Marcel Tessier racontre notre histoire
début de son mandat, l’âge d’or du grand capitalisme se dessine, avec ses héros, des personnages très admirés pour leur fortune et leur prestige: les Ford, Rockefeller, Vanderbilt, Carnegie. Le Canada, dans le sillage de ces géants, profite de la conjoncture. On peut affirmer qu’avec le gouvernement Laurier débute une période de prospérité économique qui va durer jusqu’à la fin des années 1920.
UN RÉGIME MARQUÉ PAR LES DIVISIONS
Plusieurs grandes crises politiques vont cependant assombrir son régime. L’une d’entre elles est déclenchée de Londres par Joseph Chamberlain, le ministre britannique des Colonies, qui projette d’établir une fédération politique entre ces dernières et l’Angleterre. Laurier rejette poliment ses avances; mais son attitude à l’égard de l’Empire est bien mal reçue chez de nombreux Canadiens d’origine britannique qui voudraient au contraire que le pays se rapproche de la mère patrie. Chez les Canadiens français, c’est l’inverse. Henri Bourassa, le bras droit de Laurier, et les nationalistes tiennent absolument à ce que le Canada se détache de l’Empire et devienne indépendant le plus tôt possible. Entre ces extrêmes, Laurier doit manœuvrer habilement. Il sait fort bien que pour demeurer premier ministre, il a besoin d’une majorité d’appuis chez les Canadiens anglais, tout en préservant son château fort au Québec.
D’autres événements encore vont susciter les divisions sous le gouvernement Laurier. En 1890, le Manitoba abolit les écoles catholiques et françaises. Lors de son élection en 1896, Laurier avait promis de régler le problème. Le compromis de 1897 qu’il établit avec le premier ministre Greenway mécontentera les francophones du Manitoba et du Québec aussi bien que le clergé catholique. En 1899, c’est la guerre des Boers. L’Angleterre, qui convoite les mines d’Afrique du Sud, attaque les colons hollandais déjà sur place et demande au Canada de fournir des soldats. Les anglophones sont d’accord, les francophones ne veulent rien entendre. Laurier prend une décision de compromis. Et quand Bourassa lui demande s’il a tenu compte de l’opinion du Québec, le premier ministre répond: «Mon cher Henri, la province de Québec n’a pas d’opinion, elle n’a que des sentiments.» Outré, Bourassa démissionne. Le schisme sera définitif.
Un autre projet de loi, le Naval Bill, divise encore les deux peuples et provoque la chute de Laurier en 1911. Le conservateur Robert Laird Borden est élu grâce à l’appui des Canadiens français.
Comme chef de l’opposition, Wilfrid Laurier se dresse contre la conscription. Plusieurs de ses lieutenants canadiens-anglais l’abandonnent. Il meurt à Ottawa le 17 février 1919. Sa politique aura été celle du compromis et de la conciliation.
La suite coûtera malheureusement très cher aux nationalistes québécois qui ont appuyé le Parti conservateur fédéral. En effet, le gouvernement Borden va établir une politique plus impérialiste encore que celle de Laurier. Un exemple: le 17 décembre 1917, il imposera la conscription.
62 LA GUERRE DES BOERS
N ous sommes à la fin du XIX e siècle. L’empire britannique est à son zénith. L’Australie, la Nouvelle-Zélande, le Canada, l’Inde, Malte, Gibraltar et d’autres colonies encore sont accrochées à sa couronne. Le responsable britannique aux colonies, Joseph Chamberlain, clame haut et fort que «la race anglo-saxonne est la plus grande des races gouvernantes que le monde ait jamais connues». À cette époque, l’Italie, l’Allemagne et les États-Unis accèdent au rang de puissances. Cette concurrence effraie l’Angleterre, qui veut affermir son empire en resserrant les liens avec ses colonies. On parle même d’une «plus Grande-Bretagne» qui n’aurait qu’une seule et même administration, et une seule armée (Léandre Bergeron).
EN AFRIQUE
Pendant ce temps, dans le sud de l’Afrique vivent paisiblement les Boers, des descendants du peuple hollandais. Ils y sont depuis 1634. Or, vers 1867, on découvre de riches mines d’or sur leur territoire. Quelle aubaine pour l’Angleterre, qui cherche justement à agrandir son empire! À elle de mettre la patte sur ces proies faciles et si bien dotées avant que d’autres ne le fassent. Ou, si l’on préfère, à elle d’étendre à l’Afrique son œuvre de colonisation et de civilisation… L’Angleterre déclare donc la guerre en 1899
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