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Mademoiselle

Mademoiselle

Titel: Mademoiselle Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jacqueline Duchêne
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donnait directement sur le fleuve. Elle pourrait entrer par là.
    Les bateliers lui proposèrent d'emprunter la porte Brûlée, plus proche, et qui donnait aussi sur la Loire. Elle leur distribua tout l'argent qu'elle avait et leur en promit bien davantage, s'ils lui permettaient d'entrer.
    Les hommes de son escorte la rattrapèrent et lui prédirentl'insuccès de son entreprise. Une fois de plus, elle ignora leurs avis et se moqua de leur couardise.
    — Retournez donc à l'hôtellerie. Et ne me rompez pas les oreilles. Empêchez mes gardes de me suivre. Qu'ils m'attendent sur le fleuve. Je veux entrer dans la ville de mon père sans protection armée, en toute confiance. Avec pour seule compagnie mes deux amies.
    Méthodiquement, les bateliers poursuivaient leur travail. Ils démolissaient la porte avec ardeur et furent bientôt aidés par des bourgeois d'Orléans. Guidés par le bruit des coups, ils s'attaquèrent eux aussi, de l'intérieur, à la fameuse porte. Elle était d'une épaisseur extrême, renforcée de barres de fer, encastrée dans une énorme maçonnerie au pied de laquelle l'eau battait.
    On parvint, sinon à l'ouvrir, du moins à aménager une ouverture en arrachant deux planches du milieu. Suffisante pour s'y glisser. Mais comme la Loire était fort basse, il restait une certaine distance à franchir pour se hisser au niveau de la porte. Les bateliers s'étaient débrouillés comme ils avaient pu. Mademoiselle y arriverait-elle ?
    Pour l'aider, on amarra deux bateaux côte à côte qui formaient ainsi une sorte de pont et, dans le plus proche de la muraille, on installa une grande échelle. C'était maintenant au tour d'Anne-Louise d'agir. Sans une hésitation, elle agrippa les montants de l'échelle et commença hardiment à grimper. Sa grande jupe la gênait. Tout comme son volumineux chapeau dont la plume blanche se balançait devant ses yeux. Elle l'arracha et le lança dans la Loire.
    Elle eut le plaisir de voir un homme le repêcher et l'agiter triomphalement en criant « Vive Mademoiselle ! » D'autres lui firent écho. Galvanisée, Anne-Louise reprit son escalade.
    Dieu, que c'était haut ! Et ce balancement insidieuxque le bateau imprimait à l'échelle, quel supplice ! Tout à coup, elle découvrit qu'un barreau était fendu en son milieu. Attention ! Elle réussit à l'enjamber, et se retrouva sur un échelon solide. Ouf ! Elle se sentait plus agile qu'un chat.
    Enfin parvenue au niveau de la brèche, elle aperçut par l'échancrure de la porte Brûlée le gouverneur qui masquait son embarras sous une affabilité de commande. Elle sourit de la cocasserie de cette rencontre.
    Comment passer ? Le sol était si crotté qu'un valet du gouverneur eut pitié d'elle. La prenant dans ses bras, il l'aida à franchir la trouée. Quand elle retomba sur ses pieds, elle sut qu'elle avait gagné. Elle foulait le sol d'Orléans.
    À ce moment précis, l'on battit le tambour. Partout, les cris de joie redoublaient, les soldats de la garnison se ralliaient. Anne-Louise fut soulevée de terre par deux hommes qui la juchèrent sur un fauteuil de bois. Prirent-ils le temps de l'y asseoir ou la laissèrent-ils perchée sur l'un de ses bras ?
    Elle n'en savait rien. Elle riait trop. Elle était hors d'haleine. On lui baisait les mains. On la porta en triomphe dans les rues d'Orléans. Et toujours ces roulements de tambour qui l'accompagnaient. Comme on approchait de l'hôtel de ville, elle voulut descendre de son trône improvisé et retrouver ses esprits. Rouges et essoufflées, ses « maréchales » la suivirent.
    Et ce fut un spectacle insolite de voir cette grande jeune femme, en cheveux mais l'air fier, la toilette et les bottes couvertes de poussière, marcher gaillardement derrière une compagnie de soldats pour interpeller les magistrats.
    Ils devaient être surpris, leur déclara-t-elle, de la manière dont elle était entrée dans Orléans. Mais pourquoil'avoir fait attendre si longtemps à la porte Bannière ? Son humeur naturellement impatiente ne l'avait pas supporté. Elle était donc passée par la porte Brûlée, de sa propre autorité. Qu'ils se rassurent, personne à la cour ne les en accuserait. En revanche, qu'ils ne s'occupent plus de rien. Tout passerait par elle. Une personne de sa qualité, où qu'elle se trouve, est la maîtresse. Avec justice.
    Effrayés de tant de détermination, les magistrats la laissèrent diriger la séance à l'hôtel de ville et y recevoir les

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