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Marco Polo

Marco Polo

Titel: Marco Polo Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gary Jennings
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transparent, mais d’un mica miroitant, translucide et cependant
légèrement opaque, enchâssé dans un bâti aux fioritures surabondantes. Il en
dégagea le battant et, après l’avoir ouvert en grand, m’enjoignit :
    — Regarde ceci.
    Nous avions une vue plongeante sur une surface
considérable des terrains du palais que je n’avais pu encore visiter, car
c’était une partie en travaux, vaste étendue de terre jaune encombrée de
briques murales, de dalles destinées à paver des routes, de brouettes,
d’outils, d’équipes d’esclaves suants, et...
    — Amoredèi ! Quelles
sont ces gigantesques bêtes ? Et pourquoi diable leurs cornes ont-elles
poussé de façon aussi étrange ?
    — Ce ne sont pas des cornes, bêta de Ferenghi, ce sont des défenses, celles dont on tire l’ivoire. Cet animal, dans les
tropiques méridionaux d’où il provient, est appelé gajah. Il n’existe
aucun terme mongol pour le désigner.
    Chingkim le traduisit du mot farsi, fil, que je
connaissais.
    — Des éléphants ! soufflai-je, émerveillé.
Bien sûr ! J’en avais déjà vu en dessin, mais leur représentation ne
devait pas être très réussie.
    — Peu importent les gajah, poursuivit
Kubilaï. Vois-tu ce qu’ils sont en train d’amasser ?
    — On dirait une énorme montagne de blocs de kara, Sire.
    — Tout à fait. L’Architecte de la Cour est en
train de m’aménager ici un vaste parc, et je lui ai donné l’ordre d’y créer une
colline. Il doit aussi y semer de l’herbe en quantité. As-tu vu cette herbe,
qui pousse déjà dans toutes les cours du palais ?
    — Bien sûr, Sire.
    — N’as-tu rien constaté de remarquable, à son
sujet ?
    — Je crains que non, Sire. Elle ne différait en
rien de celle que nous avons foulée sur d’interminables milliers de li, pour
venir jusqu’ici.
    — Là justement réside sa spécificité. Ce n’est
pas un quelconque gazon. C’est la douce herbe des plaines dans lesquelles je
suis né et sur lesquelles j’ai grandi.
    — Je suis navré, Sire, mais si je suis censé
tirer de tout cela une leçon...
    — Mon cousin Kaidu vous a dit que j’avais
dégénéré au rang de ce qui peut difficilement porter encore le nom de Mongol.
En un sens, il a raison.
    — Sire !
    — En un sens, oui, indéniablement. Je suis bel et
bien descendu de mon cheval pour gouverner cette terre. J’ai trouvé chez ces
Han cultivés un grand nombre de traits admirables et les ai adoptés. J’essaie
donc d’être plutôt courtois que grossier, de me montrer plus diplomate que
dictatorial, de me comporter en empereur organisé plus qu’en occupant et en
simple seigneur de guerre. Sur tous ces points, j’ai évolué par rapport à ce
que Kaidu pense être un Mongol véritable. Mais il n’empêche, je ne renie pas
pour autant mes origines, ma période guerrière ni mon sang mongol. Ce qu’entend
démontrer cette colline.
    — Je regrette, Sire, mais cet exemple n’éclaire
en rien ma compréhension.
    — Explique, Chingkim, demanda-t-il à son fils.
    — Tu vois, Marco, cette colline fera partie d’un
parc d’agrément pourvu de terrasses, de promenades, de cascades et de charmants
pavillons savamment disposés çà et là. L’ensemble viendra embellir les terres
du palais. En cela, reflétant l’art des Han, il prouvera toute l’admiration que
nous avons pour eux. Mais il constituera également bien davantage. L’architecte
aurait fort bien pu utiliser la terre jaune locale pour édifier cette colline,
mais mon royal père a commandé qu’elle soit édifiée en kara. Cette roche
qui brûle ne sera peut-être jamais nécessaire, mais au cas où le palais ferait
un jour l’objet d’un siège, nous aurions à portée de main une réserve illimitée
de combustible. Il s’agit clairement là d’un raisonnement de combattant. Quant
à la colline, les bâtiments alentour, les ruisseaux et les massifs de fleurs,
tous seront environnés de cette herbe des plaines. Un témoignage vivant de
notre héritage mongol.
    — D’accord ! acquiesçai-je. Tout est clair,
maintenant.
    — Les Han ont un proverbe très concis à ce sujet,
enchaîna Kubilaï. Bai wen buru yi jian, « mieux vaut avoir vu une
seule fois qu’entendu dire cent fois ». Là, tu as vu. J’aimerais à présent
t’entretenir d’un autre aspect de l’art si délicat qui consiste à gouverner.
    Nous retournâmes à nos sièges. Répondant à des ordres
inaudibles, la servante se

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