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Ma soeur la lune

Ma soeur la lune

Titel: Ma soeur la lune Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Sue Harrison
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le cœur cogna dans la poitrine de Samig. Les nattes mortuaires étaient neuves, elles avaient la couleur de l'herbe séchée que le temps n'a pas encore noircie. Il s'agenouilla tout près, se retenant avec peine d'arracher les nattes.
    Quels esprits vais-je offenser? se demanda-t-il. Quelle malédiction tombera sur ma chasse ?
    Mais si c'était Kiin...
    Dégainant son couteau, il trancha la couverture au niveau de la tête. Les couvertures s'effeuillèrent une par une, et Samig vit les cheveux foncés. Un peu de chair s'arracha de l'os du visage, et l'estomac de Samig se souleva à l'odeur de chair pourrissante. Puis, un petit morceau de bois tomba des plis du tissage, sculpté en forme de phoque. La tête de Samig fut soudain légère de soulagement. Mais il pensa qu'un enfant de cet âge et de cette taille devait être le fils de Petit Canard. Comment une femme survivrait-elle à la perte de son unique enfant?
    Samig renveloppa soigneusement le corps, grimpa sur le toit et remit la porte en place en essayant de ne pas faire tomber davantage de terre sur les tombes.
    Il resta là un moment, debout, à regarder l'autre ulaq tumulaire. Son père, le fils de Shuganan, y était enterré. Samig entreprit de creuser à travers le toit brisé.
    Lorsque Samig arriva au plancher de l'ulaq, il ne trouva rien qui ressemblât à un cadavre, personne de récemment tué par la colère d'Aka. Se pouvait-il que tout son peuple se soit échappé? Mais si personne n'était enterré là, pourquoi l'endroit était-il honoré comme ulaq des morts ? Où était son père ?
    Samig s'apprêtait à regagner la sortie quand son pied glissa dans la boue. En tombant, il se cogna la main contre quelque chose de pointu. C'était un os, que Samig tira du gazon. Il examina sa main à la recherche d'échardes qui pourraient infecter sa chair. Mais il s'aperçut que ce n'était pas un os de baleine ou de lion de mer, quelque chose venant d'un chevron, mais un ossement humain. Il le tint contre son avant-bras, observant son épaisseur, les indentations où les muscles étaient attachés autrefois. L'os d'un homme puissant et costaud.
    Il le reposa à ses pieds et entreprit de creuser à l'endroit où il l'avait trouvé. Il découvrit les os longs des jambes et les petits qui avaient été les mains et les pieds. Enfin, le crâne. Aucun n'était enveloppé. Pourquoi? Qu'était-il donc arrivé? Le silence de sa mère concernant son premier époux aurait-il non pas été un silence de respect, mais de haine?
    Samig étudia ses propres bras, ses jambes et ses mains. À vrai dire, ce n'étaient pas les membres longs et fins des Premiers Hommes. Pas même ceux, plus épais, des Chasseurs de Baleines. Qui était son père? Qui étaient les siens?
    Samig regarda les ossements à ses pieds. Quels esprits offenserait-il en les enterrant de nouveau? Quels esprits déchaîneraient leur colère s'il ne le faisait pas?
    Samig ferma les yeux, essuya la pluie de son visage avec la manche de son parka. Il était trop las pour s'en soucier. Étendant la couverture qu'il avait trouvée dans l'ulaq de Kayugh, il enveloppa les os avec soin puis prit des pierres sur ce qui avait été un mur. Il empila les pierres sur le paquet, pratiquant des funérailles à la manière des Chasseurs de Baleines.
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    Samig hocha la tête en signe d'approbation. La grotte choisie par Petit Couteau était bien au-dessus de la ligne de marée et son sol était de gravier et de sable sec.
    Trois Poissons était accroupie dans l'entrée, les bras juste au-dessus d'un feu de cuisson. L'eau dégoulinait de son suk et grésillait sur la camarine incandescente.
    — As-tu trouvé quelque chose? demanda-t-elle.
    — Un mort. Un garçon, fils de l'homme appelé Longues Dents et de sa seconde épouse, Petit Canard. Mais le garçon est mort depuis un certain temps. Pas à cause d'Aka.
    La montagne les secoua et Trois Poissons bondit sur ses pieds, les mains sur la bouche.
    — Ce n'est rien, dit Samig. Tugix ébranle souvent la terre.
    Trois Poissons se rassit, mais Samig reconnut le doute dans ses yeux.
    — Tu es en sécurité, ajouta-t-il avec quelque irritation.
    Je devrais être seul, se dit-il. Ou seul avec Petit Couteau. Je ne voudrais pas que Trois Poissons se plaigne de nous à Phoque Mourant, mais j'aurais dû la laisser avec son peuple.
    La nuit passa. Samig prenait garde de faire son lit près de Petit Couteau, s'assurant qu'ils étaient tous deux d'un côté du feu, Trois Poissons

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