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Mademoiselle

Mademoiselle

Titel: Mademoiselle Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jacqueline Duchêne
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faste. La reine fit mine de se réjouir. Le peuple, las de hurler contre Mazarin, témoigna sa joie de les revoir. Anne-Louise et Condé, après quelques escarmouches, firent la paix.
    — En vérité, ma cousine, j'ai souhaité que vous fussiez marquée cruellement de votre petite vérole.
    — Et moi, mon cousin, je me suis réjouie de votre prison.
    C'était le passé. La jeune fille maintenant le regardait avec admiration. Le grand nez, les dents gâtées, l'odeur affreuse de celui qui se vantait de ne jamais se laver les pieds ne la rebutaient plus. Un héros, un homme, une odeur d'homme !
    Trois jours durant, la femme de Condé souffrit à la tête d'un « érésypèle rentré », et l'on craignit pour sa vie. Trois jours durant, Anne-Louise se surprit à rêver de mariage avec lui.
    Vite, elle se reprit. La « couronne fermée », le royaume de France, voilà ce qu'il lui fallait ! Elle pouvait y prétendre. Les gens de cour, les agents secrets, les diplomates, tous savaient son influence sur son père. Si la reine voulait que Gaston s'entremît pour faire accepter de Condé et du Parlement le retour de son cher Mazarin, elle devait consentir au mariage de son fils avec Mademoiselle. Donnant donnant.
    Les conciliabules allaient bon train. Beaucoup laissaient espérer à Anne-Louise l'accord de la souveraine. Mme de Choisy, venant la voir au nom du cardinal, annonça pompeusement : « Je viens faire votre fortune. » Elle parla du mariage éventuel avec Louis et s'arrangea pour se faire donner immédiatement un domaine dans les Dombes. En partant, elle lui fit même miroiter l'appui de la princesse Palatine, sœur de la reine de Pologne.
    — Mais comme elle est gueuse, ajouta-t-elle, il faudra, si votre affaire réussit, que vous lui accordiez une grosse gratification. Ah, j'oubliais ! Elle sera votre surintendante avec de bons appointements, et vous engagerez mon époux comme trésorier.
    Mademoiselle promettait, promettait. Bien sûr, elle désirait cette couronne de France, depuis douze ans même, depuis la naissance de Louis, mais elle n'osait trop se réjouir.
    — Ma tante m'aime moins, je le sens, confiait-elle à ses amies. Souhaite-t-elle le retour de l'Italien au point d'accepter le marché proposé ?
    Gillonne et Cécile, pour la rassurer, la poussaient aux plaisirs de son âge. La jeune fille se laissait entraîner. Les riches s'amusaient à Paris. Ils voulaient oublier les incertitudes dues à la situation politique, les soulèvements populaires incessants, les effigies du Mazarin pendues à chaque coin de rue.
    Accaparée par ses rêves de grandeur, Anne-Louise ne comprit pas à quel point ses frivolités irritaient la reine. Anne d'Autriche, qui souffrait d'être séparée de son Mazarin, voyait avec tristesse les caisses du royaume vides, les provinces révoltées. Elle craignait pour l'avenir de ses fils, et se réfugiait dans une piété austère.
    Comment pouvait-elle supporter que sa nièce fréquentât la princesse de Longueville, naguère à la tête des rebelles, qu'elle passât des heures à chevaucher au Cours-la-Reine en compagnie de femmes à la réputation guillerette, et gaspillât son argent en plaisirs coûteux ?
    Quelle folie par exemple d'engager à son service le chanteur Michel Lambert ! On appréciait son invention mélodique, son émotion contenue, il était à la mode, mais il se faisait payer gros. Et ces six violons, logés chez elle, aux Tuileries, à disposition jour et nuit !
    Pour une coquette somme, Anne-Louise s'était attaché une Picarde, potelée, enjouée d'esprit, qui avait pour tâche de faire habilement « l'éloge de Mademoiselle », à chaque instant et en tous lieux. Auprès des gazetiers,des chansonniers, dans les foires même et dans les bals huppés.
    Personne n'en avait encore eu l'idée. Grâce à son argent, grâce à cette pourvoyeuse d'éloges appointée, la jeune fille forcerait les gens à entendre dire du bien d'elle, à le répéter, à l'écrire. Nul ne pourrait ignorer les rares qualités de celle qui joignait à tant de noblesse, goût exquis, passion pour la musique et... richesses.
    — Balivernes, grinça Anne d'Autriche. Est-ce que les gens de qualité ont besoin de se voir loués dans les gazettes ?
    La bonne Motteville s'indigna. Mieux, elle en rajouta :
    — Et ce bal au Palais-Royal, quelle honte ! Par bonheur, Votre Majesté s'était retirée chez elle.
    — Je n'étais pas en humeur d'y assister. Je sais que ma

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