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Ma soeur la lune

Ma soeur la lune

Titel: Ma soeur la lune Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Sue Harrison
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les oursins déjà ouverts. Il libéra son couteau de son fourreau et utilisa la lame pour sortir les ovaires des oursins. Il mangeait si vite que Kiin ne soutenait pas le rythme. Enfin, il marqua une pause et, la bouche pleine, dit :
    — J'ai songé à acheter une femme pour Samig.
    Comme Kiin ne répondait pas, il lui arracha des
    mains une coquille ouverte et ajouta :
    — Kayugh m'a demandé de ramener une femme pour lui. Tu ne le savais pas?
    Kiin garda la tête baissée et cassa un autre oursin. Disait-il la vérité ou la narguait-il avec un de ses mensonges ?
    — Tu ne me crois pas? insista Qakan. Regarde toi-même. À qui appartiennent ces peaux de phoque? À Kayugh et à Samig.
    Kiin se souvint du tas de peaux, douces et lisses, tannées à la perfection. Oui, c'étaient sûrement des peaux appartenant à Kayugh. Aucune femme au village ne les préparait aussi bien que Chagak. Mais peut-être étaient-elles celles qu'Amgigh avait données à son père comme dot pour Kiin. Ou peut-être Qakan les avait-il volées dans l'ulaq de Kayugh.
    — J'ai d'abord pensé échanger les peaux de Kayugh contre une vieille femme, dit Qakan en s'esclaffant. Une vieille femme qui n'a plus de fils à donner, avec des dents pourries et des mains douloureuses et inutiles.
    Kiin posa la pierre.
    — Encore ! hurla Qakan.
    Kiin serra les dents et planta ses yeux dans ceux de son frère.
    — Le reste est pour moi.
    Qakan bondit sur ses pieds, rota et lui arracha des mains le sac d'oursins. Il les sortit tous, lança les deux plus petits à Kiin et la menaça de son couteau.
    — Je mangerai ceux-là. Tu n'avais qu'à en ramasser plus.
    Kiin ne broncha pas.
    Qakan se rassit, fit un vent avec un grognement satisfait, porta un oursin à sa bouche à l'aide de sa lame de couteau et ajouta :
    — Oui, j'allais ramener une vieille femme à Samig, mais maintenant je songe à une femme jeune, qui aime les hommes, ricana-t-il. Quelqu'un qui ne voudra pas se garder pour son époux. Le voyage est long jusqu'à Tugix.
    Kiin détourna les yeux vers la mer, vers le ciel sombre de l'est. Qakan parlait toujours, racontant comment il coucherait avec la femme de Samig, comment il serait commerçant, avec de nombreuses femmes, acquérant son pouvoir comme marchand, pas dans les eaux froides comme les chasseurs. Un jour, il aurait sa propre tribu, une tribu de fils s'étendant des Chasseurs de Baleines à l'ouest jusqu'au Peuple des Caribous à l'est.
    « Il se vante, c'est tout », murmura l'esprit de Kiin. Mais Kiin savait que Qakan avait un esprit vigoureux. Autrement, comment pourrait-il être marchand, avec assez de choses à troquer pour que les autres voient en lui un homme puissant ?
    Les mains de Kiin remontèrent jusqu'à l'amulette qui pendait à son cou. Cet après-midi, quand Qakan l'avait ligotée, il avait menacé de lui prendre son pendentif, mais elle lui avait rappelé que toute menace envers son esprit à elle était une menace envers son enfant à lui. Alors, il lui avait permis de garder la figurine et elle s'y accrochait, priant pour que les vantardises de Qakan ne deviennent jamais réalité, que Samig et son peuple, que même les Tra-queurs de Phoques qui la prendraient pour femme, soient protégés.
    26
    Samig palpa la tête de lance que Nombreuses Baleines lui avait donnée. C'était une lame d'obsidienne, étroite et longue comme la main d'un homme.
    — Il te faudrait de nombreux étés avant d'être suffisamment habile pour t'en servir parfaitement, lui dit Nombreuses Baleines, mais tu apprendras. Et ce soir, pendant la cérémonie, tu deviendras un Chasseur de Baleines. Il est juste que tu prennes cette arme.
    Le vieil homme grimpa avec lenteur hors de son ulaq et Samig se retrouva seul une fois de plus. Cela avait été une longue journée de réflexion, l'ulaq plongé dans l'obscurité à l'exception d'une petite lampe à huile posée à même le sol, pas une lampe de femme, mais une lampe de chasseur qu'on pouvait emporter dans un ikyak.
    Nombreuses Baleines avait peint le visage de Samig d'ocre rouge, puis Samig s'était préparé, chantant la mélopée que Nombreuses Baleines lui avait apprise, essayant d'inventer un chant à lui, comme tout chasseur était censé le faire. Mais ses pensées refusaient de s'assembler en un chant ; finalement, les mots dérivèrent pour aller se cacher dans les ombres de l'ulaq; son esprit s'emplit d'images de chasseurs attrapant des baleines avec des harpons et des

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