, nous serons une
proie facile pour l'Ennemi qui prépare son attaque en cet instant même. Un
ennemi qui fera des Bozandari des esclaves aussi sûrement que nous avons
asservi les Anari. Réfléchissez à ce que je viens de dire, mes frères. Pensez à
la façon dont vous avez traité les Anari et demandez-vous si vous voudriez que
vos familles subissent le même sort. Vous devez vous décider et vous décider
maintenant. Notre alliance n'est pas une trahison de Bozandar mais un moyen de
la sauver.
L'un des officiers d'Alezzi prit la parole.
— Qui est cet Ennemi ? Nous n'en avons vu aucun.
— Cela viendra, dit Tuzza. Vous avez dû entendre parler
des grands ordonnateurs et de leurs victimes.
L'homme acquiesça comme à regret.
— Mais je ne les ai pas vus de mes propres yeux. Ce n'est
qu'une rumeur.
— Non, ce n'est pas une simple rumeur, dit Ratha en
croisant les bras. Nous en avons combattu un. Ils sont possédés par l'Ennemi et
ne craignent pas la mort. Ils agissent comme un seul homme. Avez-vous jamais
tenté d'écraser toutes les fourmis d'une fourmilière ? C'est impossible. Ces
grands ordonnateurs agissent un peu de la même façon.
Les Bozandari échangèrent des regards dubitatifs.
— L'Ennemi, reprit Tuzza, rend cet hiver étrangement froid
et rigoureux. Il a provoqué la destruction des récoltes et la mort de milliers
de personnes, de froid et de faim. Vous connaissez les faits. Vous en avez
entendu parler ou l'avez vu de vos propres yeux. Ce que vous ne saviez pas,
c'est que l'Ennemi se cache derrière ces événements. Il cherche à nous affaiblir
avant de nous conquérir.
— Qui est-il ? D'où tire-t-il ces pouvoirs ?
Archer intervint.
— Il fut prédit par la prophétie. Certains le nomment le
Seigneur du Chaos. C'est mon frère, Ardred.
Des cris de surprise parcoururent le groupe de Bozandari qui
n'avait pas tout entendu. Tous avaient connaissance des légendes anciennes et
des prophéties ; mais nul n'avait cru qu'elles pussent être vraies.
— Ces temps furent prédits, dit Archer. Je le combattrai
seul si je le dois mais il dispose d'armées et d'hommes asservis par les grands
ordonnateurs et les utilisera afin de mettre vos villes et vos maisons à sac
pendant que je chercherai à l'atteindre. La seule manière de protéger ce que
vous aimez est de l'empêcher de conquérir vos terres, de lui résister.
Ces mots furent salués par des murmures d'assentiment :
l'argument était logique.
— Bien, mais comment savoir si vous dites vrai ?
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