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Marguerite

Marguerite

Titel: Marguerite Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Louise Chevrier
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personne rappelèrent au jeune homme le souvenir de sa propre mère et la hâte qu’il avait de la revoir. Mère de neuf enfants, Marie-Anne Bruneau était dotée d’un grand sens de l’organisation. En plus d’élever sa famille avec l’aide de quelques domestiques, elle se tenait plus souvent derrière le comptoir du magasin familial qu’{ ses fourneaux et répondait aimablement à la clientèle, mesurant elle-même les aulnes de bombazette ou de flanelle et suggérant l’achat d’un mouchoir en vantant la qualité ou la finesse de la soie.
    Et le soir, c’était encore elle qui repassait les additions dans les lourds livres reliés et recouverts de vélin qui servaient à tenir le registre des comptes. Elle suggérait habilement à son mari les achats à faire et à quel moment les créances étaient dues. Monsieur Bruneau, un homme fort occupé puisqu’il venait d’être nommé capitaine de milice, lui laissait de plus en plus la direction du magasin, s’intéressant passionnément à la politique et rêvant de devenir député. Un choix avisé. Si Pierre Bruneau était fils de marchand, c’était son épouse, une Robitaille, la véritable commerçante du ménage.
    L’arrivée du visiteur créa un léger tumulte dans la maisonnée. Une fillette d’environ huit ans salua le jeune homme d’une petite révérence digne d’une vraie fille de bonne famille. Boileau eut un regard attendri, la petite Julie Bruneau lui rappelant ses sœurs.
    — Mon frère René-Olivier étudie au séminaire pour être prêtre, annonça-t-elle à leur invité, le soir, au cours du souper.
    A titre de fille aînée, elle avait obtenu la permission spéciale de prendre place à la table des grands. Les autres enfants Bruneau mangeaient avec les domestiques, à la cuisine, exception faite de son frère Pierre-Xavier, Fainé des garçons.
    — Vous féliciterez votre frère séminariste, mademoiselle Bruneau, répondit cérémonieusement le jeune homme, qui s’amusait du ton sérieux de la fillette assise en face de lui.
    Assis à sa droite, Pierre-Xavier, qui n’avait que seize ans, était déj{ sorti du collège. Inutile qu’il fasse d’aussi longues études que son frère cadet puisqu’il devait prendre la relève du commerce familial ; il travaillait déjà au magasin. René l’observa discrètement. Plutôt effacé et timide, il semblait avoir peu de dispositions pour le genre de profession à laquelle on le destinait.
    — Vous a-t-on déjà dit à quel point vous ressemblez à votre père ? lui demanda son hôte, monsieur Bruneau.
    René Boileau fit oui en souriant.
    — Souvent. On dit que j’ai son allure et ses manières, quoique je sois plus réservé de nature. D’ailleurs, c’est une des raisons qui m’a amené { choisir le notariat. C’est une profession qui s’exerce dans la discrétion.
    — Il est vrai que votre père a beaucoup de panache. Il savait cultiver ses relations, du temps qu’il était député {
    Québec. Vous a-t-il déjà raconté le jour où il a été invité à la table du prince Edouard ?

    René Boileau acquiesça à nouveau. Son père avait raconté moult fois ce fameux dîner, à Québec, auquel assistait aussi madame de Saint-Laurent, la bonne amie de Son Altesse Royale.
    — Ce récit fait désormais partie de nos légendes familiales, répondit avec humour le jeune homme. Mon père connaissait bien les deux princes d’Angleterre. Figurez-vous que l’autre prince d’Angleterre, William Henry, s’était arrêté chez nous, { Chambly, lorsque je n’étais qu’un enfant.
    — Mais il aimait tout autant parler politique, ajouta madame Bruneau. Assis exactement à cette place, à cette table, il pouvait discuter toute la nuit avec mon mari.
    — Ce n’est pas étonnant, répondit René. Mon père adore discourir.
    Puis, changeant poliment de sujet, il demanda :
    — Savez-vous quand part la prochaine malle pour Trois-Rivières et Montréal, que j’annonce mon arrivée { mes chers parents ?
    Madame Bruneau se leva et se dirigea vers le vieux buffet en pin { deux corps qui se trouvait dans la pièce, ouvrit l’un des quatre tiroirs pour en tirer un livre, Y Almanach de Québec.
    — Voyons voir, fit-elle en consultant cet ouvrage si utile.
    Page cent quarante-deux: la poste pour Montréal part de Québec tous les lundis et jeudis à quatre heures de Vaprès-midi, lut-elle.
    Ce qui veut dire que la poste du lundi arrive à Montréal le mercredi matin et celle du jeudi, le

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