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Marguerite

Marguerite

Titel: Marguerite Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Louise Chevrier
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toujours facile. Monsieur de Rouville appréciait la compagnie du docteur Talham et l’invitait parfois, à son manoir, avec Marguerite. Celle-ci s’était bien rendu compte que sa présence déplaisait à madame de Rouville et se repliait sur ses obligations de mère pour s’excuser. Jamais elle ne révélerait { son mari la véritable raison de sa répugnance à se rendre chez les Rouville.
    Alexandre semblait comprendre. Il n’insistait pas, se disant sans doute que c’était { cet endroit qu’elle avait été violentée, ce qui expliquait sa réticence à y retourner. Ainsi, Marguerite ne s’était jamais retrouvée seule face { son agresseur.
    Mais aujourd’hui, elle restait silencieuse, seule au milieu de convives emportés par la gaieté de l’après-midi, l’estomac noué par sa vieille peur. Ovide de Rouville était assis en face d’elle. Pendant tout le repas, elle imagina son regard méchant posé sur elle. L’espace d’un cillement, leurs yeux s’étaient croisés. Marguerite avait vite baissé les siens, mais cet échange furtif avait suffi pour qu’elle revoit la sinistre menace. Il s’était ensuite retourné, tout sourire, vers sa voisine de table, Sophie, qui était d’humeur à fleureter, tandis que Marguerite étouffait, cherchant une nouvelle raison pour s’excuser et quitter la table.
    Au moment où on apportait confitures et pâtisseries, elle n’en pouvait plus et se leva pour aller rejoindre ses enfants.
    Ce faisant, elle attira l’attention du jeune de Rouville qui profita du fait que Sophie se servait du dessert pour suivre Marguerite.
    Plus loin, depuis longtemps rassasiés, les enfants jouaient.
    En apercevant sa mère, Melchior se précipita pour lui sauter dans les bras. Zoé, croyant que cela faisait partie d’un jeu, fit de même. La poussée de cette marmaille bouscula Marguerite qui se retrouva dans les bras d’Ovide qui arrivait derrière elle. Un grand frisson d’effroi la parcourut lorsqu’elle se redressa et reconnut son agresseur d’autrefois. Elle cria.
    — Non!
    — La belle gueuse et son enfant bâtard, souffla méchamment Ovide { l’oreille de Marguerite qui vacilla. L’haleine déplaisante d’Ovide, chargée d’alcool, la ramena dans l’écurie des Rouville, cinq ans auparavant.
    La jeune femme retrouva son équilibre et serra son fils contre elle. Il la darda d’un regard mauvais, libidineux. La garce, elle le tentait encore! Avec sa longue natte, cette femme l’obsédait.
    Intriguée, Emmélie, qui avait vu la scène déplaisante, accourut.
    — Viens me faire un bécot, toi, fit-elle en tendant les bras à Melchior afin de délivrer Marguerite.
    Elle sortit son mouchoir de sa poche pour essuyer le visage barbouillé de confitures.
    — Tout va bien, Marguerite ?
    — Oui. Un peu de fatigue, je crois, rien de plus. Je vais voir si Eugène dort bien dans son couffin.
    Marguerite mentait mal. Ovide de Rouville terrorisait son amie, Emmélie en était sûre. Un voile d’effroi était passé { la vitesse de l’éclair sur le visage de sa cousine.
    Quelqu’un d’autre n’avait rien perdu de la scène. Un besoin pressant avait obligé messire Bédard à quitter la table.
    Il s’était passablement éloigné pour se soulager loin de la vue des convives et revenait tranquillement, profitant de Pair frais du jardin de Monsieur Boileau. Il n’avait jamais oublié la confession de la jeune femme, la veille de son mariage.
    Depuis, il se méfiait du jeune Rouville, mais il savait que son père le surveillait de près. La proximité d’Ovide de Rouville et de Marguerite ne lui disait rien de bon et il s’approcha.
    — Comment allez-vous, madame Talham ? Vos beaux enfants ont Pair en pleine santé, ajouta-t-il tout en jetant sur Ovide un regard sévère. « Eloigne-toi de cette femme », disaient les yeux du curé.
    Rouville ne s’y trompa pas et déguerpit.
    Mais Emmélie avait eu le temps de comprendre le désarroi de sa cousine. Ovide était l’agresseur de Marguerite et le petit Melchior était son fils. Elle en était certaine.

    *****
L’après-midi avait fait place à la brimante qui ramena la douce fraîcheur d’une belle soirée d’été. Sophie fit allumer les lanternes qu’elle avait fait placer un peu partout dans le jardin, puisque la température permettait qu’on danse dehors. A la demande de Monsieur Boileau, le docteur sortit son violon et l’accorda avant de jouer les premières mesures qui annonçaient la danse.

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